14/11/2008
Moments
La première fois que j'ai vu The searchers (La prisonnière du désert – 1956) de John Ford, c'était à la télévision. Mes parents ont longtemps eu le noir et blanc et c'était encore le cas quand j'ai quitté le foyer familial à la fin des années 80. Je pense que cela a contribué à forger mon goût en la matière. Je situe cette première fois vers 1980 et c'était un peu spécial. Mon père avait en effet déclaré que c'était un bon film. D'ordinaire, il détestait les westerns et particulièrement ceux avec John Wayne (Ce facho !). La règle souffrait trois exceptions : les films de Léone (qui avait tout compris, lui), Rio Bravo de Hawks (qui le faisait rire) et La prisonnière du désert.
Ce ne serait donc pas une soirée conflictuelle. A l'époque, j'aimais enregistrer le son des films sur un petit magnétophone à cassettes. Cette fois, j'enregistrais toute la première scène, de l'arrivée d'Ethan (Duke) jusqu'à la première apparition de Martin (Jeffrey Hunter). Cette scène me fit une grosse impression, jamais démentie par la suite. Je crois qu'elle condense tout ce que j'aime dans l'univers du western et dans le cinéma de John Ford. Illico, The searchers devint mon western préféré et l'un de mes films favoris.
La fois la plus tendre que j'ai vu The searchers, c'est en Hollande avec ma compagne. Au début que l'on s'est connu, nous nous écrivions des lettres. Evidemment j'ai dù parler de cinéma. Elle m'avait envoyé une réponse dans laquelle elle parlait longuement de ce film et combien il l'avait marqué, elle qui n'apprécie pas spécialement le western. Cela m'avait beaucoup touché. Donc, un soir, à l'époque où elle travaillait en Hollande, j'avais le DVD et je lui ai proposé de le mettre. Nous avons donc vu le film tous les deux, bien blottis au fond du canapé. Le plus difficile pour moi, c'était de ne pas me mettre à pleurer comme une madeleine lors du final, chose plus facile à gérer dans l'obscurité protectrice d'une salle de cinéma.
La pire fois que j'ai vu The searchers , c'était à la cinémathèque de Nice. J'y avais déjà vu le film plusieurs fois, sans problème. Cette fois, tout commence comme d'habitude, ride away, ride away, puis soudain, dès le premier intérieur dans la ferme des Edwards, un micro en haut de l'image ! J'accuse le coup. Un peu plus loin, un autre micro. Enfer ! Puis un spot. Puis lors des scènes nocturnes tournées en studio, carrément le bord du décor peint et au-dessus toute une rangée de projecteurs. J'étais effondré. Que s'était-il passé ? Je n'avais donc rien vu les autres fois ? Ford était-il gâteux ? Un véritable cauchemar, cette séance. Il a fallu la vision du DVD pour que je me assure sur les cadrages de Ford, mais je n'ai eu l'explication que bien plus tard. C'était juste un bête mauvais cache devant le projecteur. A quoi ça tient, la magie du cinéma.
La plus belle fois que j'ai vu The searchers, c'était à Cannes, il y a trois ans. Ma fille venait de naître et je n'avais pas trop envie d'aller au festival. Il y avait pourtant un documentaire sur John Ford, alors je me suis décidé. La Warner venait de restaurer le film qui devait être projeté en seconde partie de soirée. Je n'avais pas l'intention de rester, je connaissais bien le film, et j'avais hâte de renter au doux foyer familial. Un gars du studio est venu expliquer comment s'était faite la restauration. Un boulot de dingue, chaque couleur primaire ayant fait l'objet d'une copie, toutes ayant été restaurées séparément. Ils ont alors passé un extrait. L'image était si belle que je suis resté pétrifié et je suis resté pour le film. A quoi ça tient, la magie du cinéma. Dans la première scène, j'avais l'impression que la poussière de Monument Valley venait rouler à mes pieds. Et jamais les ocres n'avaient été aussi ocres. Et bien sûr, pas l'ombre d'un micro ou d'un projecteur.
Et bien sûr, je pleure toujours comme une madeleine à la fin, dans l'obscurité protectrice de la salle.
21:48 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : john ford | Facebook |
Imprimer |
12/11/2008
La femme selon Howard Hawks
08:38 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : howard hawks | Facebook |
Imprimer |
11/11/2008
Onomatopées
Ah ! Les vacances de M Hulot ! Ca Ed, c'est un film qui a à voir avec la bande dessinée.
La porte du restaurant : chtonk !
Tati, il a à voir avec Franquin, le Franquin de la grande époque. Sur l'affiche, Hulot, il a l'air d'un cousin de Fantasio.
Sur le quai de la gare : aoaowashawashabashawowhoshowbashawasha aoao
Les mêmes trois cheveux rebelles, grand et sec, la même démarche un peu cassés, les mêmes gestes interrompus, la même maladresse, la même volonté de bien faire. Un goût de l'aventure.
La cloche du village : dongdelongdongdelong
Et la même voiture, je ne me souviens plus de l'épisode mais bien avant la turbotraction, il y avait un vieux tacot tout pétaradant.
La voiture de Hulot : krakapet pafapaf kapet Tinnnntintin krakpouf pouf, paf
Voilà, ce sont des onomatopées de bande-dessinée, une mise en scène façon ligne claire dans la tradition de Jijé avec, déjà, quelques envolées de style du Franquin plus nerveux, du Franquin plus moderne.
La chambre à air dans le cimetière : pfffffsssss...
C'est un film sur l'enfance, sur les sensations de l'enfance, un film de vacances, de mer et de soleil. La partie de tennis, les baignades, le bateau. Et puis les feux d'artifices. C'est un film sur les bêtises.
Les feux d'artifices : Siiiiiissssssssiiiiiii fuiiiiiiiiiiiiiouuuu kk kkk kboom !
C'est un film de mon enfance, un film vu dans mon cinéma de quartier du XIIe, un film de mes vacances en Bretagne, des week-ends chez mes grand parents en Picardie.
Le ressac : aschhhh aschhhhh...
C'est un monde de rêve, le souvenir d'une France qui n'a pas existé, enfin pas vraiment. C'est une utopie en quelque sorte.
La balle de tennis : poka poc poka poc !
Et quel temps fait-il à Paris ?
08:19 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : jacques tati | Facebook |
Imprimer |
10/11/2008
Et alors là, Marcello, tu fais comme ça

13:29 Publié dans Ça | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : federico fellini | Facebook |
Imprimer |
08/11/2008
Woody Ernst Barcelona
Les films des réalisateurs ayant atteint un certain âge peuvent se révéler particulièrement excitants : Les derniers Ford, le Maddadayo de Kurosawa, The deads de Huston, les derniers Ozu, Intervista de Fellini ou encore Fanny et Alexandre de Bergman. Qu'ils affinent une fois encore un discours poli par des années de carrière, qu'ils bénéficient de la liberté de ceux qui n'ont plus rien à prouver, ils tentent alors de nous donner la quintessence de leur oeuvre. Apaisés autant que déterminés, sûrs de leur art autant que l'on puisse l'être, ils savent alors aller à l'essentiel. Et de ces oeuvres qui résument les leçon ténues d'une vie se dégagent une émotion et un plaisir aussi rares qu'intenses.
J'espère bien que Vicky Cristiana Barcelona ne sera pas le dernier Woody Allen, et je suppose que, compte tenu de son système, le nouveau est déjà en route, sinon fini (Vérification faite, ce sera Whatever works, en postproduction). Mais cette réalisation baigné du soleil de l'Espagne me semble bien correspondre à ma déclaration préliminaire.
Longtemps, on a noté la régularité de production d'Allen. Un film par an, réglé comme du papier à musique. C'était un compliment avant de devenir comme un reproche chez certains. Nous sommes passés de « Chouette, le Woody Allen annuel tant attendu » à « Tiens, le Woody Allen de l'année » à « Et un de plus, pas trop en forme cette année, ça ira mieux la prochaine ». Sur le dernier film, on est revenu bien entendu sur le départ pour l'Europe et l'entrée de Scarlett Johansson dans son cinéma. Inutile de s'étendre là-dessus. J'ai quand même l'impression tenace que, au moment ou Allen fouette son imagination, une partie de ses admirateurs s'est endormi sur les souvenirs confortables de Manhattan ou Annie Hall (Certes, les amis, certes), et l'esprit en pantoufles, n'est plus capable d'apprécier les beautés de son cinéma vivant d'aujourd'hui et d'accueillir comme il se doit, allons-y franchement, l'un de ses tout meilleurs films. C'est dit.

D'aucuns m'objecteront que Match point avait été reçu avec force louanges. C'est vrai, mais j'oserais dire que ce sont des circonstances aggravantes. Outre l'attrait de la nouveauté (Londres, Scarlett), il s'agissait d'un drame particulièrement poignant à la fin. Or Vicky Cristina Barcelona est une comédie, une vraie, et une comédie du genre le plus délicieux qui soit, une comédie romantique sophistiquée. Et malgré tout ce que l'on dit et malgré tout ce que l'on sait, la gravité paye toujours plus en art que la légèreté. C'est bien dommage parce qu'en vérité je vous le dis, non seulement Vicky Cristina Barcelona est bien supérieur à Match point, mais égale les plus belles réussites d'Allen dans le genre et se hisse au niveau des classiques de la comédie américaine de grande classe.
Soit deux américaines, la brune Vicky au désir de stabilité, et la blonde Cristina l'artiste qui se cherche, débarquées à Barcelone pour un été de vacances. Elles acceptent la proposition directe de Juan Antonio, un peintre espagnol beau et ténébreux, qui les invite pour un week-end à Oviédo au cours duquel elles pourront faire du tourisme, de bons repas, et l'amour. A partir de là, rien ne se passera comme prévu, que ce soit l'estomac de Cristina qui la lâche au mauvais moment ou la façon dont Vicky réagit à une réelle attirance pour Juan Antonio. Bientôt survient Maria Elena, ex-femme du peintre au tempérament volcanique qui avait déjà essayé de le poignarder, tandis que Doug, l'insipide fiancé de Vicky, débarque pour l'épouser plus vite que prévu. Peu importe le détail des péripéties. Comme dans cet autre sommet allenien, A midsummer night sex comedy (Comédie érotique d'une nuit d'été – 1982), c'est l'été et la lumière est belle à tomber. Il s'agit avant tout des mouvements du coeur, de la recherche d'un sens à donner à sa vie, d'un moment de grâce ou les choses peuvent basculer. Et si le film début de siècle est imprégné de l'admiration d'Allen pour Ingmar Bergman, Vicky Cristina Barcelona me semble puiser son inspiration chez un autre maître, moins souvent cité, Ernst Lubitsch, le Lubitsch de la Lubitsch's touch. L'homme, l'européen, le réalisateur de Design for living (Sérénade à trois – 1933) avec son merveilleux ménage à trois qui nous parlait déjà d'amour, des mouvements du coeur, du sens de la vie et de celui que l'art donne à la vie, de l'inspiration, du désir souvent contrarié au bonheur.

D'entrée Allen annonce la couleur. Les premiers plans du film sont un modèle de concision et de clarté. Une simplicité apparente, un montage tout en ellipses qui donne un rythme soutenu, une voix off qui sous son prétexte explicatif, donne les clefs de l'intériorité des personnages. Mais qui ne l'exprime pas. Cette manière fort subtile permet à Allen de laisser faire le travail d'interprétation au spectateur à partir du jeu tout aussi subtil des comédiens. Cela permet aussi de réduire drastiquement l'importance dramatique des dialogues. Du coup certains les auront trouvé moins percutants que d'habitude. C'est que cette fois, ce qui se joue se joue entre les mots ou au-delà d'eux. Ainsi lors de la première rencontre avec le peintre. Allen nous le fait brièvement entrevoir lors d'une inauguration dans une galerie. Puis on se retrouve avec les deux femmes dans un restaurant. Elles repèrent Juan Antonio et en parlent, mais le contre champ se fait attendre et l'on a tout le temps de l'imaginer avant qu'il ne nous soit révélé. Cela rappelle la première apparition de Maria Vargas dans le cabaret de The Barefoot Contessa (La comtesse aux pieds nus - 1954) de Joseph L. Mankiewicz, un élève de Lubitsch. Il y a donc constamment ce qui est dit par les personnages (parfois brouillé par l'utilisation de l'espagnol), ce qui est raconté par le narrateur, ce qui est montré et ce qui est donné à imaginer. Et chacun de ces niveaux contredit ou nuance ce que montrent les autres. Et Allen, dont la maîtrise est totale, se plaît à jouer en plus de cela avec le temps, comme lorsque Cristina révèle sa liaison avec Maria Elena à Vicky et son fiancé, scène suivie d'un retour en arrière qui montre le premier baiser des deux femmes. La seconde scène nuance l'expression assurée de Cristina dans la première en laissant deviner ce qu'elle a du surmonter pour accepter cette nouvelle facette d'elle-même. Je pourrais aussi citer le long plan du pique-nique qui joue sur le hors-champ, mais je ne veux pas non plus en rajouter.
Lubitsch, je le retrouve aussi dans la façon de filmer l'Espagne. « Carte postale ! » Dit-on. Pas plus pas moins que le Paris de Ninotchka où de Design for living. C'est une idéalisation qui est aussi un hommage à une forme de civilisation. C'est pour Allen une façon d'opposer gentiment la culture parfois rude de son pays et celle de l'Europe dont il admire tant de choses, de la peinture aux vins en passant par les films. L'influence du soleil et de la sensualité espagnole sur ses héroïnes est du même ordre que celle de la ville lumière sur la camarade Nina Yakushova. Un révélateur. Un milieu si différent qu'il dérègle les sens et les habitudes. Une porte ouverte sur les rêves. Lubitsch encore dans la pudeur d'une caméra qui se détourne lors des moments les plus sensuels car tout est déjà dit. Déjà montré. Lubitsch toujours dans la construction de plans comme celui où Vicky se regarde dans une glace, intérieurement déchirée, son image dédoublée tandis que Doug apparaît en arrière plan, flou, si lointain. Un plan pas si compliqué sur le papier mais là, c'est le plan juste au juste moment avec un maximum d'effet expressif.
Il faudrait encore parler du contrepoint introduit par le couple Nash vieillissant, de l'utilisation de la musique espagnole, de l'hommage au Jules et Jim de Truffaut, de l'excellence des acteurs, de la beauté de Rebecca Hall, de Scarlett Johansson et de Penelope Cruz (Qui me laisse plus froid d'ordinaire), de la difficulté que j'ai eu à oublier Anton Chiguhr derrière le Juan Antonio de Javier Bardem, de l'étrange douceur dans la gravité du finale, de la sensualité de l'affiche, d'un tas de choses. Comme je l'écrivais au début, passé un certain age, il y a des réalisateurs qui nous offrent des films sacrément excitants.
Chez le bon dr Orlof
Sur Nightswimming
23:14 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : woody allen | Facebook |
Imprimer |
06/11/2008
Le rouge et le noir


10:02 Publié dans Actrices | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : rita hayworth, affiches | Facebook |
Imprimer |
05/11/2008
Table ronde
Ils avaient donc accepté mon invitation et il est temps, après avoir réactivé ce blog presqu'endormi, de les remercier depuis le doux pays d'Inisfree. Le bon Dr Orlof, Edisdead de Nightswimming et Joachim de 365 jours ouvrables ont fait le voyage jusqu'à Nice pour participer aux 10e Rencontres Cinéma et Vidéo à Nice. Mettre un visage, une voix, une allure sur ceux avec lesquels on s'entretient depuis des mois, voire des années sur la toile, c'est une expérience toujours excitante. Nous nous sommes donc retrouvés tous les quatre, avec le renfort de mes amis Philippe Serve de Cinéma Sans Frontières et Alain Dumont du Ciné-Café de Nice pour une table ronde peut être un peu courte mais, à mon sentiment, plutôt chaleureuse. Mes collègues sont restés plutôt discrets sur la teneur des débats, et moi comme je ne suis pas toujours doué, j'ai épuisé les batteries de la caméra vidéo prévue pour l'occasion avant même le début des discussions. J'aurais pourtant aimé vous livrer une trace de cette heure fertile. C'est ainsi. Il me reste à espérer que les étudiants présents de l'école de cinéma locale me donneront un exemplaire de la synthèse de leur notes. Reste quand même cette photographie et le souvenir des plus agréable de cette rencontre.
10:34 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
Imprimer |
04/11/2008
Génèse de l'embryon
" L'idée du film m'est venue un matin pluvieux de mai, vers cinq heures. J'ai ouvert la fenêtre — j'ouvre toujours mes fenêtres quand je me lève car je suis claustrophobe, j'ai regardé fixement cette pluie qui tombait drue et mon imagination a commencé à vagabonder. A l’évidence je ne pouvais pas tourner un film à l’extérieur car on était au début de la saison des pluies. Je me suis alors mis à réfléchir à la possibilité de faire un film dans mon appartement, et c’est là que j’ai eu l’idée d’enfermer une femme dans cet appartement qui est à la fois mon domicile et mon bureau. Vers huit heures, j'ai appelé Masao Adachi en lui disant que j'avais une idée formidable. On s'est vu vers midi et je lui ai tout raconté en détail autour de quelques bouteilles de saké et en grignotant du hatahata (poisson). Deux jours plus tard — Adachi écrivait toujours très vite d’autant plus qu’il était toujours en retard pour payer son loyer et que je lui payais ses scénarii en liquide — il m’a remis un premier scénario. C'était avant-gardiste, comme d'habitude, excessif et surtout incompréhensible. Il voulait aussi que les murs de l'appartement se fissurent et que des poules en émergent, ce qui était irréalisable même si l'idée était excellente. Je lui ai donc demandé de réécrire le scénario en supprimant les scènes en question. En colère, il a jeté le scénario à mes pieds et est revenu quelques temps plus tard avec une deuxième mouture du script qui était la copie quasi-conforme du premier, alors qu’il n’existait pas encore de photocopieuse à l’époque.
Finalement on a décidé de prendre ce scénario, tout en supprimant certaines scènes comme celle des poules. J’ai trouvé une équipe et je leur ai expliqué comment tout allait se dérouler. Je leur ai dit que nous allions être enfermés dans cet appartement pendant toute la durée des prises de vue, afin de vivre la même expérience que les personnages du film. On a emprunté des futons, et toute l’équipe a dû dormir sur place pendant les cinq jours de tournage. Seul l’assistant-réalisateur avait le droit de sortir pour faire les courses. A part les gamelles du midi, j’ai fait moi-même la cuisine pour toute l’équipe matin et soir. Et on a peint tous les murs de l’appartement en blanc — lorsque le propriétaire a découvert cela, il m’a d’ailleurs viré. On est tous devenu fous à tour de rôle. Ce n'est qu'ensuite qu'on a tourné la seule scène en extérieur du film, celle qui ouvre Quand l'embryon part braconner et qui se déroule sous la pluie."
Entretien avec Koji Wakamatsu
Source dossier de presse
08:48 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : koji wakamatsu | Facebook |
Imprimer |
03/11/2008
Oedipe mal résolu
Âmes sensibles, amateurs de bon goût, passez aujourd'hui votre chemin. Voici l'histoire de monsieur Sadao, petit patron (ou petit chef, je ne suis pas sûr), séduisant la délurée mademoiselle Yuka, employée. Il pleut des cordes en noir et blanc. Après une étreinte poussée en voiture, monsieur Sadao entraîne mademoiselle Yuka chez lui. Il fait nuit, mais monsieur Sadao garde ses lunettes sombres façon Wong Kar-wai qu'il ne quittera quasiment jamais. Il fait visiter son appartement, petit et dépouillé jusqu'à l'exubérance. C'est celui du réalisateur. Nouvelles étreintes. Nue dans l'encadrement d'une porte, mademoiselle Yuka rappelle à Monsieur Sadao sa femme qui l'a quitté. Toutes les mêmes pense monsieur Sadao en voix off. Âmes sensibles, si vous êtes encore là, c'est mon dernier avertissement.

Le jeu expressionniste de Hatsuo Hamatani laisse vite penser au spectateur le moins éveillé qu'il y a quelque chose de pourri au royaume de monsieur Sadao. Effectivement, monsieur Sadao drogue mademoiselle Yuka. Il l'attache comme savent le faire avec art les japonais puis il sort un grand fouet. Il zèbre alors le corps à la peau si blanche de marques sombres esthétiquement réparties tout en insultant copieusement mademoiselle Yuka. Mademoiselle Yuka se tortille érotiquement mais douloureusement puis monsieur Sadao la taquine avec un rasoir. Plus tard, il la fera marcher à quatre pattes comme un chien. Enfin, il faudrait écrire une chienne mais ça pourrait être mal perçu. Ainsi s'écoule la nuit.
Bien sûr, monsieur Sadao a ses raisons. Que la raison ignore. Sa femme voulait un enfant. Pas lui. Il s'était même fait opérer pour éviter tout ennui. Madame a alors eu recours à l'insémination artificielle ce qui a rendu monsieur Sadao un peu brutal et plein de ressentiment. Sa femme est donc partie alors il passe ses nerfs sur mademoiselle Yuka. Mais celle-ci ne reste pas inactive. Son esprit et son corps se tendent vers la fuite. Elle tente de séduire monsieur Sadao en se montrant soumise. Il faut dire qu'entre deux séances de fouet, monsieur Sadao montre toute l'étendue de sa détresse en se blottissant contre elle comme un enfant. Tentative de fuite qui échoue. Un échec aux conséquences douloureuses. Mademoiselle Yuka n'est pourtant pas brisée et le film s'achemine vers son issue tragique.
N'étant pas un familier du genre Pinku Eiga (« Film rose » ou cinéma érotique nippon), je ne savais pas trop à quoi m'attendre avec Taiji ga mitsuryo suru toki (Quand l'embryon part braconner) le film de Koji Wakamatsu, spécialiste du genre. Réalisé en 1966, sortit l'an passé en France par Zootrope films, il a écopé d'une interdiction aux moins de 18 ans. Au regard des critères de 2008, c'est quelque peu excessif. Mais les censeurs, âmes sensibles autant qu'hypocrites, ont sans doute réagit au titre provocateur tout en digérant mal le mélange d'érotisme, de sado-masochisme et de fable politique. La femme, dans le cinéma japonais, est très souvent représentée en butte à la violence des hommes. C'est vrai chez Mizoguchi et Kurosawa comme chez Oshima, Immamura ou Suzuki. Cette violence, montrée souvent de façon assez directe, semble compenser une difficulté à pouvoir représenter les actes sexuels et la nudité. Au Japon, on floute les poils. Ainsi le film de Wakamatsu est explicite côté coups de fouets tandis qu'il déploie des trésors d'imagination dans les cadrages pour ne pas (trop) montrer les endroits stratégiques de mademoiselle Yuka. On est loin en la matière de l'équilibre du giallo italien de la même époque. On comprend mieux l'importance et les problèmes rencontrés par Ai no corrida (L'empire des sens – 1976) de Nagisa Oshima avec son approche frontale de la représentation du sexe. Il se trouve, tiens donc, que ce film a été produit par Koji Wakamatsu.
Quand l'embryon part braconner est un huis clos étouffant entre What ever happened to Baby Jane de Robert Aldrich ou la dernière demi-heure de I corpi presentano tracce di violenza carnale de Sergio Martino dont il faudra que je vous entretienne. Deux personnages, un lieu unique, un rapport dominant/dominé, une lutte autant physique que psychologique et du style, beaucoup de style. Le film est réalisé en un superbe noir et blanc que l'on doit au chef opérateur Hideo Itoh (qui officiera sur le film d'Oshima). Il déploie des effets de reflet de l'eau dansant sur les murs, ondulant sur les vitres mouillées de pluie. La lumière est tour à tour sombre et terrifiante quand elle étire l'espace d'un simple couloir, blanche et onirique lors des flash-backs, violente et crue sur le corps épuisé de mademoiselle Yuka. C'est de toute beauté, contrastant avec les agissements quasi animaux des protagonistes.
La mise en scène de Wakamatsu est d'une constante invention. Il alterne passages hystériques, plans surréalistes et moments quasi contemplatifs dégageant une étrange tendresse. Malgré le côté exercice de style de l'entreprise, il transcende ses faibles moyens et tire le maximum de son dispositif minimaliste. Fouet, corde, baignoire, rasoir, pas un objet du petit appartement qui ne se révèle un instrument de la souffrance infligée par monsieur Sadao à mademoiselle Yuka. Le film de Koji Wakamatsu est un conte cruel et sadien sur les rapports homme/femme que l'on pourra éventuellement lire en terme de lutte des classes si on est de bonne humeur. Comme le déclare son auteur : « Un film pink, c'est de l'agit-prop. Il s'agit de provoquer le public, d'interpeller de la manière la plus frappante qui soit les consciences ». J'imagine pourtant que sa sombre ironie et ses excès feront plutôt grincer les dents ce qui, vous vous en doutez, me réjouis et me donne furieusement envie de poursuivre mon exploration de l'oeuvre de notre homme.
Le site du film avec plein d'information, un dossier de presse très complet à télécharger, le bonheur.
12:31 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : koji wakamatsu | Facebook |
Imprimer |
02/11/2008
Tu l'as vu, mon beau film fasciste ?
Rien ne vaut une bonne approche polémique pour se remettre en train (jeu de mot imprévu mais bienvenu). Je vais donc vous parler d'un film fasciste ou plus exactement de l'un de ces films qui se sont attiré l'infâmante épithète. Coïncidentellement, il y a quelques jours l'ami Tepepa me demandait à propos du gratiné Milano trema : la polizia vuole giustiza de Sergio Martino : « Tu y as vu un film fasciste ? ». Dans la foulée, je découvre avec plaisir qu'Hyppogriffe écrit à nouveau sur Préfère l'impair, un de ces articles passionnés et virulents dont il a le secret. Attaquant non sans raisons une attitude de Michel Ciment, il utilise au passage le terrible mot à propos de Patrice Lecomte et Bruce Willis. Comme je l'ai répondu à Tepepa, je n'utilise jamais ce mot pour parler de cinéma et je tique toujours quand je le vois employé. Cela doit venir de l'époque où, jeune adolescent, je lisais les critiques des films dans le Nouvel Observateur que prenait mon père. Nombre de films que j'aimais, dont pas mal de westerns, attirait le vocable redoutable. Ce que je ressens encore aujourd'hui, c'est que traiter un film ou un réalisateur de fasciste est particulièrement disqualifiant. Ca ne vaut guère mieux que « film rouge » utilisé à l'époque du maccarthysme, ou « antisemite » tartiné lors d'une affaire récente qui nous a beaucoup occupé. Tout cela manque un peu de nuance et d'à-propos. Cette histoire me fait toujours penser à Michael Cimino, dont le Deer Hunter (Voyage au bout de l'enfer) a été traité de fasciste avant qu'il ne se voit reprocher une « approche marxiste » pour Heaven's gate (La porte du paradis). Cimino, on le sait, a toute mon admiration.
Pour poser les choses, John Ford dans The man who shot Liberty Valance donne la définition la plus claire que je connaisse du fascisme. C'est la primauté de la Force sur le Droit. Valance, joué par Lee Marvin, est un fasciste qui maintien l'ordre de gros éleveurs par le fouet et le colt, tabassant au passage la presse libre et l'opposition démocratique. Cette dernière, c'est Ranse Stoddart – James Stewart, l'avocat qui organise les élections et l'éducation. Tom Doniphon, joué par John Wayne, représente ici l'ambiguïté et le déchirement des démocraties contraintes de recourir à la force pour établir le Droit. Pour Ford, Doniphon ne peut que disparaître après avoir accompli le sale boulot en éliminant Valance. Ford éprouve pour Doniphon un mélange d'admiration et de compassion, du même ordre que celui éprouvé par Sam Peckinpah pour sa horde sauvage.
A partir de là, j'avais l'envie de vous parler d'un film que j'ai redécouvert avec bonheur, Dark of the sun ou The mercenaries (Le dernier train du Katanga) réalisé par Jack Cardiff en 1968.
Congo 1960. Le capitaine Curry est chargé par le jeune président du pays fraîchement décolonisé de secourir un groupe de civils coincé en pleine révolte Simba et accessoirement de ramener un important stock de diamants pour le compte d'une grosse société belge qui fournit le régime en armes. Dark of the sun, c'est l'Aventure guerrière en majuscule : Train armé, mercenaires, rebelles pires que la mort, ancien nazi, duel avec tronçonneuse, attaque d'avion, médecin alcoolique, grandiose beauté des paysages, ville livrée au pillage, diamants, amitié virile, héroïne en détresse, sens de la parole, coups fourrés et violence, action, violence et violence. Dark of the sun fait partie de ces films qui ont choqué la fin des années 60 par leur façon directe de représenter la sauvagerie humaine, entre fascination et dénonciation. Avec un discours volontairement ambigu propre à faire hurler les bien-pensants. Tout à fait le genre à se faire traiter de fasciste. Aujourd'hui, forme et fond méritent d'être nuancés et le film, assez rare, d'être reconnu comme une oeuvre majeure en son genre.

Jack Cardiff n'est pas le premier venu. C'est un grand chef opérateur auquel ont doit les images de plusieurs films de Michael Powell dont Black narcissus (Le narcisse noir - 1947) et The red shoes (Les chaussons rouges – 1948) mais encore le Pandora d'Albert E. Lewin, The barefoot contessa (La comtesse aux pieds nus – 1954) de Joseph L. Mankievicz et African Queen de John Huston. Excusez du peu. « Cinéaste mineur » pour Sorecki, il réalise une douzaine de films et a la redoutable tâche de remplacer John Ford malade sur Young Cassidy en 1965, avec déjà Rod Taylor qui joue ici le major Curry. Dark of the sun est adapté du roman homonyme de Wilbur Smith. Intelligemment, Cardiff et ses scénaristes, Ranal MacDougall (le Cléopâtre de Mankievicz) et Adrian Spies évacuent les tentatives idéologiques et psychologiques du livre avec ses côtés les plus déplaisants. Dégagée l'homosexualité du lieutenant Surrier dont le viol est rapidement suggéré. Dégagée l'intrigue sentimentale (et machiste) réduite à une caresse sur la joue et à quelques regards. Dégagés les discours sur le racisme et le colonialisme dont on ne sait jamais trop ce qu'ils cherchent à justifier. Dégagés les excès complaisants comme la découverte des gendarmes dévorés par les Simbas. Cardiff met en avant l'aventure et l'action en resserrant l'action sur trois jours et laissant les personnages se révéler par leurs actes. Comme chez Howard Hawks, ce sont tous des professionnels, agissant d'abord en tant que tels. Ainsi, les actes du salaud de service, Henlein l'ancien nazi, n'ont jamais le racisme comme motivation première. Quand il abat deux enfants de sang froid, c'est parce qu'il craint qu'ils ne servent d'indicateurs. Quand il assassine le sergent Ruffo, le partenaire congolais de Curry, c'est parce qu'il croit que celui-ci lui a confié les diamants. C'est une manière intéressante d'éviter les gros sabots. Le fond du film devient une réflexion sur la sauvagerie de l'homme, au-delà de son contexte particulier.
Ruffo est un personnage passionnant. Joué par Jim Brown, homme superbe et bon acteur, qui aura eu le privilège d'enlacer fermement Raquel Welch dans 100 rifles (Les cent fusils – 1969) de Tom Gries, étreinte inter-raciale grand public qui fit beaucoup de bruit. Brown, c'est déjà autre chose que Sidney Poitier. Ruffo est presque trop beau pour être vrai, patriote, pragmatique, décidé, il incarne l'espoir d'une Afrique moderne, comme d'ailleurs le jeune président aux allures de Lumumba, même s'il traite avec l'ancienne puissance coloniale. « On m'a proposé de descendre de mon arbre et je tuerais quiconque voudra m'y faire remonter » dit Ruffo à Curry. En combattant les Simbas, il combat la part sombre de son héritage. Mais il refuse de la même façon la sauvagerie occidentale de Henlein comme celle qui s'exprime chez son ami Curry. Car notre héros est loin d'être exemplaire. Tout en mâchoire et épaules carrées, Rod Taylor compose sans nuance un personnage de guerrier, toujours sous pression, éclatant en brusques accès de violence comme lorsqu'il essaye d'écraser la tête de Henlein sous les roues de la locomotive. Le règlement de compte final entre les deux hommes est d'une intensité peu commune et amène une scène étonnante entre Curry et un gendarme congolais, Kataki. Ce dernier, le visage bouleversé d'émotion, lui reproche durement son acte : « Tuer comme ça ? Tragédie... Je ne marche pas à vos côtés, nous essayerons une autre voie », un écho aux paroles de Ruffo. Dommage que ce personnage n'ait pas été plus creusé auparavant. Tel quel, il porte néanmoins un regard lucide sur Curry et d'une certaine façon, la morale du film. Une morale qui pour moi a à voir avec le discours fordien sur la Force et la Loi.
Reste que c'est un film de blanc pour un public occidental, une oeuvre à grand spectacle d'autant plus ambiguë avec ses intentions que le spectacle est efficace. Cardiff a une extraordinaire maîtrise de l'espace et du montage. La plupart des scènes sont construites de façon musicale, comme autant de morceaux de bravoure, portées par une magnifique partition de Jacques Loussier. Grand jazzman, adaptateur de Bach en swing, compositeur pour Melville ou Jessua, Loussier donne là une partition inoubliable, très jazz, dans laquelle les instruments fonctionnent par pulsations, rythmant le suspense de l'ouverture du coffre, la séquence quasi expérimentale de la composition du train, la traversée par Curry et Ruffo de la ville livrée aux Simbas ou la poursuite sur les rapides. Pulsion du sang dans les veines, pulsion de violence, pulsion du temps. Il y a là une symbiose aussi importante que dans le couple Léone-Morricone.
Martin Scorcese classe ce film dans ses « plaisirs coupables ». Cette notion de culpabilité va bien avec son côté catholique. Ce n'est pas mon cas. Moi, l'électeur tranquille de Ségolène Royal, entre un éditorial de Laurent Joffrin et un autre de Philippe Val, moi qui admire la finesse d'Ozu, la délicatesse de Lubitsch et la tendresse de Truffaut, bien calé dans mon fauteuil, je me réjouis au spectacle de ces mercenaires au béret rouge, cigare vissé aux lèvres, mitraillant les Simbas pillards, violeurs et sans doute marxistes. Bien que n'ayant pas lu Bruno Bettelheim, j'imagine qu'il y a là-dedans un lien avec les contes de fée, leur violence et la façon dont ils nous font découvrir le « tumulte intérieur de notre esprit ».
Sur Psychovision
Par D.K.Holm (en anglais)
12:23 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : jack cardiff | Facebook |
Imprimer |
01/11/2008
Train (presque) expérimental





00:32 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : jack cardiff | Facebook |
Imprimer |
21/10/2008
Sam à propos de Peckinpah
"Je dois avouer que, pour ma part, je ne suis pas très facile dans le travail, car je suis extrêmement exigeant, extrêmement dur sur un plateau. Je n’admets pas les gens qui prennent le cinéma pour un "business", je n’admets pas que l’on travaille d’un film à l’autre par routine. Je veux que l’on croie au film sur lequel on travaille, ou bien que l’on refuse d’y participer... A chacun de mes tournages, j’ai un service de cars pour relier en permanence le lieu de tournage à Hollywood, afin que toute personne de l’équipe ; jusqu’au moindre technicien, qui ne travaille pas avec le même enthousiasme que moi, pour le film, soit renvoyée immédiatement..."
En ligne sur Allez-au-cinéma.com, un entretien réalisé par Guy Braucourt pour la revue Cinéma 69 (n° 141 décembre 1969). Le grand homme y parle de sa carrière depuis ses débuts à la télévision jusqu'à The Ballad of Cable Hogue, du western, de la violence, de ses confrères et des producteurs. Est-il vraiment necessaire que je vous dise que c'est passionnant ?
11:49 Publié dans Réalisateur | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : sam peckinpah | Facebook |
Imprimer |
15/10/2008
Beaux mecs
Je suis plutôt du même avis qu'Edouard Waintrop à propos de Paul Newman. L'homme semblait estimable, le réalisateur intéressant et l'acteur séduisant. Difficile de ne pas l'aimer, mais tout aussi difficile de l'admirer vraiment. Je veux dire par là que quand on regarde sa filmographie, on constate que s'il y a beaucoup de films plutôt réussis, il n'y a pas, je n'y vois pas, l'équivalent de Vertigo pour James Stewart ou de The searchers pour John Wayne. Paul Newman a surtout travaillé avec des metteurs en scène comme George Roy Hill, Martin Ritt, Stuart Rosenberg ou Jack Smight, auxquels on pourra trouver des qualités mais qui ne sont pas exactement des foudres de guerre. Comme plusieurs acteurs de sa génération, Robert Redford et Warren Beatty par exemple, Newman a tiré tout le partit possible de son statut de star et c'est lui qui imposait souvent son point de vue aux réalisateurs. Tout à son image, il a refusé ou négligé ou manqué de se confronter à des metteurs en scène d'un autre calibre. Dans les hommages qui lui sont rendu, on mentionne souvent sa collaboration avec Alfred Hitchcock. Certes, mais on oublie trop vite que Torn Curtain (Le rideau déchiré – 1966) correspond à une période creuse du maître dont le chef opérateur préféré vient de mourir, que le studio oblige à désavouer la partition de Bernhard Hermann, son alter-ego musical, et qui lui impose deux stars, Julie Andrews et Paul Newman. Rendez-vous manqué. La carrière de Newman finalement lui ressemble, assez lisse, séduisante mais sans fièvre, comme ces rencontres dans les superproductions avec ses pairs, Redford ou McQueen. De la belle mécanique et ce sourire charmeur toujours un peu lointain. Reste quand même ses rôles chez Richard Brooks et surtout chez John Huston. Sa composition en juge Roy Bean, truculente, reste pour moi ce qu'il aura fait de meilleur avec ses seconds rôles pour les frères Cohen et Sam Mendes. Et puis encore, Newman réalisateur, comme Redford ou Beatty, est intéressant. Plus en tout cas qu'un John Guillermin.

Guillaume Depardieu, je ne sais pas trop quoi en dire. Sa vie privée ne me regardant pas, je suis assez irrité par cette façon que l'on a d'essayer d'en faire une sorte de mythe tragique. James Dean, Rimbaud, Marie Trintignant et pourquoi pas Che Guévara, un véritable concours de la comparaison la plus ridicule. Comme acteur, je l'ai vu et aimé chez Corneau, Carax et Rivette. Dans Ne touchez pas la hache, dès ces premiers plans dans l'église, il dégage une force physique et fragile, accentuée par sa claudication, qui le fait entrer dans le cercle restreint des acteurs à la pure présence cinématographique. Chose que son père avait du mal à faire, sauf chez Truffaut. Il rejoignait alors pour moi les Jacques Gamblin, Frédéric Pierrot ou Grégori Derangère, et de ce point de vue, il me manquera. Je suis donc très heureux que plusieurs blogs que j'aime bien aient choisi cette photographie pour lui rendre hommage.
23:27 Publié dans Acteurs | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : paul newman, guillaume depardieu | Facebook |
Imprimer |
07/10/2008
Un peu de glamour (en attendant)
La très belle Marguerite Churchill dans un très beau déshabillé dont je ne me lasse pas d'étudier les reflets. Source : Greenbriar Picture Show
17:24 Publié dans Actrices | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : marguerite churchill | Facebook |
Imprimer |
29/09/2008
Quelle est belle la France...
Répondant avec plaisir à l'invitation de Ludovic de l'excellent Cinématique, je vous propose une liste de dix films français qui ont compté pour moi depuis 1988. Le cinéma français, on en discute avec acharnement, le plus souvent pour déplorer, malgré une production toujours dynamique, un manque d'imagination, d'audace sur le fond comme sur la forme, d'ambition, de renouvellement. Une poignée de thèmes qui tournent en boucle, de formules parfois à succès qui ne prennent jamais le risque de s'écarter du droit chemin menant à la première partie de soirée sur les chaînes de télévision, l'invasion de modèles, de vedettes et d'humour venu de cette même télévision, la caricature du cinéma de la Nouvelle Vague, l'imitation inutile de modèles américains, semblent constituer tout notre horizon. Toutes ces critiques sont justifiées, mais ne résument pas tout notre cinéma. Du moins je le crois. Ces formes sont dominantes, mais je me pose souvent la question de savoir si, que ce soit dans les années 30 de Renoir, Carné, Pagnol, Grémillon, Vigo et Guitry, ou dans les années 60 de Godard, Truffaut, Demy, Rivette, Mocky et Tati, ce cinéma qui est aujourd'hui notre histoire, était alors dominant. L'année de la sortie de Playtime, c'était le film de Jean Girault, Les grandes vacances avec Louis De Funes, qui cassait la baraque.
Peut être manquons nous de recul sur notre période. Peut être le cinéma n'a-t'il plus la même importance, ou le même impact qu'à la grande période ou pouvaient encore séduire un large public des auteurs comme Fellini, Bergman, Kurosawa, Hawks, Bunuel, qui tiraient sans doute la critique, le public et les « professionnels de la profession » vers le haut. Toujours est-il qu'il y a des choses. Que si je regarde les vingt années passées, il y a des films qui ont compté, que je défendrais pour de bonnes et parfois mauvaises raisons. Cette liste, contrairement à ce que je craignais, a été difficile à faire parce que j'avais trop de candidats. J'aurais pu proposer trois listes entièrement différentes sans trop de problème. Je me suis donc fixé quelques règles : rester sur des premières impressions fortes, éliminer les films d'auteurs étrangers comme Ruiz, Watkins ou Iosseliani (ce qui a été dur), donner la priorité aux auteurs plus récents, ce qui m'a fait mettre de côté quelques grands anciens comme Godard, Resnais, Sautet ou Rappeneau (Bon voyage, c'était quelque chose) et puis essayer d'équilibrer les différentes formes : l'animation, le court, et le documentaire ont donné de belles réussites. Alors voilà, ça donne ceci, avec quelques mots d'explication :

Dieu seul me voit (Bruno Podalydès)
Mon film fétiche parce que je trouve qu'il me ressemble. La confirmation après Versaille rive gauche du ton particulier de Podalydès brassant un héritage cinématographique (Tati, Truffaut, Prévert), littéraire et populaire (les hommages à Hergé). Podalydès a le sens du gag, ce qui est rare. C'est le film qui m'a rendu définitivement amoureux de Jeanne Balibar, mais toute la distribution est excellente.
La chatte andalouse (Gérald Eustache-Mathieu )
Sophie Quinton en nonne poursuivant l'oeuvre d'une artiste sur le point de mourir. Un des plus beaux moyens métrages que j'ai vu, l'un des plus prometteurs. Avril, le premier long de Eustache-Mathieu, toujours avec Quinton, toujours en nonne, était intéressant sans retrouver la force de ce film.
Le vent de la nuit (Philippe Garrel)
Deneuve. La voiture rouge et la musique de John Cale.
Un monde sans pitié (Éric Rochant)
Présenté comme le film d'une génération, ce qui pouvait pour une fois se défendre, ça reste la plus belle réussite de Rochant, avec des images magnifiques de Paris et Mireille Perrier.
Va savoir (Jacques Rivette)
Ma première incursion chez Rivette. Jeanne Balibar encore, mais aussi Hélène de Fougerolles dont j'adore le grain de beauté. Le film m'avait mis dans état de joie profonde. Brillant, jubilatoire comme on dit chez Télérama.
La fille coupée en deux (Claude Chabrol)
Encore un grand ancien. Les vingt dernières années sont une belle période de son cinéma. J'aurais pu citer Au coeur du mensonge ou La cérémonie, mais celui-ci a été moins apprécié alors que j'y vois la quintessence de son style. Les femmes y sont sublimes, les hommes veules, j'adore.
La ville est tranquille (Robert Guédiguian)
J'ai un faible pour Le promeneur du champ de Mars, mais ce film-ci me semble plus représentatif de la singularité de Guédiguian. C'est un peu son film somme d'une période, l'un des plus sombre, mais une façon de conclure un cycle de vingt ans avant de se lancer dans des projets plus atypiques.
L'équipier (Philippe Lioret)
Le grand film romanesque que j'espérais. Grégori Derangère, Sandrine Bonnaire, la musique de Nicola Piovani, la mer et la tempête. S'il faut chercher un héritier à Grémillon et Gréville, en voici un. Le film suivant est plus habile que réussi mais le précédent, Mademoiselle avec Bonnaire encore et Gamblin était une très belle comédie.
No pasaran, Album souvenir (Henri François Imbert)
Documentaire intimiste et implacable, Imbert comme pour ses films précédents part d'un élément personnel pour s'ouvrir au Monde. Ici, à partir de quelques cartes postales, il nous raconte l'histoire du siècle à travers celle des camps : camps de réfugiés, camps de concentration, camps de rétentions. De sa voix calme et claire, il interroge autant les images que les gens.
Alberto express (Arthur Joffé)
Un des grands gâchis de la période avec Léos Carax. Joffé a de l'imagination, de l'ambition et le sens du cinéma mais tous ses films se sont ramassés. Ca reste un souvenir très fort, l'histoire d'un homme embarqué dans un voyage délirant en train pour payer, littéralement, sa dette à son père. Avec Sergio Castellito qui n'est pas exactement un manchot.
Juste derrière : La beauté du monde (Yves Caumont), Les triplettes de Belleville (Sylvain Chomet), On connaît la chanson (Alain Resnais), Pork and Milk (Valérie Mrejen), Pas de repos pour les braves (Alain Giraudie), Nelly et Mr Arnaud (Claude Sautet), Ester Kahn (Arnaud Depleschin), Histoire(s) du cinéma (Jean-Luc Godard)...
08:26 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : liste, cinéma français | Facebook |
Imprimer |
27/09/2008
10e Rencontres Cinéma et Vidéo à Nice
Mes lecteurs les plus réguliers savent que je risque de me faire plus rare le mois à venir. Comme chaque année, l'association Regard Indépendant que je préside organise les Rencontres Cinéma et Vidéo à Nice. Et cette année, ce sont les 10e. « J'ai dix ans... » comme chantait l'autre. Nous allons donc essayer de nous surpasser, même si je n'ai guère le goût des chiffres ronds. La manifestation est axée sur la création indépendante et régionale. Il y aura donc beaucoup de films d'illustres inconnus, ce qui ne signifie pas qu'ils ne soient pas pour autant remarquables. Les spectateurs curieux y découvriront les nouvelles oeuvres de Cédric Romain, Stéphane Coda, Catherine Savy, Cédric Coppola, Jérémie Lenoir entre autres. Le samedi 25, il y aura une grande soirée consacrée au super8 avec des films que notre association a produit sur le thème « Insomnie », une sélection des Straight8 anglais et une autre du festival de Strasbourg. Dimanche sera consacré, façon de parler, à l'expérimental et à la vidéo d'art avec une série de cartes blanches. Entre les deux journées, une nuit du cinéma constituera le point culminant de la manifestation avec une série de courts métrages, Primrose hill de Michael Hers dont je vous avait parlé lors du festival de Clermont Ferrand, et deux films assez peu ordinaires : Quand l'embryon part braconner du japonais Koji Wakamatsu, film « pink » c'est à dire érotique mais aussi politique ; et King boxer (La main de fer), un classique du film de kung-fu hong-kongais qui date de 1972 et que l'on doit à Cheng Chang-Ho avec une distribution de classe constitués de Lo Lieh, Wang Chin-Feng, Wang Ping, Hsiung Chiao et Lin Tung.
Dimanche soir verra la diffusion du documentaire de Denys Piningre, L'assiette sale. Lundi soir, nous recevrons Gérald pour son étonnant long métrage Paulo Anarkao produit complètement en marge et qui bénéficie d'un très joli bouche à oreille. Nous clôturerons cette édition pour laquelle nous croisons les doigts et serrons les fesses avec En haut des marches de Paul Vecchiali.
Il est temps de vous parler d'un événement qui me tient particulièrement à coeur et qui devrait intéresser les lecteurs d'Inisfree. Cela fait quelques temps que je caresse l'idée de réunir quelques-uns des blogueurs avec lesquels nous échangeons régulièrement depuis quelques années. Après consultation, j'ai inclus dans ces 10e Rencontres une séance un peu spéciale qui réunira rien moins que le bon Dr Orlof, Edisdead de Nightswimming, Joachim de 365 jours ouvrables et votre serviteur. J'ai également invité à ce rendez vous Philippe Serve de Cinéma Sans Frontières, le ciné-club niçois et Daniel Fimbel du Ciné-Café tout aussi niçois. Nous projetterons le film de Luc Moullet, Les sièges de l'Alcazar, puis nous débattrons des nouvelles formes de la cinéphile, qu'elle s'exprime sur Internet ou qu'elle retrouve des formes plus classiques. Je ne vous cacherais pas que j'attends ce moment avec impatience, même si nous devons nous retrouver autour d'un bon verre pour échanger. Mais je ne doute pas qu'un public nombreux et impatient de prendre la parole nous rejoindra ce samedi 25 orctobre à 16h00 au Théâtre Trimages. Je tiens d'ores et déjà à remercier mes camarades d'avoir accepté mon invitation et vous invite, pour en savoir plus à lire les entretiens que nous avons réalisé :
Avec le Dr Orlof (lien)
Avec Edisdead de Nightswimming (lien)
Avec Joachim de 365 jours ouvrables (lien le 29 septembre)
15:02 Publié dans Festival | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : blog, regard indépendant | Facebook |
Imprimer |
26/09/2008
Viva Gemma
Amicalement dédié à Marie-Thé, Aline, Donatienne, Karim, Curd, Giuliano, Derry et les fidèles de la note du 18 août 2005.
Les admiratrices et teurs de Giuliano Gemma ont été à la fête cet été. Trois éditeurs DVD ont sortit plusieurs films assez rares dans les registre du western et de l'aventure historique. Hélas, trois fois hélas, il faut commencer par joindre la voix à celle du camarade Tepepa pour pousser un coup de gueule, modéré mais résolu. Le cinéma dit « de genre » est traité de façons fort diverses. Nous avons le souvenir des belles éditions de Wild Side, de Seven 7 et la collection Cinéma de quartier chez Studio Canal. Mais ce dernier éditeur a bien maltraité les derniers films de la collection western. Pas de version originale, pas de bonus, pas la moindre photographie. Le service strictement minimum. Comme si l'équation Cinéma populaire + édition économique (ce qui se discute), ne pouvait se résoudre qu'au plus petit dénominateur commun : l'exploitation sans vergogne d'un catalogue. Dommage. Dommage parce que ces éditions minimalistes vont frustrer l'amateur sans susciter l'intérêt du néophyte. Dommage parce qu'il existe des éditions étrangères de certains de ces films bien plus intéressantes, comme pour Tempo di massacro (Le temps du massacre – 1966) de Lucio Fulci. Dommage.
Je reste néanmoins modéré dans mon coup de gueule dans la mesure ou contrairement aux pratiques des purs marchands de soupe, les films sont ici présentés dans un format respecté et les copies correctes. Et pour l'inédit I crudeli de ce cher Sergio Corbucci, la VF, bien que VF, a été faite recemment pour l'occasion.
Il fallait que ce soit dit mais, et ce n'est pas Marie-Thé qui me contredira, l'important c'est quand même de retrouver le bondissant Giuliano Gemma. Un dollaro bucato (Le dollar troué) de Giogio Ferroni et Adios Gringo de Giorgio Stegani tournés la même année 1965 se ressemblent beaucoup. Même type d'histoire, Stegani a travaillé sur les deux scénarios, les films ont la même distribution avec, outre notre héros, Ida Galli en héroïne impeccable, le grand Nello Pazzafini et Pierre Cressoy en méchants et Massimo Righi. Ce sont deux films pré-léoniens, bien que tournés après le premier opus de Sergio Léone, parce qu'ils restent à mi-chemin entre le modèle hollywoodien et la continuation du péplum. C'est Gemma, je crois, qui disait que la différence entre les deux genres tenait aux chapeaux et aux armes. Pour Gemma et Ferroni, Un dollaro bucato est leur premier western après Arrivano i titani (Les titans) de Duccio Tessari pour l'acteur et Coriolano: eroe senza patria (La terreur des gladiateurs) pour le réalisateur. Vu le rythme de travail à l'époque, ils n'ont pas du avoir beaucoup de temps pour s'adapter. Les films ont donc des dramaturgies proches, succession de péripéties sans temps mort à base de trahison, pièges, poursuites et vengeance. Avec une prédilection pour les bagarres musclées, les héroïnes immaculées, les héros physiques et naïfs et un zeste de sadisme. Ils ont un côté feuilletonesque marqué et finalement pas désagréable.
Dans Un dollaro bucato, Gemma est Gary O'Hara, un officier sudiste démobilisé qui part vers l'Ouest retrouver son frère. Il se retrouve dans une petite ville bien corrompue comme il faut. Habilement manipulé, il provoque la mort de son frère et se fait abattre. Mais il n'est pas mort, pensez un peu au titre. De retour, comme Ringo, il va faire justice.
Dans Adios gringo, il est le jeune éleveur Brett Landers. Victime d'une arnaque du vil Pazzafini qui lui vend des vaches volées, il manque de se faire lyncher. Comme plus tard Clint Eatwood dans Hang 'em high (Pendez les haut et court -1968) de Ted Post, il promet de retrouver le vrai coupable.
Curieusement, plus qu'aux séries B américaines des années 50, ces films m'ont fait penser aux westerns de série des années 30 comme ceux que j'ai pu voir avec John Wayne en vedette. Les intrigues y sont tout aussi tarabiscotées, on y voit les mêmes groupes de cavaliers se courir après dans les sous bois et les canyons, il s'agit très souvent d'un héros injustement accusé devant faire justice lui-même et l'héroïne est vraiment là pour la décoration. De la même façon, les films sont à la fois bien faits mais sans personnalité. Nous sommes très loin des recherches stylistiques de Léone où des idées parfois étonnantes de Duccio Tessari dans son dyptique autour du personnage de Ringo, tourné par Gemma entre les deux films qui nous occupent. Bref rien de saillant. Mais rien d'indigne.
Reste l'essentiel. En héros positif, Giuliano Gemma fait merveille et, à quelques touches éparses près, si ces films valent encore le coup aujourd'hui, c'est à lui qu'on le doit. A son charisme et à cet humour décontracté qu'il importe de ses personnages de peplum. Il joue parfaitement du contraste entre cet air naïf de victime idéale et de sa vigueur physique (quelle musculature mine de rien sous les chemises de cow-boy) qui crédibilise le côté implacable de sa vengeance. Sous la douceur de ses traits et la droiture de son regard, il y a la vivacité du tireur et la souplesse de l'acrobate. Un petit côté James Stewart chez Anthony Mann, toutes proportions gardées, le côté tragique en moins. Il faudra quand même aller chez Tessari ou plus tard chez Valérii pour le trouver dans des personnages plus étoffés.
Un dollaro bucato façon madeleine chez Tepepa
Les DVD
Sur le forum Western movies
23:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : giuliano gemma, giogio ferroni, giorgio stegani | Facebook |
Imprimer |
24/09/2008
Ouaouaoua
Le Spaghetti Western Orchestra dans ses oeuvres. Cinq musiciens venus d'Australie remettent au gout du jour les musiques du western all'dente. Avec bruitages et coups de pistolet. En concert pour ces veinards de parisiens au Café de la Danse.
10:19 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : ennio morricone, spaghetti western orchestra | Facebook |
Imprimer |
19/09/2008
L'épouvantail
Rain on the scarecrow Blood on the plow
This land fed a nation This land made me proud
And Son I'm just sorry there's no legacy for you now
John Cougar Mellencamp
Si certains nous replongent actuellement au coeur des années 80, je suis pour ma part plutôt occupé à revisiter les années 70. A combler les lacunes dont je parlais il y a quelque temps. Sous l'influence récente du documentaire No subtitles necessary de James Chressantis consacré aux chefs opérateurs Lazlo Kovacs et Vilmos Zsigmond. Il aura suffit, comme pour le film de Bogdanovich, d'un seul plan pour que me vienne l'irrépressible envie de voir enfin Scarecrow (L'épouvantail), troisième film de Jerry Schatzberg tourné en 1973, avec un couple désormais entré dans l'histoire du cinéma, Al Pacino et Gene Hackman.
Un seul plan, le premier. Une vaste étendue, les rondeurs d'une colinne herbeuse assombrie par un passage de nuages comme chez John Ford. Un plan qui ramène au King Vidor de Man without a star (L'homme qui n'a pas d'étoile – 1955) ou au David Miller de Lonely are the brave (Seuls sont les indomptés – 1962). Les grands espaces, le western, l'Amérique, l'idée de l'Amérique, le rêve de l'Amérique et de son cinéma. Un seul plan et tout est dit. Un point, un homme qui s'avance. Il porte une valise, ça pourrait être une selle. Puis il se heurte à une clôture, comme Kirk Douglas dans les films précités. Une clôture et une route qui file vers l'horizon. C'est encore le rêve américain, mais il vient de changer de forme.
A cheval entre ces deux rêves, il y a la rencontre de deux hommes. Gene Hackman est Max, il sort de prison, il est taciturne, maniaque, violent, généreux, paranoïaque, touchant, obstiné. Il veut monter une affaire de lavage de voiture et vivre son rêve américain à lui. Il a tout planifié, tout noté dans un petit carnet. Al Pacino est Lion, c'est le surnom que lui donne Max quand il brise la glace. Il a une théorie sur les épouvantails. S'ils font partir les oiseaux, ce n'est pas en les effrayant, mais en les faisant rire. Lion trimballe avec lui une lampe, un cadeau pour son jeune fils qu'il n'a jamais vu. Juvénile, innocent, bavard, enthousiaste, ouvert, incandescent, il a un rêve lui aussi. Il regrette ses bêtises et veut (re)fonder une famille, sa famille avec cette femme qu'il a quitté par lâcheté et ce fils qu'il ne connaît pas. Lion est un épouvantail.
A cheval entre deux rêves de l'Amérique (la libre entreprise et la famille), le film est la rencontre de ces deux hommes et leur tentative de donner corps à ces rêves en les unissant. Une rencontre dans la lumière sublime de Lazlo Kovacs. Scarecrow n'a pas d'intrigue, mais c'est une belle histoire, le récit d'une amitié, un road movie comme on dit, dans lequel on est invité à partager la vie des personnages, un peu de la même façon que chez Cassavetes, en s'immergeant dans de longues scènes du quotidien filmées avec attention et précision. De longs moments (au bar, chez la soeur) où Schatzberg prend le temps de donner à voir vivre. C'est à ce prix que le réalisateur peut nouer le drame final avec tant de force et nous laisser avec ce sentiment de déchirement authentique. Scarecrow, à travers ces deux petits personnages pitoyables et magnifiques, incarnés au sens le plus fort par le duo d'acteurs, c'est bien sûr un portrait de l'Amérique de l'époque. C'est à la fois le mythe (L'espace, la route, le rêve) et la critique du mythe (comme dirait Manchette). Une critique assez radicale, le constat d'une résignation qui gagne les âmes qui se sont heurtées au réel. C'est du beau cinéma parce que cette petite histoire de deux paumés est filmée comme une tragédie grandiose. Un film que je rapprocherais volontiers du superbe Five Easy Pieces tourné en 1970 par Bob Rafelson, avec Jack Nicholson et sur des images de Lazlo Kovacs, ce qui boucle la boucle.
23:30 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jerry schatzberg | Facebook |
Imprimer |
18/09/2008
Raymond Lefèbvre 1929-2008
09:11 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : raymond lefèbvre | Facebook |
Imprimer |