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21/12/2007

Une étude en jaune (second portfolio)

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De haut en bas : Alberto de Mendoza et Edwige Fenech, ambiance nocturne, les grands espaces, chasseur et proie, le carrelage de la salle de bain et le beau George.
Photographies : captures DVD NoShame

20/12/2007

Une étude en jaune (partie 2)

 Au contraire du film de Lucio Fulci, Lo stano vizio della signora Wardh (L'étrange vice de Mme Wardh) réalisé par Sergio Martino en 1970 est une sorte de mètre étalon du genre. Madame Wardh, c'est Edwige Fenech et Edwige, vous permettez que je vous appelle Edwige ? c'est quelqu'un. Reine de la comédie polissonne italienne des années 70, elle a également participé à quelques fleurons du genre qui nous occupe ici. Edwige a une plastique superbe que vous pouvez aller admirer sur cette page du site de la Cinémathèque française qui lui a rendu hommage, l'espace d'une nuit, le 7 décembre. Très brune, très italienne (Quoique française, sa mère était sicilienne), elle a le physique félin des Barbara Steele et Sandra Milo. Elle est surtout très à l'aise avec son corps. La scène où elle se déshabille dans sa salle de bains au carrelage psychédélique (demain la photographie) dégage un mélange de sensualité et de naturel tout à fait excitant. Dans ce registre comme dans celui de l'angoisse, Edwige est ici excellente. Je n'en tirerais toutefois aucune généralité car c'est le premier film que je vois avec elle. Il faut un début à tout et pour ceux qui seraient dans mon cas, je ne saurais trop vous conseiller de commencer par cet excellent giallo, le premier de Sergio Martino qui se révélera très doué et deviendra rapidement un spécialiste.

Le partenaire masculin d'Edwige, sonnez trompettes et buccins, n'est autre que George Hilton. Oui, le beau George n'a pas fait que des westerns. Je ne crois pourtant pas que sa prestation puisse le faire remonter dans l'estime de mon ami Tepepa. Il faut le voir, lors de sa première apparition, beau disais-je, costaud, bronzé, vêtu de ces abominables fringues masculines des années 70, col pelle à tarte, chemise largement ouverte sur un poitrail viril orné d'une chaîne en or. Ne reculant devant aucun sacrifice, vous aurez une photographie demain. Je ne saurais réduire son rôle à cette caricature, mais j'avoue que Hilton m'a plutôt fait sourire dans la première partie du film avec sa prestation de bellâtre. D'autant qu'il est, lui, beaucoup moins à l'aise dans les scènes érotiques. A noter que nos deux héros feront d'autres gialli ensemble et j'ai sur ma table Tutti i colori del buio, qu'ils ont tourné avec Sergio Martino toujours, en 1972. J'ai hâte.

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A leurs côtés, une nouvelle fois Alberto De Mendoza, une nouvelle fois plus intéressant en mari occupé et délaissant sa belle épouse (Ça, c'est un rôle de composition !) Et puis Ivan Rassimov en amant psychopathe, pas trop sobre. Et encore, la délicieuse Conchita Airoldi, pétillante dans le rôle de l'amie Carol. Une distribution solide pour un film qui ne l'est pas moins. Mais, et l'histoire ? L'histoire... C'est la nuit. La ville a peur. Nous sommes à Vienne. Les filles sont superbes, dénudées et fragiles. Des proies pour le rasoir étincelant dans les mains gantées de noir de l'assassin qui rôde. Madame Wardh, qui eu d'étranges pulsions masochistes illustrées par de charmants flash-backs, se retrouve au centre d'une série de meurtres qui masquent en fait une sombre machination.

Sergio Martino est ce que l'on appelle un solide artisan. Il n'a pas les fulgurances d'un Castellari ou d'un Fulci, ni les élans d'un Corbucci ou d'un Sollima. Mais il aime ce qu'il fait et le fait avec goût. On lui doit entre autres Manaja, western tardif et boueux, Milano trema, la polizia vuole giustizia avec Luc Merenda en flic fasciste jusqu'à l'exubérance, et deux films d'aventures exotiques : L'isola degli uomini pesche (Le continent des hommes poissons – 1979) avec la belle Barbara Bach et La montagna del dio cannibale (La montagne du dieu cannibale – 1978) avec la belle Ursula Andress qui se livre à une séance mémorable de body art primitif.

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Pour ses premiers pas dans le genre, produit par son frère Luciano et avec l'aide du spécialiste Ernesto Gastaldi au scénario, Martino montre qu'il connaît sur le bout des doigts son Bava illustré et son Hitchcock sans peine. Ambiances. Il y a un joli meurtre sous la douche et un autre au gaz de ville dont le traitement froid, son et montage (c'est Eugenio Alabiso, monteur de Léone et de Corbucci), rappelle le fameux homicide de Torn curtain (Le rideau déchiré – 1966). Lo stano vizio della signora Wardh est un pur objet de plaisir, un peu pervers, un peu limite quand il s'attarde sur une bagarre entre filles dénudées, un peu fleur bleue le temps d'une promenade à moto entre le beau George et la merveilleuse Edwige. Mais il recèle quelques moments forts, très travaillés. Les retours en arrière lors des souvenirs de Mme Wardh jouent sur les ralentis, les distorsions sonores et une stylisation poussée des éclairages. Le tout renforcé par la partition aux accents étranges de Nora Orlandi avec chœurs suggestifs et orgue. Je dois d'ailleurs préciser que c'est cette musique qui m'a fasciné en premier lieu et m'a incité à découvrir ce film. L'étrangeté de ces scènes fonctionne à défaut qu'elles soient véritablement dérangeantes pour le spectateur actuel qui en a vu bien d'autres. L'attaque dans le parking est un joli moment de tension, jouant habilement sur l'espace sombre et confiné avec la seule lueur de la cage d'ascenseur. Et puis il y a le grand moment de la scène du parc. Martino prend son temps pour faire naître la peur de l'importance du champ qu'il dévoile. En plein jour, le personnage de Carol est réduit à un point dans le vert frémissant. L'angoisse est d'autant plus forte que l'espace est vaste. Un procédé que Dario Argento utilisera dans Suspiria (Le meurtre de l'aveugle sur la place, de nuit) et Ténèbres (le meurtre de l'éditeur sur la place, ensoleillée). Là encore, j'ai été séduit par la musicalité de la scène. Les feuillages bruissent, les graviers crissent, la respiration, le vent léger. L'élégante photographie de Floriano Trenker et Emilio Foriscot assure la réussite de ces ambiances, le rendu des couleurs pop dans les intérieurs branchés et la perfection des scènes nocturnes. Le reste n'est que littérature. L'intrigue progresse au rythme de rebondissements qui s'accélèrent à mesure que s'approche la fin forcément surprenante. Et si j'ai déjà oublié les explications finales, j'ai gravé en moi le regard d'Edwige et sa lèvre tremblante de peur et de plaisir.

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Le DVD

Sur Psychovision

Sergio Martino à la Cinémathèque

Sur Giallo shots (en anglais)

Sur DVDtimes (en anglais)

Sur Wicked-Vision (en allemand) 

Photographies : capture DVD NoShame

19/12/2007

Une étude en jaune (portfolio)

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 Photographies : capture DVD Severin Films
 
 

18/12/2007

Une étude en jaune (partie 1)

La série noire en Italie est jaune. « Giallo » est devenu le nom familier de ces romans de gare édités avec la couverture jaune pâle des éditions Mondadori puis, par extension, le qualificatif d'un sous genre cinématographique typiquement transalpin. Le giallo trouve son inspiration dans le succès du Psycho (1960) d'Alfred Hitchcock, dans le fantastique anglais mêlant enquête policière et agissement de psychopathe comme Peeping Tom (Le voyeur – 1960) de Michael Powell ou Circus of horrors (Le cirque des horreurs – 1960) de Sidney Hayers, et dans une série de films bien oubliés, tirés par les allemands des romans d'Edgar Wallace et souvent réalisés par Harald Reinl. Films noirs à l'ambiance fantastique, jolies filles dénudées autant que le permettent les mœurs du temps, tueurs impitoyables à l'imagination macabre sans limite, le genre trouve sa matrice avec deux films fondateurs de Mario Bava : la ragazza che sapeva troppo (La fille qui en savait trop – 1962) et surtout Sei donne per l'assassino (Six femmes pour l'assassin – 1964). Comme dans le western de l'époque, le giallo est avant tout un superbe terrain de jeu cinématographique. Il permet toutes les audaces de style : cadrages baroques, éclairages psychédéliques, effets type split screen et morceaux de bravoure exaltant l'art du suspense. Si ni le jeu des acteurs, ni la rigueur des scénarios ne sont le fort du giallo, le genre dessine pourtant en creux un portrait aujourd'hui fascinant de l'Italie d'alors, saisissant pour les meilleurs d'entre eux quelque chose de l'air de ce temps. Parmi les plus illustres illustrateurs, on trouve aux côtés de Mario Bava, Dario Argento qui repoussera le genre dans ses limites (A la façon de Sergio Léone pour le western), Antonio Margheriti, Lucio Fulci, Sergio Martino où encore Umberto Lenzi. Liste non exhaustive.

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Una sull'altra, réalisé en 1969 et sortit discrètement en France sous le titre subtil de Perversion story, est ma nouvelle plongée dans l'oeuvre de Lucio Fulci. Le film est surprenant, à la fois dans le genre et dans la filmographie de son auteur. Presque pas de meurtres, pas de rasoir, pas de gore ni de tueur ganté de noir. Una sull'altra est le récit d'une machination puisant sa source dans Vertigo de Hitchcock et Les diaboliques de Henri-Georges Clouzot. Il y a de pires références. Jerome Dumurrier, jeune, beau, médecin patron d'une riche clinique, perd sa femme Susan et, bien qu'il l'ait trompée avec la belle Jane, photographe à la mode, il est plus que troublé quand il rencontre Monica, une strip-teaseuse qui ressemble à la défunte de façon troublante. Que ce point de départ vous suffise. Lucio Fulci et ses scénaristes Roberto Gianviti et José Luis Martinez Molla ont travaillé en profondeur cette histoire, une année paraît-il. Elle devait initialement se dérouler en France, mais le retournement final les a amené à la déplacer à St Francisco. Vertigo toujours. Il reste la consonance française des patronymes et que cela n'empêche pas le scénario de receler quelques trous habituels au genre comme la mise à l'écart de Jane dans les vingt dernières minutes. Autre point plutôt faible, Jean Sorel, vu dans Belle de jour de Luis Bunuel, compose un Jérôme assez lisse, loin du Scottie de James Stewart. Mais finalement, son air un peu ahuri renforce le côté implacable de la machination. Plus intéressant est Alberto de Mendoza que j'avais déjà vu en déserteur chantonnant dans Quei dispérati che puzzano di sudore e di morte (Les quatre despéradosde Julio Busch) et en moine halluciné façon Raspoutine dans l'amusant Horror express (Terreur dans le Shanghai express) de Eugénio Martin. Il est ici impeccable dans le rôle de Henri, le frère. A noter la présence de John Ireland, acteur de Howard Hawks qui faisait alors une seconde carrière en Italie.

 

Mais Una sull'altra, comme son titre l'indique, ce sont les femmes. Elsa Martinelli, piquante chez Hawks dans Hatari ! aux côtés de John Wayne est superbe en photographe spécialisée dans l'érotique de luxe. Et que dire de Marisa Mell, la Eva du Diabolik de Mario Bava ? Sculpturale, mélange détonnant d'érotisme et de vulgarité, son strip-tease à moto et la scène de séduction avec Jane sont deux sommets du film magnifiés par la caméra inventive de Fulci que je vois filmer pour la première fois avec sensualité ses héroïnes. Motivé par la création de séquences torrides, il compose des scènes contrastées à l'aide la photographie violemment colorée d'Alejandro Ulloa et de la partition musicale obsédante de Riz Ortolani qui mêle des accents romantiques aux cordes et un jazz syncopé parfois strident. Ainsi, après une première scène tranquillement étrange entre Jérôme et sa femme, Fulci nous entraîne dans le lit où s'ébattent Jérôme et Jane, plaçant sa caméra sous le drap, mêlant au plus près notre regard aux corps noyés dans une lumière rouge-rosée. Effets de distorsion, cadrages, le passage est quasi expérimental. Et l'on peut multiplier les exemples. Si le strip-tease de Marisa Mell est en situation dans la boite de nuit, il n'en est pas moins inventif sur une musique jazzy langoureuse et, chose rare, plein d'humour. Il y a chez nombre de cinéastes italiens de l'époque une façon désarmante de filmer la vulgarité (façon qu'ils perdront par la suite pour filmer vulgairement). Fulci fait avec la séance de photographie et de séduction entre ses deux héroïnes un autre morceau de bravoure, pleinement intégré au scénario. Antonioni avec son Blow-up est enfoncé. Motivation et retournement final en plus. La caméra est là encore très proche des corps, caressant les visages, magnifiant le grain des peaux, la texture des yeux (Grande obsession fulcienne), le fin duvet féminin. Dieu qu'elles sont belles !

Effets de contraste encore, Fulci situe la fin de son film dans la prison de St Quentin (San Quentin, I hate every inch of you), pénétrant dans l'authentique chambre à gaz, détaillant avec son côté morbide parfois gênant les détails du mécanisme du meurtre d'état. Sagesse des cadrages ici, précision du découpage et couleurs froides du pénitencier. Une scène intense d'un autre genre où vont se dénouer les fils d'une intrigue tordue.

Sur le happy end un peu plaqué, reste comme en écho à la musique de Bernard Herrmann, les accents tourmentés de Riz Ortolani pour clore une perle originale, atypique du genre.

Sur coffee, coffee and more coffee (en anglais)

Sur Psychovision

Sur Cinédelica par Kimberly Lindbergs (de Cinebeats, en anglais aussi)

Sur Shocking images (en anglais toujours) 

La musique de Riz Ortolani (cd

07:05 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lucio fulci |  Facebook |  Imprimer | |

17/12/2007

Eloge de la paresse

« [À son chien] Bouge pas comme ça, tu me fatigues. Toujours dans mes jambes, toujours à me renifler, à pousser du museau, à faire le gai. Oui. Je bouge, tu dors couché en rond, je m'arrête pour attendre, te voila en arrêt à renifler le vent. Bouge pas comme ça, tu me fatigues, je te dis. Tu aussi, faut que tu remues, que tu cavales, mais qu'est-ce qu'ils ont tous ? On a le temps. Faut prendre son temps. Faut prendre le temps de prendre son temps. Comprends-tu ? Regarde-les, mais regarde-les donc : d'un bout du champ à l'autre, ils courent. Après quoi, je te le demande, hein ? Crevés comme moi, ils sont, le soir. Ils s'endorment fatigués et ils se réveillent plus fatigués encore. Et ça continue, et ça n'en finit pas de durer et d'être pareil. Pfff ! Y'a un moment, je sais pas, moi, mais je sais bien que c'est pas ça, quoi. Dis-donc, chien, pareil qu'on condamne des gars aux travaux forcés. Je connais ça, les travaux forcés, pourtant j'ai rien fait, moi. Bouge pas comme ça, tu me fatigues, puis tu me rappelles quelqu'un. Dis-donc, tu as déjà regardé une fleur de carotte ? Eh, tiens, bah regarde ça, ben tu vois, c'est ça la vie. Tiens, je m'en roule une, puis je vais me la faire moi-même, puis je vais prendre le temps de me la faire, puis je vais prendre le temps de me la fumer, puis je vais prendre le temps d'en profiter, et puis je vais prendre le temps... »


Alexandre le bienheureux

Yves Robert – 1967

(Source Wikipedia) 

06:45 Publié dans Panthéon | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Yves Robert |  Facebook |  Imprimer | |

13/12/2007

Emménagement et anniversaire

C'est fait. J'ai rompu avec 31 ans de vie niçoise pour m'installer à Cannes depuis dimanche dernier, le 2. Ca me fait un peu bizarre parce que j'ai toujours vécu au coeur de grandes villes (Paris avant Nice). Et puis Cannes, question cinéma, trimballe une sacrée symbolique. Le matin, quand je descend le boulevard Carnot pour prendre mon train, il y a, sur de grands panneaux, le sourire de Claudia Cardinale, Kristin Scott Thomas sur un abri-bus et Jean Gabin sur le mur de la gare.

J'ai souvent pesté contre ce festival, son inflation sécuritaire, ses tracasseries administratives et son côté paillettes horripilant. Mais je n'oublie pas les grands moments de cinéma que j'y ai vécu. Je n'oublie pas non plus que c'est dans une petite salle cannoise que j'ai découvert Vertigo d'Alfred Hitchcock qui ne sortait pas à Nice en 1984. Et je n'oublie pas que c'est à la MJC Picaud que je suis venu découvrir Hanna-Bi de Takeshi Kitano après trois mois de vaine attente. Alors voilà, me voici caneton. Je suis encore dans les travaux et je n'ai toujours pas de connexion Internet, mais j'ai maintenant le temps d'écrire dans le train vu la durée de mon trajet.

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Avec tout cela, j'ai encore oublié de fêter l'anniversaire d'Inisfree. Le 13 novembre dernier, cela a fait trois ans que je tiens ce blog. Et je m'amuse toujours autant, ça doit être bon signe.

Pour fêter ça, je vous emmène faire un tour en coulisses. Je pense que, comme la majorité de mes camarades bloggeurs, je suis curieux de savoir qui me lit et qui me lie. Or il y a plein d'outils pour cela, c'est formidable le web 2.0 ! J'ai ainsi appris que j'étais classé sur Wikio et repris dans des agrégateurs (connaissiez vous Matoumba ?) sans que je n'ai rien demandé. Auparavant, je m'étais inscrit volontairement sur Technorati où mon récent classement m'a étonné jusqu'à ce que je comprenne que Haut et Fort, avec sa fonctionnalité « derniers blogs mis à jour » crée plus de liens que je n'ai de lecteurs, même de hasard. Moi qui n'aime ni les classements ni la compétition, je suis à la fois irrité de ces listes tout en reconnaissant que cela flatte mon amour-propre (dans le sens du poil comme dirait le bon Dr Orlof). Mais je garde la tête froide et les pieds au chaud. Je sais que j'ai une bonne vingtaine de lecteurs réguliers et cela suffit à mon bonheur. Qu'ils en soient ici remerciés.

Plus intéressant sont Technorati et Del.icio.us qui permettent la recherche de centres d'intérêt commun et je leur dois de belles découvertes, en particulier dans les blogs étrangers.

Encore plus intéressant (où s'arrêtera-t'il ?) comment vient-on sur Inisfree ? Le plus souvent par recherche d'images et un bon quart par lien direct. Ensuite viennent les liens depuis d'autres blogs : Le Dr Orlof, Flickhead, Cinématique, Contrechamp, Alan Smithee, tepepa, Nightswiming, le sot de l'ange, le forum John Wayne et quelques autres qui ont ici toute ma gratitude. Au niveau des sujets de recherche, je suis ravi de constater que mes actrices fétiches ont la cote : Deneuve, Dickinson, Monroe, Audran, Balibar, Hepburn, Bonnaire et même Joanna Pettet et Rhonda Fleming. Et puis, cela fera plaisir à Marie-Thé, on cherche beaucoup Giuliano Gemma sur Inisfree. Désolation, John Ford est très mal placé, seul Hitchcock est demandé (et avec quelle constance !). On verra ce que cela donne pour Luc Moullet. Sinon, le cul, ça marche toujours. Deux ans après ma participation à l'enquête de Pierrot, j'ai toujours des requêtes sur le «classement des films érotiques », plus quelques demandes sur « Deneuve nue » ou « Sophie Quinton nue ». Vous pouvez vous accrocher, bande de gorets. Si j'en avais, je les garderais pour moi. Reste les requêtes exotiques comme « jambes en croix», « Birdie num-num » et, la palme : « télécharger films le batard de klaus kinski ». Je ne connais même pas ce film et c'est peut être dommage.

Sur ces considérations passionnantes, je vous laisse à regret avec cette question irrésolue : « Est-ce qu'il écrit à la plume ou au pinceau ? ».

Photographie Catherine Deneuve par Jean-Loup Stieff (1969), source Nikohk

08:40 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Blog, statistiques |  Facebook |  Imprimer | |

11/12/2007

Le travail rend libre (et ta soeur)

Inisfree a bien plus vocation à commenter les éventuels mérites de Georges Hilton ou de Marisa Mell que l’actualité. La cinématographique comme les autres. Pourtant ma journée est plombée par ce sondage qui m’affirme et me confirme que je suis entouré d’une très large majorité de compatriotes prêts à travailler plus. Prêts à sacrifier leur temps libre pour gagner plus de quoi se rendre dans les magasins désormais ouverts le dimanche pour se payer les gadgets technologiques à la mode leur permettant de voir des films idiots et d’écouter de la musique immonde. Et je veux citer personne. Pourtant, mes amis, mes frères, bande d’emplâtres, le temps n’a pas de prix (croyais-je naïvement). Ainsi, aux « salisseurs de mémoire », je me permets de rappeler, comme je le fis voici quelques mois, les sages paroles des grands maîtres : 

La liberté, c'est toute l'existence,
Mais les humains ont créé les prisons,
Les règlements, les lois, les convenances
Et les travaux, les bureaux, les maisons.
Ai-je raison?
Alors disons:
Mon vieux copain, la vie est belle,
Quand on connaît la liberté,
N'attendons plus, partons vers elle,
L'air pur est bon pour la santé.
Partout, si l'on en croit l'histoire,

Partout on peut rire et chanter,
Partout on peut aimer et boire,
A nous, à nous la liberté!

A nous la liberté (René Clair - 1931)

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Chacun de nous a sa place et notre terre est bien assez riche, elle peut nourrir tous les êtres humains. Nous pouvons tous avoir une vie belle et libre mais nous l’avons oublié.

L’envie a empoisonné l’esprit des hommes, a barricadé le monde avec la haine, nous a fait sombrer dans la misère et les effusions de sang. Nous avons développé la vitesse pour nous enfermer en nous-mêmes. Les machines qui nous apportent l’abondance nous laissent dans l’insatisfaction. Notre savoir nous a fait devenir cyniques. Nous sommes inhumains à force d’intelligence, nous ne ressentons pas assez et nous pensons beaucoup trop. Nous sommes trop mécanisés et nous manquons d’humanité.

Nous sommes trop cultivés et nous manquons de tendresse et de gentillesse. Sans ces qualités humaines, la vie n’est plus que violence et tout est perdu.

 

The great dictator (Le dictateur - Charlie Chaplin – 1940)

 

Photographie : Wikipedia 

08/12/2007

Luc Moullet, sur la toile

Pour partir en exploration, une liste non exhaustive.

A tout seigneur... Luc Moullet par le Dr Orlof :

  • Anatomie d'un rapport (lire)
  • Brigitte et Brigitte (lire)
  • Les contrebandières (lire)
  • Genèse d'un repas (lire)
  • Le prestige de la mort (lire)
  • Une aventure de Billy le Kid (lire)

La rétrospective que lui a consacrée le festival Côté Court en 2001.

La fiche de Luc Moullet avec biographie et filmographie sur le site de la BiFi.

La fiche Wikipedia de Luc Moullet (l'anglaise est plus complète que la française !)

« Luc Moullet le franc-filmeur » un article de l'Humanité par Jean Roy.

Un entretien avec Luc Moullet sur Libération à l'occasion de la sortie de Le Prestige de la mort.

A propos des Naufragés de la D17 par Claude-Marie Trémois, un article publié par la revue Esprit (2002) sur Cinéchroniques.

« Luc Moullet, cinéaste unique à découvrir absolument », chronique du coffret par Jean-Jacques Birgé.

Sélection Luc Moullet, livres et films sur La Boutique

07/12/2007

Luc Moullet, cinéaste court

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Essai d'ouverture, c'est un dingodossier ou si vous préférez, une rubrique à brac. Aussi ai-je pensé demander l'avis d'un expert, le Docteur Burp, désagrégé en science et cinématographe, pour vous présenter l'excellente comédie courte de Luc Moullet. Merci docteur.

Dr Burp : Il vous en prie.

Inisfree : Docteur, de quoi parle ce film ?

Dr Burp : Comment voulez vous que je le sache, je ne l'ai pas vu.

Inisfree : Et son auteur, Luc Moullet ?

Dr Burp : C'est un barbu. Et vous savez ce que l'on dit : « Malheur aux barbus ! ».

Inisfree : Mais encore ?

Dr Burp : Qui n'a jamais connu la bouteille de Coca ® standard de 1 l en verre avec son bouchon de métal mou aux ailettes tranchantes ne peut comprendre l'importance de ce film. Qui n'a jamais subit la frustration du pas de vis qui patine et bloque l'admirable mécanisme d'ouverture au moment de la soif la plus intense ne peut saisir l'enjeu dramatique majeur de ce film. Qui n'a jamais cherché fébrilement la pince multiprise libératrice sans la trouver ne peut appréhender le cri de rage que pousse ce film sous un humour glacé et sophistiqué (que nous apprécions tous ici).

Inisfree : Et la forme ?

Dr Burp: Le plan ! Le plan est tout. Pas de champ – contrechamp mais un champ d'expérience. Des machines improbables, le réel détourné, des dispositifs surréalistes et un suspense insoutenable : ouvrira ? Ouvrira pas ?

Inisfree : Est ce un film poétique ?

Dr Burp: Ne soyez pas grossier.

Inisfree : Est-ce un film politique ?

Dr Burp : C'est le récit d'un mécanisme aliénant vaincu par l'esprit humain mais nourrissant pourtant ce même mécanisme de soumission à travers cette victoire même. La portée politique de cette oeuvre serait évidente pour un enfant de quatre ans. Alors trouvez un enfant de quatre ans parce que moi, je m'y perds.

Inisfree : Pouvez vous, en, guise de conclusion, nous situer ce film court dans la carrière de son auteur ?

Dr Burp : Essai d'ouverture est un film un petit peu à l'ouest, à l'est de Canton. Ah ! Mais ça me donne soif vos histoires, je prendrais bien un Coca ®. Ah non, pas en canette, pas en canette !

Le film sur Dailymotion

Dédié à Gotlib, Goscinny et Groucho Marx

06/12/2007

Luc Moullet, commentateur

Chez Luc Moullet, le critique et le cinéphile dont indissociables de l'oeuvre du réalisateur. Je vous propose de découvrir, sur le site des éditions Montparnasse, un extrait du film de Howard Hawks, Bringing up baby(L'impossible monsieur bébé – 1938) commenté par Moullet soi-même, ce qui permettra pour ceux qui ne le connaissent pas, de découvrir sa voix caractéristique. Il s'agit du passage où le personnage de Cary Grant s'agite habillé d'une robe de chambre de Katharine Hepburn et lance l'immortelle réplique : « Because I went GAY all of a sudden!  ». (Lien)

Et je profite de l'occasion pour répercuter l'information donnée par Breccio, l'homme des heureuses coïncidences, en commentaire de la note précédente : Luc Moullet a également commenté le film de Cécil B.DeMille Male and female (L'admirable Crichton – 1919) paru chez Bach Films (Lien).

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Photographie Cinémathèque de Belgique

05/12/2007

Luc Moullet, théoricien

Autant l'avouer d'emblée, je connais très mal le cinéma de Luc Moullet. Je n'ai vu que son petit bijou de court-métrage, Essais d'ouverture, tourné en 1989 et dont l 'humour glacé et sophistiqué me ravi. Ce handicap même renforce ma détermination à participer à la croisade du bon Dr Orlof : oui, nous voulons voir les films de Luc Moullet en salle. Oui, nous voulons répandre son nom et son oeuvre sur la terre de France, vers l'infini et au-delà. Oui, nous voulons qu'il prenne place en première partie de soirée sur les chaînes de télévision publiques. Oui, nous voulons que le bruit médiatique de « Luc+Moullet » dépasse celui des Luc non Moullet voire des Moullet non Luc. Aussi, répondant à l'appel du Dr Orlof, je joins mes forces à cette noble entreprise « Et sans trêve ni repos, j'irais cherchant l'Eldorado ».

 

Il faut dire que l'homme force la sympathie et que je lui dois beaucoup. Parmi les cinq ou six livres sur le cinéma que j'ouvre, lis et relis fréquemment, il y a celui qu'il écrivit en 1993 : Politique des acteurs (éditions des Cahiers du Cinéma). A l'époque, quand je l'ai acheté, je ne savais pas qui était Luc Moullet. Il paraît que c'était alors son retour à la critique. Mais je m'en fichais bien, le livre proposait une analyse du travail de quatre de mes acteurs fétiches : Cary Grant, James Stewart, Gary Cooper et, surtout, John Wayne. Or pour une large majorité de cinéphiles de la fin des années 60 au milieu des années 90, l'acteur de cinéma dans toute sa splendeur c'est plutôt Robert De Niro, Dustin Hoffman ou Gérard Depardieu. L'acteur classique, hollywoodien de surcroît, n'est guère estimé. Au mieux, il a droit à un statut d'icône façon Bogart. Je caricature à peine. Sur la bande des quatre, Stewart est sans doute le mieux loti de part ses prestations torturées chez Mann et Hitchcock. Et puis il a fait du théâtre comme Henry Fonda et c'est bien vu. Mais les autres, ceux dont le jeu si cinématographique ne se voit pas, sont aimés sans être bien étudiés, ni compris.

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Moullet est plus perspicace. Armé d'un magnétoscope, d'un oeil neuf affûté et d'un esprit vif, il décortique l'essence du jeu de ses sujets d'expérimentation, quatre univers passant surtout par l'expression corporelle, et y rattache des thématiques déclinées d'un réalisateur à l'autre. Il dessine ainsi quatre oeuvres cohérentes et belles. Intuition géniale !

C'est Cary Grant et son travail sur les lignes de son corps, cassé, tendu, courbé, figé dans le mouvement, élans interrompus et toujours repris, comparables en cela à ceux d'un Buster Keaton. C'est le visage minéral (comme l'a écrit JLG) de Gary Cooper, bloc héroïque autour duquel tendent tous les autres éléments du film. Travail d'épure du geste et de l'expression. Art sublime du sentiment donné par un sourcil relevé. C'est James Stewart et ses jeux de mains magnifiques dont la richesse nous est révélée. Ses nombreuses trouvailles en matière de diction : cris, bredouillement, paroles cassées par la colère, l'enrouement, la nourriture (il serait le premier à avoir dit son texte en mangeant dans un film). C'est enfin, et surtout pour moi, une étude renversante sur le jeu de John Wayne. « Je ne savais pas que ce fils de pute pouvait jouer » avait dit John Ford en voyant Red River de Howard Hawks en 1946. Wayne avait quand même cinquante balais. Un jeu qui apparaît aujourd'hui comme étonnamment moderne par son économie et sa finesse. Et ce bassin de JW ! Cette façon de bouger comme un danseur ou comme un grand chat. Moullet décrit ici en des passages exaltants une oeuvre inédite autour de la décrépitude construite à trois : Ford, Hawks et Wayne. Les deux premiers à partir de Red River se renvoyant le troisième à travers autant de variations sur la vieillesse et le temps.

Qu'est-ce qu'un grand critique de cinéma sinon quelqu'un qui vous propose des clefs pour une oeuvre et, mieux, vous suggère une nouvelle façon de la voir ? C'est le travail de Truffaut sur Hitchcock, de Ciment sur Kubrick. A cette aune, Luc Moullet est un grand critique. Je ne vois plus un film avec James Stewart de la même façon depuis son livre. Je rive mon regard sur le bas de l'écran et suit le ballet de ses mains expressives et peste contre les sous titres qui me gênent parfois. Rasséréné désormais dans mon amour immodéré pour le « Duke », je suis devenu plus sensible à la dimension de comédie délicatement amère chez Ford et Hawks. Je me régale de la musicalité de scènes que j'avais déjà vues dix fois. Je trouve des motifs d'enthousiasme dans des films mineurs auxquels le jeu de Wayne donne des connivences secrètes avec les films des grands maîtres.

Luc Moullet, avec sa politique des acteurs, a rafraîchît mon regard et je l'espère, l'a élargit. Pour cela qui n'est pas rien, merci monsieur Moullet.

 

Le livre

27/11/2007

Chers lecteurs

Bien que cela m'en coûte, je vais devoir mettre ce blog en pause une dizaine de jours. Je suis en plein déménagement et mon fournisseur d'accès Internet n'a pas été fichu de me faire une transition en douceur. Je n'ai donc plus de connexion mais je me console en me disant que je n'ai de toutes façons pas vraiment le temps de voir grand chose. En attendant, je vous recommande les articles du Dr Orlof sur Luc Moullet (en attendant ma participation à cette grande et noble cause), le superbe texte d'Hyppogriffe auquel j'aurais volontiers répondu (mais ce sera pour un peu plus tard), et un très beau blog consacré au film noir : Noir of the week. A bientôt.
 
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20/11/2007

John Ford au Mercury

Ce n'est pas sans un mélange de fierté et d'angoisse que je me prépare à présenter, ce vendredi 23 novembre 2007 20h30, au cinéma Mercury, à Nice, le reprise du film de John Ford, Sergeant Rutledge (Le sergent noir) dont je vous avait parlé ICI. John Ford en salle, c'est toujours le bonheur. La soirée est co-organisée par l'association dont je suis président, Regard Indépendant, et Cinéma Sans Frontières qui anime le ciné-club de cette salle. Si vous passez par là...
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19/11/2007

Variations sur Rashomon

Un petit suplément pour le Kurosawa blog-a-thon. J'ai eu un peu de mal à retrouver le titre de ce court métrage expérimental de Nicolas Provost que j'avais découvert il y a quelques années à Clermont-Ferrand : Papillon d'amour.
 
 
 
Le site de Nicolas Provost

16/11/2007

Pas encore !

Cet article fait partie du Kurosawa blog-a-thon et inaugure une nouvelle rubrique que j’appelle « fascination » qui sera consacrée à des films qui exercent sur moi une forte attraction sans que je me l’explique toujours bien.

 

Le dernier plan du dernier film d’un grand réalisateur prend parfois une intensité particulière. On se souvient du « So long, you bastard » proféré par le personnage joué par Ann Bancroft dans Seven women (Frontière chinoise) ultime film de John Ford ; de ce plan de John Wayne, vieux mais toujours massif, s’éloignant de dos au bras d’une jeune femme balafrée pour refermer le Rio Lobo de Howard Hawks ; de la neige du plan final de The dead (Les gens de Dublin) de John Huston. Le souffle est suspendu quand on pressent que le réalisateur, à ce moment précis, était pleinement conscient de tourner sans doute pour la dernière fois. Et j’aime à penser qu’il nous laisse à ce moment un petit quelque chose d’essentiel. L’un des plus beaux derniers plans que je connaisse est celui du Madadayo d’Akira Kurosawa.

La carrière d’Akira Kurosawa connaît une brutale embardée dans la seconde moitié des années 60. Il se fâche et rompt avec son acteur fétiche, Toshiro Mifune à l’issue du tournage de Barberousse en 1965 puis il échoue sur le projet américano-japonais qui donnera Tora ! Tora ! Tora ! en 1970, un film racontant la bataille de Pearl Harbour vu des deux côtés. Enfin, à la recherche de l'indépendance, il s'associe avec Kon Ichikawa, Keisuke Kinoshita et Masaki Kobayashi pour créer une société de production. Le premier film produit en 1970 est son ambitieux projet sur les quartiers pauvres de Tokyo, Dodeskaden, qui est aussi son premier film en couleurs. Le film a beau être une merveille, il est rejeté par la critique comme par le public. Kurosawa en sera si déprimé qu'il fera une tentative de suicide et mettra des années à remonter la pente.
 

Je vois les vingt années qui vont suivre comme une longue marche pour retrouver confiance en lui, dans un premier temps, puis pour reconquérir la position qui lui avait valu le surnom de « L'empereur ». Ce sera Dersou Ouzala en 1975, film de la renaissance tourné grâce à une production soviétique, puis Kagemusha en 1979 et Ran en 1985 qui se font grâce à ses admirateurs occidentaux (Coppola, Lucas, Silberman). Ces deux films sont passionnants à voir sous l'éclairage de la vie de leur auteur. Mais malgré leurs qualités, ils forcent le respect au sens littéral et je n'y retrouve pas la puissance ni le souffle qui traversent les oeuvres phares de la grande époque. Les trois films suivants donnent l'impression que Kurosawa n'a désormais plus rien à prouver et peut se laisser aller à des choses plus détendues et plus personnelles. Ce faisant il retrouve la grâce et Madadayo en est le point d'orgue.
 

Madadayo, c’est un peu l’illustration de la maxime de Brassens « Gloire à qui n’ayant pas d’idéal sacro-saint se borne à ne pas trop emmerder ses voisins. » A travers le portait de ce professeur d’allemand, monsieur Uchida joué par Tatsuo Matsumura, Kurosawa fait passer tout en douceur sa philosophie de la vie. Deux ou trois choses qui lui semblent importantes à 83 ans. Le conte est délicieux. Le professeur Uchida prend sa retraite et ses étudiants qui lui sont très attachés organisent chaque année une soirée en son honneur. Un rituel s'installe. Après de nombreuses libations et chants, les étudiants lui demandent à l'issue d'un discours : « Maada kai? » (êtes vous prêt ?), à quoi le professeur répond invariablement « Madadayo !» ( Pas encore !). Pas encore prêt à mourir, pas encore prêt à quitter une vie dont il essaye en véritable épicurien de savourer tous les aspects. Ce qui n'est pas toujours facile. Uchida traverse l'histoire récente du japon ainsi que celle de son créateur. Il prend ainsi sa retraite en 1943 alors que la guerre fait rage, date à laquelle Kurosawa réalise son premier film. Et Madadayo est ainsi nourri de nombreuses références. Il est à la fois un autoportrait, la description d'un idéal et un bilan sur ce que Kurosawa, l'homme et le réalisateur a pu réaliser de cet idéal. Il est aussi un condensé de ce que son auteur aime faire : tournage en studio, photographie chaude qui rappelle parfois les expériences de Dodes'kaden, ruptures de ton, jeu sur le temps, art du cadrage.

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Structuré autour des fêtes, le film est composé de scènes souvent drôles comme la façon dont le professeur reçoit les cambrioleurs ou son installation juste après la guerre dans une maison qui n'est qu'une toute petite cabane. Il y a également l'incroyable histoire autour de la disparition de son chat que seuls ceux qui n'ont jamais perdu leur félin favori ne peuvent comprendre. Kurosawa se permet ici une très longue scène pour de nous parler du sentiment perte, non sans humour mais aussi avec une véritable émotion. Dans ces moments, je me souviens de l'admiration de Kurosawa pour John Ford et je retrouve chez le japonais ces moments que l'américain aimait à faire durer pour le pur plaisir du cinéma. Cette faculté qu'ils partageaient de faire passer des sentiments universels et forts dans des actes familiers. Les séquences des fêtes sont elles des morceaux de bravoure chorégraphiés avec précision qui rappellent que Kurosawa est un grand metteur en scène de groupes. J'y avais retrouvé aussi cette atmosphère particulière des films d'Ozu quand il montre les hommes se retrouvant entre eux pour boire et causer. Mais le sentiment de tristesse qui domine chez Ozu n'est pas de mise ici. Le plus détonnant dans ce film, c'est l'optimisme que Kurosawa a décidé d'afficher.
 

Madadayo est film tout en humanité et en finesse. Les rapports entre Uchida et sa femme par exemple passent par quelques gestes, quelques regards et une présence mutuelle qui savent traduire la profonde complicité entre eux. Uchida, en bon professeur, essaye de transmettre son savoir à ses élèves et après l'allemand, il leur parle de ce qui lui semble essentiel. Mais toujours la leçon s'accompagne de l'humour et de l'exemple. Il y a chez Uchida du Ponocrates comme du Falstaff, il porte un message, une méthode mais sait rester à hauteur d'homme avec ses ridicules, ses faiblesses, ses chagrins et ses débordements joyeux.
 

Je parlais en introduction de fascination. Ce film me fascine par sa simplicité apparente, par sa profondeur tranquille et par sa complète liberté. Liberté de ton et liberté dans la forme. Il fait naître en moi ce sentiment fort que j'aime entre tous, l'envie de faire partie du groupe humain sur l'écran. Je sais aussi que le sentiment de grâce que je ressens à sa vision est ténu, fragile et peu partagé, ce qui me le rend plus précieux. Lorsque le film se termine, à l'issue d'une nouvelle soirée bien arrosée, le professeur Uchida s'est endormi. « Il doit faire des rêves en or » dit l'un de ses fidèles étudiants. Et Kurosawa, pour ses dernières images nous entraîne dans ce rêve. Uchida se revoit enfant, il joue à cache-cache. « Maada kai? » lui crient ses camarades. Et dans un champ de blé, Kurosawa filme admirablement les champs, à l'abri d'une meule, un petit garçon crie « Madadayo !». Puis face au soleil qui se couche, il se dresse dans la lumière dorée. Et il admire. Si vous ne ressortez pas de là réconcilié avec le monde et la vie...

Le DVD

Le film vu par Mathieu Perrin

Le film sur Shangols

Une fichedu film avec un entretien de Kurosawa

Affiche d'Akira Kurosawa

13/11/2007

Baldi addio

Ferdinando Baldi vient de disparaître. Nous lui devons Texas addio avec Franco Nero, Preparati la bara ! avec Terence Hill sérieux, Blindman, le délirant pistoléro aveugle avec Tony Anthony et Ringo Starr qu'un éditeur DVD serait bien avisé de sortir chez nous, l'ultime western italien en relief, Comin' at ya, toujours avec Anthony et Victoria Abril, et puis Il pistolero dell'Ave Maria dont Breccio dit tant de bien. Entre autres... et puis ceci :

 

 

12/11/2007

Faisons un rêve

Suite des listes improbables et futiles lancées par Pierrot avec quelques films dont je rêve. Dans la majorité des réponses, il a été question d'adaptations d'écrits, romans et pièces. Afin de faire mon intéressant, je vais privilégier des idées de film ne reposant pas, à priori sur de l'existant.

 

Je rêve d'un film sur la Commune, un peu dans l'esprit du film de Peter Watkins (ce qui tombe bien parce que ça ressort) mais avec de gros moyens genre Alamo version John Wayne. Quelque chose qui brasse les histoires individuelles et l'Histoire, comme dans les bandes dessinées de Tardi. Quelque chose d'épique et de déchirant avec Jeanne Balibar en Louise Michel, vareuse noire, poudre sur les mains et regard de feu. Qui pour faire ça ? Philippe Lioret survitaminé.

Je rêve que Steven Spielberg se décide à faire enfin un western. Un vrai, pas un de ces films avec cheveux longs et gras, cache-poussière « à la manière de » et gros flingues. Non, un film avec de grands espaces, des jeunes femmes en robes de coton frémissantes au vent sous les porches. Et puis des indiens et de la porcelaine bleue.

Je me suis toujours posé la question de savoir pourquoi les américain avec leurs deux cent ans d'histoire bien tassés ont nourri un cinéma si riche alors que notre bonne vieille France est infoutue de faire quelque choses de vingt siècles d'images mythiques. Par exemple Bonaparte au pont d'Arcole, illustré ci-dessous par Vernet. Ne me dites pas que ça ne vaut pas un plan de Walsh ou de Vidor. Alors pourquoi n'y a t'il, sauf erreur de ma part, aucun film sur la campagne d'Italie ? Gance s'est arrêté avant. Quelle histoire pourtant, quels personnages. De l'action, de la politique, de l'ambition, le rêve révolutionnaire et la trahison de l'idéal, du sexe puisqu'il paraît que l'amour entre Bonaparte et Joséphine était flamboyant, une époque de fièvre. Et ça ne ferait pas un film bandant ?

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Je rêve qu'Enzo G. Castellari retrouve Franco Nero pour l'histoire d'un pistoléro vieillissant mais à l'oeil encore sûr. Il retrouverait ses anciens compagnons dont Giuliano Gemma et Gianni Garko pour une ultime chevauchée. Pas de fantaisie dans le scénario : une histoire carrée avec retour, vengeance, vieille histoire familiale. Et du style, beaucoup de style.

Je rêve d'un nouveau film de Quentin Tarantino sur un tueur à gage italien trotskiste joué par Nanni Moretti. En vespa, le tueur, avec quelque chose de Suzuki dans l'esprit du film. Il faudrait aussi une héroïne belle et mystérieuse, assez classe dans le genre Téa Léoni ou Maggie Cheung.

Je rêve d'un film de Wong Kar-wai qui serait un film sur l'histoire d'un tournage. Si possible un tournage de film d'aventures dans lequel il montrerait toutes les ficelles du genre, lui qui en a bavé sur Les cendres du temps. J'imagine une histoire d'amour avec des dialogues entre elle et lui suspendus à des câbles au dessus du plateau. Ce pourrait être beau et très drôle.

J'aimerais bien que Terry Gilliam puisse enfin reprendre son Don Quichotte et le finir.

Je rêve aussi d'une comédie musicale et politique sur une musique de Noir Désir et qui ne s'agenouillerait pas devant les reliques de Demy. Quelque chose comme Dieu seul me voit en rock.

Deux adaptations, quand même, pour boucler, une des bandes dessinées de Joe Matt et La femme renard d'Abraham Merritt. Avec le bon metteur en scène, ça pourrait donner le Cat people moderne.

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01/11/2007

La bande des dix

Lancée au détour d'une discussion chez Pierrot, l'idée d'une liste des plus mauvais réalisateurs fait son chemin, associée à l'idée encore bien plus originale d'une liste des films rêvés. Première partie.

Il faut d'abord s'entendre sur ce que l'on appelle un mauvais réalisateur. Il faut se méfier d'être tenté d'y mettre ceux que l'on aime pas, voire que l'on déteste. Ils peuvent être, objectivement, doués et c'est parfois même la raison pour laquelle on les déteste. Le champion incontesté de cette catégorie en ce qui me concerne, c'est Michael Haneke, preneur d'otage en salle et donneur de leçons sadique, médecin légiste sur pellicule et, si l'humour est la politesse du désespoir, malpoli.

Il y a ceux qui sont simplement mauvais. L'histoire retient rarement leur nom, sauf dans le cas où ils sont mauvais « jusqu'à l'exhubérance ». Ce sont Ed Wood et Max Pécas, Démofilo Fidani et Philippe Clair, H.G.Lewis et Bruno Mattei. Ils sont l'aristocratie des mauvais, les maîtres étalons du ratage. Et puis il y a la horde des sans goût, sans odeur, sans saveur. Ceux là, en fait, on ne va même pas les voir. Je ne sais pas qui ils sont. Comme prévenait Pierrot, ce n'est pas si facile de lister les plus mauvais.

Andrew McLaglen est un candidat sérieux. Fils de son père Victor, il a été formé par John Ford qu'il assistait. Il lui a pompé ses acteurs, ses techniciens, et ses thèmes pour en faire pas grand chose. On pourrait trouver sympathique sa volonté de faire vivre la geste fordienne après le retrait plus ou moins forcé du maître, mais ça ne fonctionne pas. McLaglen manque de légèreté, de poésie, d'invention, de personnalité. Trop respectueux peut être de son héritage, sans recul au sein d'une époque d'interrogations, trop écrasé par ses vedettes qu'il ne pouvait certes pas mener comme Ford le faisait, à la baguette, McLaglen est pesant. Et pourtant transparent. Même ses films les plus intéressants, McLintock ! en 1963, Chisum en 1970, semblent ne rien lui devoir.

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Roland Emmerich, c'est le réalisateur d'Independance day. Tout est dit ? Non, cet allemand fasciné par le cinéma américain en général et par celui de Steven Spielberg en particulier a réussi à devenir plus ricain que les ricains tout en maintenant ses mises en scènes à des niveaux de médiocrité remarquables. Après la parabole belliciste avec soucoupes volantes, il vire de bord et décrit non sans efficacité les effets du dérèglement climatique dans The day after (Le jour d'après). Y a-t'il un espoir pour Roland ?

Luc Besson est non seulement un réalisateur médiocre, mais un producteur de mauvais goût. Et comme il a un énorme succès, il fait ce qu'il veut. Il est donc largement responsable du niveau lamentable du cinéma français grand public, nous faisant regretter Lautner, Oury et Hunebelle. Son premier film, Le dernier combat, en 1983, pouvait séduire : science fiction en noir et blanc et sans dialogues. Pourtant, il aurait fallu se méfier d'un homme ayant commencé comme assistant sur Les bidasses aux grandes manoeuvres de Raphael Delpart. Dès Subway en 1985, Besson montre qu'il préfère la pose au cadrage, l'effet à la mise en scène, le bon mot au dialogue, bref, la poudre aux yeux rapidement dopée par les moyens et les effets spéciaux. Le grand bleu a beau devenir « le film d'une génération » (pas moi, pas moi !) ce n'est jamais qu'une version surgonflée d'un épisode de Flipper le dauphin. Nikita est un collier de clichés et d'invraisemblances (Ah! Le fusil dans l'armoire à pharmacie) dignes d'un film d'étudiant et après, moi, j'ai décroché. Ce que j'ai pu voir de ce qui a suivi n'a rien fait pour modifier mon opinion. Je passe sous silence ses productions bâclées qui démolissent l'un après l'autre les héros de mon enfance pour sauver le film de Rappeneau, Bon voyage, à l'échec injuste. Je crains que l'on ait pas fini des taxis à répétition.

Michael Bay, je ne pouvais pas le rater. Ce brave (?) garçon a réussi à captiver les foules en ne sachant rien à rien de ce qui fait l'art cinématographique. Michael Bay aurait sans doute pu faire un bon plombier ou un bon trader, mais comme cinéaste, il n'a même pas compris les règles les plus élémentaires. Michael Bay est l'homme qui a filmé Pearl Harbour depuis le point de vue d'une bombe japonaise. C'est pour moi le symbole d'une cinéma bouffé aux mites par l'influence de la publicité, du clip, de l'image pour l'image, bref de ce qui se fait de plus désolant aujoud'hui. Et qu'il ait du succès est une circonstance aggravante parce que l'on risque, un jour, de se dire que c'est cela, le cinéma. Incapable de mettre deux images en correspondance, Bay compense par des montages hystériques d'où les plans de plus de deux secondes sont bannis. Ne pas confondre vitesse et précipitation, Michael.

Claude Pinoteau, c'est un monsieur qualité France typique des années 70 et 80.La gifle, La septième cible, Le grand escogriffe, c'est du cinéma pour soirée dominicale de TF1. Pinoteau, c'est surtout l'homme qui a révélé Sophie Marceau dans La boum et ses deux suites. Entre ici, Claude, tu es en bonne compagnie.

Ralph Nelson est un réalisateur américain surfait des années 60 et 70 ayant bâtit sa réputation sur ses prises de positions « progressistes » et provocantes. Les noirs, les indiens, les femmes, tout ça. Violence racoleuse, érotisme racoleur, zooms à l'italienne et scénarios lourdement démonstratifs, le cinéma de Nelson est caractérisé par la crédibilité de ses situations. On y croise Sidney Poitier en joueur tiré à quatre épingles au milieu d'une guerre indienne, Candice Bergen bronzée et bien maquillée au milieu d'un massacre d'indiens, Charlton Heston en chef d'orchestre obligé de jouer pour les nazis et Robert Mitchum en curé mitrailleur. Tout cela ne serait pas bien grave si Nelson ne se prenait pas très au sérieux et ne nous faisait un brin de leçon au passage.

Umberto Lenzi aurait pu rester dans la catégorie des « exubérants » s'il n'était prisé pour quelques polars effectivement intéressants dans années 70. Mais il est typique des mauvais réalisateurs populaires en ce qu'il se contente de reproduire des recettes éprouvées non sans cynisme mais sans talent. Una pistola per cento bare (Pistolets pour un massacre - 1968) est un western longuet qui copie Léone à la ligne. Attentato ai tre grandi (Les Chiens verts du désert-  1967) est le pire film de guerre jamais réalisé ou peut s'en faut. Incubo sulla città contaminata (L'avion de l'apocalypse – 1980) est un film de gens qui mangent les gens à pleurer, éventuellement de rire. Cannibal Ferox en 1981 et une copie conforme et putassière du Cannibal Holocaust de Déodato. Ironmaster l'année suivante est une pantalonnade en costumes préhistoriques. Bref, rien à sauver, ni surtout le plaisir de voir l'inventivité de réalisateurs mineurs qui croyaient en ce qu'ils faisaient.

Guy Hamilton, c'est le prototype du réalisateur mercenaire anglais. Sans relief, il est capable de films corrects comme Battle of Brittain (La Bataille d'Angleterre – 1966) ou Goldfinger, un des James Bond les plus appréciés. Mais enfin, tout cela ne brille guère par son originalité. Et puis Hamilton a réussi l'exploit de faire le plus mauvais Bond avec Sean Connery, Diamonds Are Forever en 1971 ET le plus mauvais Bond avec Roger Moore, Live And Let Die (Vivre et laisser mourir – 1973) ce qui mérite considération. On lui doit également une suite ratée et lourdingue des Canons de Navarrone en 1978.

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Alan Parker dit l'homme aux semelles de plomb. Britannique, son cinéma n'a qu'un lointain rapport avec ceux de David Lean ou de Michael Powell. Midnight Express, Fame, Mississipi Burning, Angel Heart et son énigme à quatre sous (ou à deux balles comme vous voulez), autant de titres qui m'ont parfois bluffé quand j'étais jeune et tendre mais que je trouve irregardables aujourd'hui. Mise en scène ampoulée, musique synthétique lénifiante, morale à gros traits, effets d'une subtilité de trente tonnes, acteurs livrés à leur cabotinage préféré (De Niro en diable, LA fausse bonne idée), bref, tout le chichi des années 80 qui faisait l'admiration de Première. Comment j'ai pu m'intéresser à ça ?

Zhang Yimou, un asiatique pour finir. Ca n'a pas été simple, ils sont doués à l'est. Yimou, c'est un cas limite. Certains de ses films sont estimables mais ses derniers me sont restés en travers de la gorge. Hero en 2002 et Le Secret des poignards volants en 2004 sont typiques de grosses productions cherchant à vous en mettre plein la vue mais qui, dès lors que l'on connaît un peu le genre, perdent tout intérêt. Ce sont de grosses machines calibrées pour la plus grande gloire de la Chine et l'édification des peuples occidentaux. Autrement dit, ces films ne sentent pas bon, Hero surtout. Si Yimou a un sens plastique indéniable, il se perd dans des afféteries qui deviennent vite pénibles, imitations du style de Sergio Léone qui n'engendrent que l'ennui, comme l'interminable duel du Secret... Nous sommes très loin de Tsui Hark, de Chang Cheh, de Wong Kar-wai ou même des meilleurs Jackie Chan. Yimou ou l'artiste officiel.

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Photographies

Mymovies

Britmovies

Wikipedia

23/10/2007

Des voies différentes

Contribution au Double bill blog-a-thon

Si l'on considère les filmographies de l'ensemble des réalisateurs italiens qui ont œuvré dans le cinéma de genre, on constate une similitude dans leurs passages successifs par le genre dominant du moment. Sur la trentaine d'années fastes de la fin des années 50 à l'orée des années 80, on peut découper des périodes assez précises durant lesquelles ont régné tour à tour la comédie, le western, le péplum, le film d'espionnage, le giallo, le film policier, le film coquin, le film politique, le film d'horreur et l'anticipation. Bon gré, mal gré, aucun réalisateur n'y a échappé. Un réalisateur du calibre de Sergio Léone a commencé par le péplum avant de se révéler dans le western pour finir producteur de deux westerns parodiques post-Trinita (on mettra de côté son ultime opus qui sort du cadre de notre champ d'étude).

On voit les limites d'un système qui amène un homme du talent de Enzo G. Castellari à commettre I nuovi barbari (Les nouveaux barbares – 1982). D'un autre côté, ce mouvement permet aux plus doués de se révéler au sein d'un genre, après un échec dans un autre, et de rendre éventuellement passionnantes leurs incursions dans des genres voisins. En évitant le cloisonnement, on ouvre des possibilités qui parfois se transforment, et parfois non. C'est la vie.

Illustration avec deux approches du western par deux réalisateurs passés à la postérité à travers leurs films fantastiques et horrifiques : Mario Bava et Lucio Fulci.

Directeur de la photographie à l'origine, Mario Bava a eu une influence majeure sur le cinéma fantastique, en matière d'éclairages, d'érotisme et de tueurs en gants noirs. Son utilisation de la couleur de façon inédite et baroque, son goût du macabre, sa façon de faire naître la peur, ont marqué durablement le genre et ont définit des règles suivies par Dario Argento, Antonio Margheriti et... Lucio Fulci. Ses incursions dans le peplum et la comédie psychédélique d'espionnage ont donné de belles réussites.

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Son ultime western, Roy Colt e Winchester Jack est un joli navet bien rond. Il paraît que Bava avait trouvé le script de Mario Di Nardo mauvais et qu'il avait espéré sauver le film en le tirant vers la parodie. A l'impossible, nul n'est tenu. Roy Colt e Winchester Jack lorgne à la fois sur Butch Cassidy and the Sundance Kid sortit l'année d'avant avec succès par Georges Roy Hill (Une femme, deux hommes et une musique entraînante) et sur Il buono, il brutto, il cattivo (Le bon, la brute et le truand) de Léone dont il démarque la structure autour d'une chasse au trésor. Hélas, le film de Bava enchaîne mollement les péripéties téléphonées, les gags lourdement étirés et laisse cabotiner sans retenue ses acteurs. Les deux héros, Brett Halsey et Charles Southwood rivalisent d'inexpressivité et se tapent dessus régulièrement comme deux collégiens. Le plus redoutable, terrible à en être fascinant, c'est Teodoro Corrà dans le rôle du méchant révérend, un russe socialiste, toujours enrhumé et adepte de la dynamite. Il est tellement caricatural que l'on croirait qu'il sort de l'album de Lucky Luke Le grand duc.

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L'ensemble manque terriblement de conviction et en comparaison, les films de la série Trinita sont nettement plus soignés et plus efficaces. Surnagent à ce naufrage la partition gentiment allègre de Pièro Umiliani, les allusions aux films de Léone avec le tueur à la grimace et le paralytique, quelques éclairages et effets où l'on retrouve la patte du maître (la grotte, l'utilisation des branches au premier plan, l'ambiance de la première scène avec ses jolis contre-jour) et puis surtout la pétulance et le regard de braise de la belle Marilù Tolo en indienne sexy qui semble porter sur ses partenaires (et le film) un regard amusé et ironique. Elle force l'un des héros à prendre un bain, tire juste et embobine tout le monde à la fin. Elle a bien raison.

Je suis souvent assez dur avec Lucio Fulci. Je trouve sa série de films horrifiques qui lui ont valu admirateurs et reconnaissance assez surfaits. Complaisants dans la violence graphique (ce n'est rien de l'écrire), ils sont souvent mal construits et Fulci dirige approximativement des comédiens médiocres. Le réalisateur compense ses manques par des scènes choc sadiques, que l'on peut juger gratuites et artificielles à froid. A chaud, elles font leur effet et Fulci a le sens du cadre et de l'ambiance. Une grande partie de son oeuvre est mal connue, occultée par cette période sanglante de 1979 à 1981. Pourtant, il tourne depuis 1959 et compte une soixantaine de réalisations dont plusieurs incursions dans le western. Si I quattro dell'apocalisse (Quatre de l'apocalypse- 1975) n'a pas été fait pour réviser mon jugement (scénario à trous, complaisance dans la violence, viol racoleur pénible), j'avoue mon enthousiasme pour Le colt cantarono la morte et fu... Tempo di massacro (Le temps du massacre), réalisé en 1966, son premier essai dans le genre.

La séquence d'introduction avec son mélange de cavaliers aristocratiques bien mis et de discrets cow-boys a quelque chose de bunuellien. La lumière et les chants d'oiseaux rappellent la première séquences de Belle de Jour. Et son soudain dérapage dans le sadisme. Un homme est sortit d'une cage et les chiens sont lâchés. La chasse commence. La suite comprend une belle idée de mise en scène : l'homme meurt déchiré par les chiens dans le lit d'une rivière et l'on suit son sang emporté par le courant. Celui-ci devient torrent dont le flux accélère et bouillonne aux accents de la chanson de Sergio Endrigo avant de rejoindre un groupe de chercheurs d'or parmi lesquels Tom Corbett joué par Franco Nero. Cette image aquatique permet de relier habilement Corbett à son antagoniste, Jason Scott joué par Nino Castelnuovo (oui, l'amoureux de Deneuve dans Les parapluies de Cherbourg). Par un lien de sang. La force du courant image le caractère irrésistible et violent de la vengeance que va exercer Corbett. Car vengeance il y a, l'un des thèmes piliers du western à l'italienne. Corbett revient au pays pour le retrouver sous la coupe de Scott père, gros propriétaire, tandis que son fiston fait régner la terreur. La famille Corbett a été dépossédée et le frère de Tom, Jeff, joué par Georges Hilton dans un registre qui rappelle le Dude de Dean Martin dans le Rio Bravo de Howard Hawks, s'est abîmé dans l'alcool et l'ironie. Comme on peut s'y attendre, Tom Corbett va remettre tout cela d'aplomb.

 

Le film ressemble beaucoup à Texas Addio, tourné par Ferdinando Baldi juste avant avec le même Nero. Même thématique de la vengeance, même culture méditerranéenne à base d'histoires familiales (pères indignes, fraternité, bâtards) et de réminiscence des tragédies antiques. Même personnage déterminé et quasi invincible, d'une rigidité d'esprit qui se traduit par son allure. Ici, Tom Corbett porte une veste en peau retournée qui lui fait comme une carapace. Mais le film de Fulci est supérieur en tout point à celui de Baldi qui était déjà pas mal. Il le doit en partie au scénario de Fernando Di Léo, tendu à l'extrême, sans temps morts, jouant habilement sur les deux images du frère : le « mauvais » psychopathe Jason et le « bon » ivrogne Jeff. Tous les deux ont une véritable épaisseur et surprennent tout au long du récit. Quoique sérieusement imbibé, Jeff saura montrer (aux limites du crédible) qu'il n'a rien perdu de son agilité de pistoléro.

Le film ménage aussi un aspect conte avec ce ranch baroque et luxueux (tourné dans la villa Mussolini) que tout le monde connaît mais que nul ne sait trouver, le voyage initiatique avec épreuves, les chasses à l'homme et ces personnages aristocratiques plus proches de Perrault que de Ford. Dernier atout déterminant, le traitement assez radical de la violence. C'est peut être le premier film où Lucio Fulci laisse éclater son goût pour le sadisme et les situations extrêmes. Non que le film soit plus violent au fond que certains Corbucci où Léone, mais il y met une froideur, une distance dans la mise en scène qui font ressortir la cruauté des actes. Le film est célèbre pour la scène quasi surréaliste où Tom, arrivé au ranch des Scott, est fouetté par Jason. Au-delà du motif de la lacération que Fulci reprendra maintes fois, il y a ces spectateurs en costumes blancs, ces chants d'oiseau, les sifflements du fouet et le temps qui se dilate. Tout contribue à rendre la scène glaçante. Mais il faut voir aussi la façon dont Corbett accomplit sa vengeance, tirant dans le dos, tirant à bout portant, impassible, impitoyable, tout aussi glaçant parfois que son bourreau. Il y a chez Fulci fascination maladive de la violence, mais dans ce film encore, il sait garder ses démons à distance.

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Et puis, c'est jusqu'ici le film le mieux dirigé de Fulci que j'ai vu. Nero est impeccable, Castelnuovo effrayant à souhait et Georges Hilton... Je commence à bien l'aimer, George Hilton (une opinion contraire ici). Urugayen élevé en Angleterre, il n'est pas terriblement expressif, mais décontracté, il a fait merveille en Sartana, Alleluja, Tresette et en pistoléro quasi parodique pour le premier western d'Enzo G. Castellari, Vado, l'ammazzo e torno(Je vais, je tire et je reviens) en 1967. Il s'est essayé à un registre plus dramatique dans Quei disperati che puzzano di sudore e di morte (Les quatre despérados) en 1969 dont je vous avait entretenu ici, avec force louanges. Dans le film qui nous intéresse, il contraste parfaitement avec Franco Nero et je ne peux que le féliciter de s'être mis dans les pas de Dean Martin. Il y a de plus mauvaises références.

Si Mario Bava n'était visiblement pas motivé par ses incursions dans le western, il semble que Lucio Fulci y ait trouvé un terrain pour exprimer enfin des choses en lui profondes. Tempo di massacro est un jalon essentiel du genre et pour moi, si peu sensible à la tripe, son plus beau film.

Roy Colt e Winchester Jack

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Tempo di massacro

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20/10/2007

Heaven knows...

"Whenever a McTarry dies, the grouse come into season."

 

J'aimais son érotisme pudique, son humour sensuel, sa classe, son menton droit et son incroyable accent écossais. Hommage à Karen Holmes, Soeur Angela, Terry McKay, Lady Hilary Rhyall, Mrs Giddens, Hannah Jelkes, et Lady Fiona McTarry.
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Un superbe site sur Deborah Kerr

Beaux hommages sur Flickhead (avec une photographie à tomber) et Cinebeats 

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