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15/10/2008
Beaux mecs
Je suis plutôt du même avis qu'Edouard Waintrop à propos de Paul Newman. L'homme semblait estimable, le réalisateur intéressant et l'acteur séduisant. Difficile de ne pas l'aimer, mais tout aussi difficile de l'admirer vraiment. Je veux dire par là que quand on regarde sa filmographie, on constate que s'il y a beaucoup de films plutôt réussis, il n'y a pas, je n'y vois pas, l'équivalent de Vertigo pour James Stewart ou de The searchers pour John Wayne. Paul Newman a surtout travaillé avec des metteurs en scène comme George Roy Hill, Martin Ritt, Stuart Rosenberg ou Jack Smight, auxquels on pourra trouver des qualités mais qui ne sont pas exactement des foudres de guerre. Comme plusieurs acteurs de sa génération, Robert Redford et Warren Beatty par exemple, Newman a tiré tout le partit possible de son statut de star et c'est lui qui imposait souvent son point de vue aux réalisateurs. Tout à son image, il a refusé ou négligé ou manqué de se confronter à des metteurs en scène d'un autre calibre. Dans les hommages qui lui sont rendu, on mentionne souvent sa collaboration avec Alfred Hitchcock. Certes, mais on oublie trop vite que Torn Curtain (Le rideau déchiré – 1966) correspond à une période creuse du maître dont le chef opérateur préféré vient de mourir, que le studio oblige à désavouer la partition de Bernhard Hermann, son alter-ego musical, et qui lui impose deux stars, Julie Andrews et Paul Newman. Rendez-vous manqué. La carrière de Newman finalement lui ressemble, assez lisse, séduisante mais sans fièvre, comme ces rencontres dans les superproductions avec ses pairs, Redford ou McQueen. De la belle mécanique et ce sourire charmeur toujours un peu lointain. Reste quand même ses rôles chez Richard Brooks et surtout chez John Huston. Sa composition en juge Roy Bean, truculente, reste pour moi ce qu'il aura fait de meilleur avec ses seconds rôles pour les frères Cohen et Sam Mendes. Et puis encore, Newman réalisateur, comme Redford ou Beatty, est intéressant. Plus en tout cas qu'un John Guillermin.
Guillaume Depardieu, je ne sais pas trop quoi en dire. Sa vie privée ne me regardant pas, je suis assez irrité par cette façon que l'on a d'essayer d'en faire une sorte de mythe tragique. James Dean, Rimbaud, Marie Trintignant et pourquoi pas Che Guévara, un véritable concours de la comparaison la plus ridicule. Comme acteur, je l'ai vu et aimé chez Corneau, Carax et Rivette. Dans Ne touchez pas la hache, dès ces premiers plans dans l'église, il dégage une force physique et fragile, accentuée par sa claudication, qui le fait entrer dans le cercle restreint des acteurs à la pure présence cinématographique. Chose que son père avait du mal à faire, sauf chez Truffaut. Il rejoignait alors pour moi les Jacques Gamblin, Frédéric Pierrot ou Grégori Derangère, et de ce point de vue, il me manquera. Je suis donc très heureux que plusieurs blogs que j'aime bien aient choisi cette photographie pour lui rendre hommage.
23:27 Publié dans Acteurs | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : paul newman, guillaume depardieu | Facebook | Imprimer | |
Commentaires
Pour moi le Vertigo de Newman, c'est L'Arnaqueur sans aucun doute. Mais ne l'ayant pas revu depuis longtemps, je manque peut-être un peu de recul...
Écrit par : tepepa | 16/10/2008
Guillaume Depardieu était aussi très bien chez Pierre Salvadori... Mais sur le fond, je suis plutôt de ton avis.
En revanche, j'aimerais beaucoup découvrir les films de Newman réalisateur...
Écrit par : Dr Orlof | 16/10/2008
De l'influence des rayons gamma... est un très beau film, porté par une actrice bouleversante: sa femme. un peu du Cassavetes en plus classique.
j'en parlerai peut-être sur mon blog.
Écrit par : Christophe | 17/10/2008
"L'arnaqueur" fait certainement partie de ses meilleurs films. Je l'aime bien aussi dans ses polars décontractés et dans... "la classe américaine".
Le film dont tu parles Christophe, je ne l'ai pas vu mais il m'attire beaucoup. Je crois qu'il l'on ressortit récemment. J'ai un très bon, mais lointain souvenir du "Clan des irréductibles". A priori, chaque fois qu'il a filmé sa femme, c'était intéressant.
Sinon, pour faire "Vertigo", il faut quand même un mélange d'expérience, d'image et de fragilité que Newman à l'époque du film de Rossen n'avait pas.
Depardieu chez Salvadori, tu n'es pas le premier à en dire du bien, mais cela fait partie de ses films que je n'ai pas vu. Que de lacunes...
Écrit par : Vincent | 17/10/2008
Soyons honnêtes. Ce ne sont pas les studios qui ont forcé Hitch à refuser la partition du maître pour The torn curtain. C'est Hitch lui même qui désavoua la partition car il la trouvait trop sinistre, pas assez moderne, pas assez jazz. Hermann qui avait son petit caractère ne pardonna pas au Gros cette trahison et la brouille qui suivit fut hélas définitive.
Écrit par : sonic eric | 18/10/2008
Cher Sonic, le livre de Donald Spoto est assez précis sur ce triste épisode. Hitch traversait une période de crise, il prenait de l'age et, en proie au doute après l'échec de "Marnie", il était en position de faiblesse par rapport aux pressions et aux "conseils" que le studio prodigue toujours. Qu'il ait finit par désavouer Hermann est un fait, mais je pense que cela résulte plus de ces pressions que d'un choix artistique déterminé. Peut être pensait-il qu'en acceptant un projet ficelé (stars, musique moderne, best seller) il pourrait se remettre en selle. Qui qu'il en soit, c'est une histoire triste.
Écrit par : Vincent | 18/10/2008
Ah "Ne touchez pas à la hache"... Hormis que les robes Empire sont merveilleusement portées par Jeanne Balibar, Rivette et Depardieu confirment ce que notre metteur en scène de théâtre nous affirme :
"Quand tu fais jouer un rôle d'homme à une femme ou de vieux à un jeune, il suffit de le dire (astucieusement, par un artifice de mise en scène, une réplique...) d'entrée au public, qui, ainsi, l'accepte et n'est plus gêné pour la suite des événements."
Dans mon souvenir, dans le film de Rivette, à peine apparu à l'écran, Depardieu manque de se casser la gueule sur les marches de l'église. Voilà, ça, c'est fait : l'homme a une jambe amputée, le rôle a été blessé à la guerre. On n'en parle plus, on l'accepte et on va pouvoir apprécier le film en entier.
Et quel film ! Et quel(s) acteur(s) !
Écrit par : il Gatto del Rabbino | 20/10/2008
Bonsoir, billet intéressant sur Paul Newman (dans l'ensemble, je suis d'accord). Etant du sexe féminin, j'avais 12 ans quand j'ai découvert P Newman : ce n'est pas son talent d'acteur que j'ai admiré mais son physique. C'était vraiment un beau gars (comme aurait dit ma mère). Je reconnais que ce n'était pas l'acteur du siècle et il n'a joué dans aucun chef d'oeuvre mais c'était Paul Newman. Quant à Guillaume Depardieu, en dehors du film de Corneau "Tous les...", je l'ai apprécié dans le Rivette et Versailles (deux rôles aux Antipodes) mais il était très bien. Il n'a certainement pas eu la carrière qu'il aurait dû. En tous cas, merci et bonne soirée.
Écrit par : dasola | 28/10/2008
Bonsoir, Dasola, je n'étais pas très présent ces derniers jours, plongé dans la manifestation que j'organise. Je vous remercie pour votre réaction, d'autant que je pensais en écrivant à une de mes amies qui adore (ait) Paul Newman pour les mêmes raisons. Mais après tout, ça fait partie du plaisir du cinéma. A bientôt.
Écrit par : Vincent | 30/10/2008
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