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15/02/2021

La belle et la bête

Jean Harlow

Jean Harlow posant sur une peau ours, photographiée par George Hurrell en 1934. DR.

28/03/2020

"It Ain’t Like It Used to Be. But It’ll Do"

A lire si vous avez un peu de temps et que vous connaissez assez d'anglais, un long article de Tim Pelan sur Cinephilia and Beyond au sujet de The Wild Bunch (La Horde sauvage, 1969) de Sam Peckinpah. "Comment The Wild Bunch est devenue à la fois l'éloge d'un passé mythique et un modèle pour un nouveau type de films d'action". plein de superbes photographies et des liens pour télécharger le scénario original. Cliquez sur l'image.

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Sam Peckinpah sur le tournage. DR.

10/10/2019

L'espace d'un instant secret

Cinématique des muses, un livre de Ludovic Maubreuil (Editions PGDR)

J'ai passé l'été avec vingt actrices remarquables, pas sur un écran pour une fois, mais dérivant avec délice au fil des pages du nouvel ouvrage de Ludovic Maubreuil, Cinématique des muses. Catherine Spaak, Claude Jade, Elsa Martinelli, Marie-France Pisier, Geneviève Bujold... elles ont toutes illuminé les écrans le temps d'une génération et d'un cinéma dont on sent bien aujourd'hui combien il manque. La muse inspire le poète avec ce que cela comprend de part de mystère, d'espaces troubles et fascinants où l'imagination, le rêve et le désir peuvent s'engouffrer. Au cinéma, sur l'écran, la muse s'incarne. C'est un corps, une voix, un pas, une attitude, un regard, un port de tête, un silence. Une femme. Les muses cinématographiques de Ludovic Maubreuil ont inspiré de grands cinéastes, de moins grands et d'obscurs. Mais toujours elles ont su toucher quelque chose de profond dans les spectateurs que nous sommes, amoureux sombrant sans regret dans leur sillage lumineux. Sur les pas de Luc Moullet et de sa Politique des acteurs (Cahiers du Cinéma, 1993), Maubreuil adopte une attitude de traverse. Ses vingt actrices, soigneusement choisies d'un élan que l'on devine du cœur, ont fait œuvre de leur présence à l'écran, déclinant leur essence au-delà des personnages issus des scénarios auxquels elles ont donné vie, en parallèle des visions et fantasmes qu'elles ont suscité chez leurs metteurs en scène. Ce n'est pas leur talent de comédienne, au sens technique, qui compte ici, même s'il est souvent remarquable, mais comme avec John Wayne ou Jean Gabin, cette faculté purement cinématographique d'une présence qui se joue à trois regards, celui de l'actrice, celui du réalisateur et celui du spectateur. Le nôtre.

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Chacune a son autonomie, douce mais résolue. Ludovic Maubreuil saisi leur essence par des phrases précises et poétiques à la fois : « Personne ne mérite vraiment Catherine Spaak » ; « Marie-France Pisier est de ce genre de femmes à qui l'on aime mettre des chapeaux » ; « Pour avoir une idée de la force d'âme, il suffit d'observer Ottavia Piccolo ». Et l'auteur est un observateur hors pair, un portraitiste délicat. J'aurais envie de citer toutes ces phrases qui sont à la fois hommage et définition, joignant l'amour du cinéphile à la rigueur du critique. Une encore sur Amanda Langlet chez Rohmer « Statue du Commandeur en maillot de bain bleu et blanc ». Certains de ces portraits ravivent des souvenirs de toutes celles dont on a croisé les « chères images aperçues  », passantes qui nous ont marqué quand tout le reste a été oublié. D'autres suscitent des évocations plus lointaines, comme un parfum longtemps oublié qui surgit à l'improviste. D'autres enfin sont de belles inconnues que l'on a envie de découvrir (pour moi : Cathy Rosier et Catherine Jourdan).

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Mais les muses de Ludovic Maubreuil ne sont pas de simples objets d'admiration. Leur évocation, au sens où l'on évoquerait des esprits bienveillants, fait resurgir tout un cinéma, celui dont je parlais en introduction, dont elles sont l'emblème d'audace et de liberté. Ce cinéma, surtout concentré dans les années soixante et soixante dix avec de jolies embardées, est défendu avec passion par l'auteur. C'est un cinéma aux bras grands ouverts, des films devenus cultes comme Les Yeux sans visage (1960) de Georges Franju aux explorations érotiques d'Alain Robbe-Grillet ou Walerian Borowczyk, d’œuvres majeures comme avec François Truffaut ou obscures comme Les Jambes en l'air (1970) de Jean Dewever, des fleurons du cinéma de genre signés Dario Argento ou Lucio Fulci au cinéma grand public des Aventuriers (1967) de Robert Enrico, des francs nanards comme T'es folle ou quoi ? (1981) aux œuvres télévisuelles, parfois superbes comme L'Île aux trente cercueils (1979). Au-delà des apparitions, même fugaces, des muses, tous ces films ont en commun l'expression d'une liberté dans leur pratique. Quelque chose d'une sincérité qui résiste aux approches commerciales comme au manque d'ambition parfois, un territoire à explorer sans se sentir tenu à l'air du temps où aux conventions du moment. « Mon amour du cinéma est plus fort que toute morale » disait Alfred Hitchcock. C'est le chemin qu'empruntent, guidés par leurs muses, les cinéastes cités plus haut et quelques autres. Un chemin parfois périlleux si l'on considère celui que fît prendre Bernardo Bertolucci à Maria Schneider. Mais un chemin où le plus souvent elles ont été actives et attentives. Bien ou mal, elles nous ont offert des modèles, éclairé nos ignorances, suscité des élans, suggéré des façons de vivre et d'aimer. Cette générosité méritait un hommage à la hauteur. Il éclate ici à travers ces vingt portraits.

05/07/2018

Belles italiennes

Elsa Martinelli

Elsa Martinelli pose devant une Lancia Fulvia HF coupé sur le plateau du film Come imparai ad amare le donne (Comment j'ai appris à aimer les femmes, 1966) mis en scène par Luciano Salce où elle joue une pilote émérite, même devant les transparences. Photographie d'Angelo Frantoni. 

15/06/2016

Miroir

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Ann Sheridan. DR.

16/11/2007

Pas encore !

Cet article fait partie du Kurosawa blog-a-thon et inaugure une nouvelle rubrique que j’appelle « fascination » qui sera consacrée à des films qui exercent sur moi une forte attraction sans que je me l’explique toujours bien.

 

Le dernier plan du dernier film d’un grand réalisateur prend parfois une intensité particulière. On se souvient du « So long, you bastard » proféré par le personnage joué par Ann Bancroft dans Seven women (Frontière chinoise) ultime film de John Ford ; de ce plan de John Wayne, vieux mais toujours massif, s’éloignant de dos au bras d’une jeune femme balafrée pour refermer le Rio Lobo de Howard Hawks ; de la neige du plan final de The dead (Les gens de Dublin) de John Huston. Le souffle est suspendu quand on pressent que le réalisateur, à ce moment précis, était pleinement conscient de tourner sans doute pour la dernière fois. Et j’aime à penser qu’il nous laisse à ce moment un petit quelque chose d’essentiel. L’un des plus beaux derniers plans que je connaisse est celui du Madadayo d’Akira Kurosawa.

La carrière d’Akira Kurosawa connaît une brutale embardée dans la seconde moitié des années 60. Il se fâche et rompt avec son acteur fétiche, Toshiro Mifune à l’issue du tournage de Barberousse en 1965 puis il échoue sur le projet américano-japonais qui donnera Tora ! Tora ! Tora ! en 1970, un film racontant la bataille de Pearl Harbour vu des deux côtés. Enfin, à la recherche de l'indépendance, il s'associe avec Kon Ichikawa, Keisuke Kinoshita et Masaki Kobayashi pour créer une société de production. Le premier film produit en 1970 est son ambitieux projet sur les quartiers pauvres de Tokyo, Dodeskaden, qui est aussi son premier film en couleurs. Le film a beau être une merveille, il est rejeté par la critique comme par le public. Kurosawa en sera si déprimé qu'il fera une tentative de suicide et mettra des années à remonter la pente.
 

Je vois les vingt années qui vont suivre comme une longue marche pour retrouver confiance en lui, dans un premier temps, puis pour reconquérir la position qui lui avait valu le surnom de « L'empereur ». Ce sera Dersou Ouzala en 1975, film de la renaissance tourné grâce à une production soviétique, puis Kagemusha en 1979 et Ran en 1985 qui se font grâce à ses admirateurs occidentaux (Coppola, Lucas, Silberman). Ces deux films sont passionnants à voir sous l'éclairage de la vie de leur auteur. Mais malgré leurs qualités, ils forcent le respect au sens littéral et je n'y retrouve pas la puissance ni le souffle qui traversent les oeuvres phares de la grande époque. Les trois films suivants donnent l'impression que Kurosawa n'a désormais plus rien à prouver et peut se laisser aller à des choses plus détendues et plus personnelles. Ce faisant il retrouve la grâce et Madadayo en est le point d'orgue.
 

Madadayo, c’est un peu l’illustration de la maxime de Brassens « Gloire à qui n’ayant pas d’idéal sacro-saint se borne à ne pas trop emmerder ses voisins. » A travers le portait de ce professeur d’allemand, monsieur Uchida joué par Tatsuo Matsumura, Kurosawa fait passer tout en douceur sa philosophie de la vie. Deux ou trois choses qui lui semblent importantes à 83 ans. Le conte est délicieux. Le professeur Uchida prend sa retraite et ses étudiants qui lui sont très attachés organisent chaque année une soirée en son honneur. Un rituel s'installe. Après de nombreuses libations et chants, les étudiants lui demandent à l'issue d'un discours : « Maada kai? » (êtes vous prêt ?), à quoi le professeur répond invariablement « Madadayo !» ( Pas encore !). Pas encore prêt à mourir, pas encore prêt à quitter une vie dont il essaye en véritable épicurien de savourer tous les aspects. Ce qui n'est pas toujours facile. Uchida traverse l'histoire récente du japon ainsi que celle de son créateur. Il prend ainsi sa retraite en 1943 alors que la guerre fait rage, date à laquelle Kurosawa réalise son premier film. Et Madadayo est ainsi nourri de nombreuses références. Il est à la fois un autoportrait, la description d'un idéal et un bilan sur ce que Kurosawa, l'homme et le réalisateur a pu réaliser de cet idéal. Il est aussi un condensé de ce que son auteur aime faire : tournage en studio, photographie chaude qui rappelle parfois les expériences de Dodes'kaden, ruptures de ton, jeu sur le temps, art du cadrage.

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Structuré autour des fêtes, le film est composé de scènes souvent drôles comme la façon dont le professeur reçoit les cambrioleurs ou son installation juste après la guerre dans une maison qui n'est qu'une toute petite cabane. Il y a également l'incroyable histoire autour de la disparition de son chat que seuls ceux qui n'ont jamais perdu leur félin favori ne peuvent comprendre. Kurosawa se permet ici une très longue scène pour de nous parler du sentiment perte, non sans humour mais aussi avec une véritable émotion. Dans ces moments, je me souviens de l'admiration de Kurosawa pour John Ford et je retrouve chez le japonais ces moments que l'américain aimait à faire durer pour le pur plaisir du cinéma. Cette faculté qu'ils partageaient de faire passer des sentiments universels et forts dans des actes familiers. Les séquences des fêtes sont elles des morceaux de bravoure chorégraphiés avec précision qui rappellent que Kurosawa est un grand metteur en scène de groupes. J'y avais retrouvé aussi cette atmosphère particulière des films d'Ozu quand il montre les hommes se retrouvant entre eux pour boire et causer. Mais le sentiment de tristesse qui domine chez Ozu n'est pas de mise ici. Le plus détonnant dans ce film, c'est l'optimisme que Kurosawa a décidé d'afficher.
 

Madadayo est film tout en humanité et en finesse. Les rapports entre Uchida et sa femme par exemple passent par quelques gestes, quelques regards et une présence mutuelle qui savent traduire la profonde complicité entre eux. Uchida, en bon professeur, essaye de transmettre son savoir à ses élèves et après l'allemand, il leur parle de ce qui lui semble essentiel. Mais toujours la leçon s'accompagne de l'humour et de l'exemple. Il y a chez Uchida du Ponocrates comme du Falstaff, il porte un message, une méthode mais sait rester à hauteur d'homme avec ses ridicules, ses faiblesses, ses chagrins et ses débordements joyeux.
 

Je parlais en introduction de fascination. Ce film me fascine par sa simplicité apparente, par sa profondeur tranquille et par sa complète liberté. Liberté de ton et liberté dans la forme. Il fait naître en moi ce sentiment fort que j'aime entre tous, l'envie de faire partie du groupe humain sur l'écran. Je sais aussi que le sentiment de grâce que je ressens à sa vision est ténu, fragile et peu partagé, ce qui me le rend plus précieux. Lorsque le film se termine, à l'issue d'une nouvelle soirée bien arrosée, le professeur Uchida s'est endormi. « Il doit faire des rêves en or » dit l'un de ses fidèles étudiants. Et Kurosawa, pour ses dernières images nous entraîne dans ce rêve. Uchida se revoit enfant, il joue à cache-cache. « Maada kai? » lui crient ses camarades. Et dans un champ de blé, Kurosawa filme admirablement les champs, à l'abri d'une meule, un petit garçon crie « Madadayo !». Puis face au soleil qui se couche, il se dresse dans la lumière dorée. Et il admire. Si vous ne ressortez pas de là réconcilié avec le monde et la vie...

Le DVD

Le film vu par Mathieu Perrin

Le film sur Shangols

Une fichedu film avec un entretien de Kurosawa

Affiche d'Akira Kurosawa