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10/09/2019

Il était une fois...

Belle archive de la RTS (Radio télévision Suisse". Sergio Leone parle de son film C'era una volta in America (Il était une fois en Amérique, 1984) dans un français impeccable. Entretien mené par Christian Defaye pour l'émission Spécial Cinéma du 14 mai 1984.

22/12/2014

1972 en 10 (autres) films

Belle année de cinéma que 1972 comme le montre la rétrospective de l’équipe de Zoom Arrière. Une année où se côtoient les maîtres au sommet de leur art (Buñuel, Fellini, Pasolini, Bresson, Rohmer, Kubrick, Peckinpah, Leone, Cassavetes...), l'explosion du nouvel Hollywood avec Coppola, Bogdanovich, Friedkin, Ritchie, Sarafian, Pollack entre autres, et un cinéma de genre toujours dynamique et inventif avec les films de Martino, Baldi, Siegel, Ho, Sasdy, Hough ou Carnimeo. Comme le montre avec limpidité l'éditorial en images d’Édouard, la violence est la caractéristique majeure de l'époque, se déclinant de multiples façons et en repoussant chacune à leur façon la représentation. Le sexe n'est pas en reste, se mêlant à la violence pour secouer le spectateur dans des scènes qui vont marquer l'imaginaire et provoquer la polémique comme les viols de Deliverance et A clockwork orange (Orange mécanique), les rapports sado-masochistes de Lo strano vizio della Signora Wardh (L'Étrange Vice de madame Wardh) ou La cagna (Liza). Rien n'est plus sacré, Marlon Brando passe le beurre et John Wayne se fait tuer dans le dos par un affreux chevelu. Voici dix film qui participent de cette année exceptionnelle. Photographies DR.

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19/08/2014

1969 (Quand parle la poudre)

C'est partit pour un retour en 1969 sur Zoom Arrière avec un éditorial ébouriffant de Frédérique. Sacrée belle année de cinéma dans les salles françaises pour clore la décennie. Il y a en ce qui me concerne une demi-douzaine de films de chevet, signés Truffaut, Leone, Peckinpah, Edwards, Corbucci ou Molinaro, et un cinéma venu des quatre coins du monde qui offre des œuvres majeures des cinéastes Rocha, Rohmer, Tarkovski, Costa-Gavras, Bunuel, Fischer, Ferreri, De Toth, sans compter tous ceux que je n'ai pas vus mais dont mes camarades disent tant de bien.

Ce qui me frappe pourtant, c'est l’impressionnante concentration, façon feu d'artifice, de westerns de haut vol. Le western à l'italienne offre aux français une sorte de bouquet final par le jeu du hasard des dates de sortie. Nous verrons donc, concentrés sur douze mois, l'aboutissement des œuvres des trois Sergio, Leone, Corbucci et Sollima. Le premier donne son film le plus ambitieux et rend hommage à John Ford en filmant quelques plans à Monument Valley même tout en pervertissant l'image des yeux bleus du "all american" Henry Fonda. Le second va au bout de sa veine nihiliste et sarcastique avec l'aide d'un Jean-Louis Trintignant aussi mutique qu'il était bavard à Clermont-Ferrand. Le troisième concentre sur les écrans sa trilogie politique avec Tomas Milian, royal en paysan frustre, rebelle et débrouillard. Derrière eux, comme l'écume, plusieurs films de belle tenue qui témoignent de la vitalité d'un cinéma de genre sur le point d'entrer en décadence.

Et, comme un passage de témoin, aux États-Unis, Sam Peckinpah remis de ses déboires avec les producteurs, peut réaliser avec The wild Bunch, le film du grand retour du western au pays natal. Clôturant dans le sang et la poudre des années soixante déprimantes, il reprend le genre là où l'avait laissé Ford dans The man who shot Liberty Valance (1962) et y intègre tout ce qui est né de formel du passage en Europe en y réinjectant le regard moral et humaniste des grands classiques américains. L'hommage à Ford ne passe pas comme chez Leone par le symbole mais par un état d'esprit. Dit autrement, ses Deke Thornton et Pike Bishop sont de la même trempe que Tom Doniphon et ce dernier, quand il s'efface, pourrait bien être partit pour le Mexique. Ce faisant, le grand Sam ouvre la porte à un nouveau western américain qui donnera de belles choses dans les années soixante-dix. Comme un échauffement, Sydney Pollack trousse un aimable Scalphunters.

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Photographies DR

 

19/06/2014

Bande annonce

Magnifique bande annonce composée d'extraits de tournage du premier volet Per un pugno di dollari (Pour une poignée de dollars - 1964) pour la ressortie des trois westerns du maestro Sergio Leone avec Clint Eastwood. Un document pour l"histoire. A noter le titre de tournage : Il magnifico straniero.

18/06/2014

Le trio infenal

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De retour en version restaurée par la Cinémathèque de Bologne

14/05/2014

Mais qu'est-ce que je vais bien pouvoir leur raconter ?

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L'angoisse du metteur en scène avant le plan

Sergio Leone et son équipe en pleine attente sur le tournage de Per un pugno di dollari (Pour une poignée de dollars - 1964). Clint Eastwood n'était pas réveillé ? DR

31/12/2013

1961 en 10 (autres) films

Pour bien fêter la fin d'année, permettez moi de vous offrir un bilan de l'année... 1961 telle qu'explorée par l'équipe de Zoom Arrière. 1961, Ce sont Rocco, ses frères, Lola, les héros urbains de Samuel Fuller, Mabuse, les jardins étranges de Resnais et les Désaxés de Huston. Mais 1961, belle année finalement, grâce à l'Europe, le Japon et les outsiders américains, ce fut aussi l'année de la découverte tardive d'un film précieux d'Ingmar Bergman avec le visage de Eva Henning, de Spartacus, de la première mise en scène de Jerry Lewis dans un palace, d'un vélo d'appartement et d'une engueulade en Série Noire, de Claudia Cardinale toujours resplendissante, de Charlton Heston héroïque au possible, d'un loup-garou anglais, d'un Colosse à Rhodes et d'une belle Oldsmobile branquignolesque, tandis que perché sur sa tour, le guerrier solitaire attend de donner l'inspiration à un Sergio romain. Photographies DR piquées un peu partout.

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ingmar bergman,jerry lewis,stanley kubrick,robert dhéry,akira kurosawa,anthony mann,sergio léone

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10/09/2010

Mauvais souvenirs - Partie 2

On est parfois trahi par soi-même. Ma plus douloureuse expérience physique, je la dois à une séance hélas inoubliable du Casino (1996) de Martin Scorcese. C'était une séance du dimanche matin. Je tenais à voir le film mais, la veille, j'étais souffrant ou j'avais un peu trop bu, je ne me souviens plus. Ce dont je me souviens bien, c'est que j'avais les entrailles tordues pire que John Hurt dans le Nostromo. Le problème, c'est que le film dure pas loin de trois heures et qu'il est bon. Enfin, j'étais complètement accroché. Pas question donc de m'interrompre pour filer aux toilettes et manquer un plan. En fait, vu le montage de Scorcese, c'est un paquet de plans que j'aurais manqué à chaque interruption. Je me suis donc accroché, m'agitant dans mon fauteuil comme un ver, développant un mal de tête carabiné, les yeux brûlants, pleurants. Je suivais le film avec rage. Tenir, il faut tenir, comme un marines rampant sur Omaha Beach, j'ai tenu. A quel prix, je n'ose le dire. C'était une expérience limite dont je ne sais finalement pas trop comment elle a influencé ma vision du film. Mais maintenant, quand je suis malade, je reste chez moi.

Pour rester sur l'exploit physique, il y a eu, mais c'est devenu rare, l'état des fauteuils. A Nice, au milieu des années 80, nombre de petites salles ont fermé. Elles vivotaient et ne faisaient aucun investissement en terme de confort. J'ai un souvenir très vif d'une séance de C'era una volta il west (Il était une fois dans l'ouest – 1968) de Sergio Leone au cinéma Ritz sur la zone piétonne. C'était un cinéma avec trois salles, dont une était consacré au porno et les deux autres oscillaient entre semi-exclusivités et reprises parfois incongrues comme un peplum de Vittorio Cottafavi qui n'est pas à sa gloire. Cette fois là, c'était le Leone et un Leone en salle, ça ne se refuse pas. Problème, le Ritz avait des fauteuils assez anciens, épais, marrons, imitation cuir avec la rudesse d'un parpaing. Supporter les presque trois heures (encore) du film sur un tel fauteuil relève de l'exploit vertébral. Cette fois aussi, j'ai tenu (quel héros !) mais ce fut rude d'autant que la copie n'était pas de la première fraîcheur. Rayures, coupes sauvages, fin et début de bobines hachés, son pourri, de quoi se réjouir de voir le film dans la superbe édition DVD qui lui a été consacrée et renier ces fichues salles de quartier. Mais qu'est-ce que je dis moi ?!

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Au seuil du multiplexe. Photographie source : Film reference

J'ai vécu l'enfer du multiplexe. Si. J'en avais eu un avant-goût en Belgique, pour une séance en IMAX, assez spectaculaire pour que j'oublie l'environnement. Mais mon expérience avec film s'est faite sur un redoutable navet. Je me suis laissé convaincre par ma compagne et sa soeur d'aller à une séance du samedi soir d'un multiplexe varois pour The Avengers, la version cinéma de Chapeau melon et bottes de cuir réalisée en 1998 par Jeremiah S. Chechik. C'étaient les vacances, nous étions en famille, je suis un admirateur de la série télévisée et des tenues cuir d'Honor Blackman puis de la divine Mrs Peel, je ne me suis pas trop fait prier. Le problème, c'est l'environnement. La salle est située au coeur d'une zone commerciale, le genre d'endroit que j'évite autant que possible. En face, un grand parking. De l'extérieur on dirait un hangar. A l'entrée, on se croirait face à une batterie de caisses d'hypermarché. Il y a des vigiles et j'imagine, des caméras de surveillance. J'ai surtout été heurté par la vision d'un vigile avec son chien, une de ces grosses bestioles que je déteste genre molosse. Mais qu'est-ce que ça vient foutre au milieu d'une salle de cinéma !? Dedans, c'est code couleurs a tous les étages, ça ressemble à tout, ça ne ressemble à rien. La salle est confortable, certes ce ne sont pas les sièges du Ritz, mais pour accéder à sa place, il faut marcher sur un tapis, un véritable tapis de pop-corn, de gobelets de papier, de sachets en tout genre. Immonde. En Hollande, je me souviens des canettes de bière en verre qui roulaient sous les sièges, mais il y avait une ambiance bon enfant et puis la salle était jolie. Misère. Avec ça, le film a été une déception terrible malgré Uma Thurman qui prenait la pose. Sean Connery cabotinait tant et plus, Ralph Fiennes était transparent, le film était raté dans les grandes largeurs. Jamais remis les pieds dans un endroit pareil. C'est peut être l'âge mais je m'y sens trop oppressé, l'odeur du pop-corn m'écoeure, l'horreur, l'horreur...

Ceci dit, on peut se heurter à d'autres problèmes dans les salles dignes de ce nom. Je ne compte plus les copies douloureuses, les mises au point hasardeuses, les lignes jaunes (blanches ou vertes) baladeuses et le son réglé comme il peut. Dans cette catégorie j'ai une affection toute particulière pour une projection de Dracula, prince of darkness (Dracula, prince des ténèbres – 1966) du grand Terence Fisher, projection à la cinémathèque de Nice que je vénère par ailleurs. Les films estampillé Hammer, c'est pas tous les jours que l'on a la chance de pouvoir les voir en salle, surtout en province. L'occasion était belle et si ce souvenir m'est pénible, c'est qu'il était associé à un grand espoir. Le film commence, grand écran, Techniscope sur toute la largeur, couleurs impeccables rendant pleine justice à la photographie de Michael Reed. Le film semblait avoir été tourné la veille. Pendant une vingtaine de minutes, c'est le bonheur. Deux couples se retrouvent dans un étrange château, l'un d'eux s'engage dans les couloirs sombres et puis patratas, Dracula est là, bagarre, Dracula tombe dans les douves gelées du château, il meurt, The end. Au bout de trente minutes ? Tiens non, nous revoilà ailleurs, Dracula ressuscite un peu plus tard. C'est le bon vieux coup de l'inversion de bobine. Sauf que cette fois, mis à part la première, aucune autre ne sera à sa place. Un vrai loto. Impossible de comprendre quoi que ce soit, pourtant, ce n'était pas non plus du Bergman. Un ami, un véritable fan, est ressortit en maudissant le projectionniste. Moi j'y suis retourné le dimanche suivant. Nous étions invités.

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Pauvre bête ! (Photographie source Nova)

Parmi les mauvais souvenirs, il y a les films qui mettent mal à l'aise. Généralement, c'est voulu. Haneke le fait exprès. C'est pour secouer un peu le spectateur. Ça peut faire du bien mais il y a la manière. J'ai aimé être secoué par Oshima ou Pasolini et pourtant il y eu des séances terribles. Avec le temps, j'ai compris que je suis mal à l'aise quand il y a un brouillage entre la fiction et le réel dans le cadre d'une fiction. Typiquement, certaines scènes de sexe, quand je n'ai plus l'impression qu'elles sont jouées (hors films érotiques) peuvent me mettre mal à l'aise. J'ai beaucoup de mal aussi avec des scènes où les personnages se font faire une piqûre, que se soit pour se droguer, se soigner ou se faire tuer. Il faut dire que j'ai une sainte aversion pour les seringues. J'ai aussi un peu de mal avec la façon dont on traite les animaux. Le cafard de Leone et les poulets de Peckinpah (même si on les voit ensuite rôtis et mangés) me font tiquer. J'avais ainsi beaucoup souffert sur un film tchécoslovaque Konec srpna v Hotelu Ozon (Fin août à l'hôtel Ozone – 1966) de Jan Schmidt. On y suit les déambulation d'une dizaine de jeunes femmes dans un monde apocalyptique d'où les hommes ont disparu, ou presque. L'ambiance n'est pas folichonne mais bon. Le problème, c'est que les donzelles rencontrent au long du scénario divers animaux grandissant en taille et se rapprochant de l'homme (d'où allégorie) et qu'elles ont la sale manie de les tuer. La sale manie du réalisateur, c'est de le montrer en détail avec un sadisme d'autant plus gênant qu'il n'est pas truqué. Au début, c'est une mouche ou une araignée, on passe. Puis c'est un serpent écrasé par une pierre. Je m'agite un peu. Quand on passe à la vache puis au chien, ça commence à bien faire. J'imagine que c'était voulu mais j'ai passé un moment très pénible.

Je terminerais par un petit gars bien de chez nous, Gaspard Noé avec son incontournable Irréversible (2001). Là encore, j'imagine que le sale goût dans la bouche quand on ressort est prévu avec le film. Mais en ce qui me concerne, ce n'est pas tant le fond qui m'a gêné (j'en ai vu d'autres), que la forme. La scène du viol du personnage de Monica Bellucci aurait suffit à me faire détester le film, en partie à cause de ce que j'ai écrit dans le paragraphe précédent, en partie parce que c'est interminable et que, comme chez Haneke, je n'avais qu'une hâte, c'est qu'ils en finissent. Mais le plus éprouvant, c'est la première scène, celle du night club, encore une fois pas tant pour sa violence que pour son traitement. La musique techno à fond, les flashs rouges et les effets de stroboscope, c'est juste pas possible. Au bout de cinq minutes, j'aurais avoué tout ce que l'on voulait. C'est le film, en tant qu'objet, le plus agressif que j'ai jamais vu. Je ne vois pas au nom de quoi je devrais endurer un truc pareil. J'ai rien fait, j'le jure. Mais je suis maso, j'ai repris un morceau de Noé dans le film à sketches Destricted (2006), même mise en scène avec les mêmes effets. Là, j'étais prévenu, j'ai réussi à me mettre dans un état second. De temps en temps, j'ouvrais un oeil et je vérifiais si le cauchemar ne s'était pas achevé.

24/03/2010

Les joies du bain

Charles Tatum a ses hotties reading, Peter Nellhaus a ses coffee break, je voulais, moi aussi, commencer une collection qui me permette de satisfaire aux instincts les plus fétichistes de ma cinéphilie. Ce sera donc les joies du bain, le plus régulièrement possible et dans toutes les baignoires possibles. Pour commencer, un classique : Claudia Cardinale avec sa brosse et sa mousse dans C'éra una volta il west (Il était une fois dans l'Ouest – 1968) de Sergio Leone. Capture DVD MGM.

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05/11/2009

Il était une fois... La Révolution

Pour l'occasion de la ressortie du film, un texte écrit pour le site Kinok, illustré des photographies de la Cineteca Bologna tirées de leur joli dossier de presse cannois, le tout amicalement dédié à Tepepa dont l'article sur les petites choses dans... m'avait alors donné très envie de revoir le film et ne cesse de m'inspirer. Merci aussi à Benjamin pour ses remarques orthographiques.

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Juan et John. John et Juan. Johnny et Johnny. Mexique et Irlande. Mitrailleuse et nitroglycérine. Mao. Les fourmis. La diligence. Le pont. Les fosses. El gobernador. Mèche courte. La banque. Le train. Bakounine. Les violons lancinants d'Ennio Morricone sur la voix obsédante d'Edda Dell'Orso. Sean, Sean, Sean... Il était une fois... la révolution.

Étonnant destin que celui de Giù la testa ! L'œuvre clef de Sergio Leone sortie en 1971 et qui revient aujourd'hui sur les écrans dans une très belle copie restaurée par la Cinémathèque de Bologne et distribuée chez nous par Carlotta. Au départ, Leone ne devait pas faire ce film. Après le succès de C'éra una volta il West (Il était une fois dans l'Ouest – 1968), il revient à sa baleine blanche, l'adaptation du roman autobiographique The hoods de Harry Grey. Mais le montage du film est difficile et Leone ne parviendra à ses fins qu'en 1984 avec Once upon a time in America (Il était une fois en Amérique). Pour l'heure, le western italien amorce sa décadence avec le triomphe inattendu des deux Trinita d'Enzo Barboni. Leone s'est mis à la production et décide de monter un western Zapata, un de ces films qui se passent dans le Mexique des années 1910 secoué par les révolutions. Un bon prétexte pour des films d'aventures hautes en couleur qui permettent à des réalisateurs comme Damiano Damiani, Sergio Corbucci ou Giulio Petroni de filer la métaphore sur la situation politique explosive de cette période de la fin des années 60. Ces films, Quien sabe (1966), Il mercenario (1968), Companeros (1970) ou Tepepa (1968) sont des réussites et plaisent au public.

Leone a bien sûr son idée et elle est ambitieuse. Il utilise la trame classique de la confrontation entre un occidental, un spécialiste, théoricien, intellectuel un brin cynique, et un peon Mexicain frustre, naïf et généreux, un peu bandit. Pour les jouer, il pense à Malcolm McDowell et Jason Robards, puis Eli Wallach, avant qu'un accord se fasse sur Rod Steiger et James Coburn. Il veut un metteur en scène américain. Une première expérience avec Peter Bogdanovich est un échec complet et Leone le renvoie en Amérique. Il pense ensuite à Sam Peckinpah qui accepte. C'est alors que United Artists, son partenaire outre-Atlantique, traîne des pieds et Leone finit par comprendre qu'il y a complot. Une semaine avant le début du tournage, il est mis au pied du mur : tout le monde, et depuis le début, voulait qu'il dirige le film. Ce qu'il va faire un peu en colère, mais à son inimitable manière.

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Pourtant, à bien y regarder, Giù la testa ! est sans doute son film le plus personnel. Celui qui se nourrit le plus de sa sensibilité d'homme et d'artiste. Celui dans lequel il se livre le plus, mettant en scène des souvenirs traumatisants de la seconde guerre mondiale, ses désillusions sur la politique, ses commentaires sur les années de plomb, ses conceptions de l'amitié et de l'engagement. C'est surtout son seul film dans lequel la forme ne prend pas le pas sur le fond, celui où la complexité des personnages et de leurs rapports prédomine sur la virtuosité de la mise en scène. Non que le style soit absent, bien au contraire, mais il se met au service d'une vision, d'une réflexion. Giù la testa ! acquiert ainsi une profondeur inédite, une émotion à vif qui va au-delà de l'aspect ludique de son premier peplum puis de la trilogie du dollar et du grandiose de C'éra una volta il West et Once upon a time in America nourris à l'opéra, au roman, et surtout à un ensemble complexe de références cinéphiles. Là encore il convient de nuancer. Émotion, richesse des caractères et notations personnelles ne sont pas absentes des autres films, mais elles ne sont pas centrales. Blondin, Harmonica ou Noodles sont des archétypes sublimes, mais restent avant tout des archétypes. Juan et John s'affirment, tout au long du film comme des êtres de chair et de sang. Peut-être que l'urgence dans laquelle Leone a dû écrire et tourner le film l'a empêché de donner la pleine mesure de son légendaire perfectionnisme mais que cela a libéré quelque chose de sa personnalité profonde.

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Au centre de Giù la testa ! Il y a l'amitié entre deux hommes. Juan le bandit pouilleux qui dévalise les diligences avec sa famille dont il ne connaît pas le nombre, et John, l'Irlandais en rupture de révolution, membre de l'IRA (qui n'existait pas à l'époque du film, mais passons...), venu au Mexique pour fuir la police britannique et le fantôme de son passé. L'amitié, la valeur à laquelle Leone semblait le plus attaché. Comme dans ses films précédents, elle vient de loin et naît sur des bases fragiles. La première rencontre entre les deux hommes s'étire sur près de trente minutes au cours desquelles Juan tire sur la moto de John tandis que John fait sauter la diligence volée par le peon. Des scènes de comédie où Juan voit en l'Irlandais un moyen de dévaliser la banque de Mesa Verde, son rêve, tandis que John voit dans le Mexicain crasseux un bel emmerdeur. Ce mouvement de Juan vers John s'inverse quand le révolutionnaire professionnel voit chez le bandit un bon moyen de parvenir à ses fins : organiser la libération des prisonniers politiques retenus dans la fameuse banque transformée en prison. John utilise alors Juan, cyniquement, et le transforme en héros de la révolution. Ce qui reste encore une bonne farce va se transformer en drame quand Juan se retrouve à payer au prix fort ce statut bien encombrant, au prix de toute sa famille exécutée en représailles.

La scène des grottes dans lesquelles nos deux héros découvrent les fils de Juan fusillés avec les autres révolutionnaires est le point clef du film. Le ton bascule avec la perte de l'innocence de Juan et la prise de conscience de John. Le film pénètre sans retour dans sa zone sombre en même temps que l'on entre plus profondément dans l'esprit de John qui comprend la nature de son amitié pour Juan au moment où il se rend compte le mal qu'il lui a fait. Cet état d'esprit ira jusqu'à cette ultime réplique, si belle, dite au moment de mourir : « Ah, mon ami, je t'ai vraiment foutu dans la merde ». Et le simple mouvement de dénégation du Mexicain vaut toutes les déclarations du monde.

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Cette histoire d'amitié prend une dimension supplémentaire avec l'histoire personnelle de John. Pour la première fois, Leone utilise ses légendaires flashbacks pour éclairer une personnalité et non pour justifier une action (La vengeance du colonel Mortimer ou d'Harmonica). John porte en lui un fantôme et son histoire est celle de la recherche d'une rédemption. En Irlande, John était un homme engagé. Il avait un ami et cet ami a trahi la cause. Il a parlé sous la torture. John l'a exécuté et il en porte désormais le remords. En Juan, il finit par retrouver quelque chose de cet ami tout comme les évènements mexicains l'amènent à revivre la trahison de l'ami avec celle du docteur Villega, le chef des révolutionnaires qui parle lui aussi sous la torture. John en est le témoin mais cette fois il est capable de compassion : « Je ne te juge pas Villega, Je l'ai fait une seule fois dans ma vie ». Il y a une très belle idée dans le film qui joue sur la sonorité des prénoms. L'avis de recherche que Juan découvre dans les affaires de l'irlandais est au nom de John Mallory. Quand Juan, qui ne sait pas lire, lui demande son nom, John, dans un instant d'hésitation, lui dit « Sean ». Comme le mexicain comprend mal, une ombre passe sur le visage de Mallory qui reprend « John », suscitant l'enthousiasme de Juan qui voit dans l'équivalent des prénoms un signe du destin. Cet échange accrédite le fait que Sean est le véritable prénom de John qui en a donné une traduction anglo-saxonne à Juan. Mais Leone enchaîne subtilement avec le premier des flashback irlandais illustré par le chœur « Sean, Sean, Sean » et Sean devient le prénom de l'ami assassiné et le signe du destin devient celui d'une seconde chance pour John. Leone développe ici une mise en scène qui joue sur plusieurs niveaux avec les images, la temporalité, la musique et les dialogues pour pénétrer l'intimité des personnages.

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L'autre aspect qui me semble essentiel, c'est ce que Leone livre de lui même. Un plan, somptueux, résume l'enjeu du film. Des dizaines d'hommes sont fusillés dans de longues fosses près d'une gare tandis que se prépare la fuite du dictateur. La caméra s'élève et panoramique au fur et à mesure que se déclenchent les mitrailleuses pour finir sur un train entrant au milieu d'une foule en pleine panique. Toutes les actions de ce tableau apocalyptique sont réglées au métronome. Dramatiquement, ce plan est quasi inutile. Mais il dit crûment, profondément, la morale Leonienne, l'horreur du meurtre de masse, de l'assassinat mécanisé. Il est le contraire du fameux plan au-dessus de la gare de C'éra una volta il West qui découvrait avec Claudia Cardinale un nouveau monde. Il renvoie bien sûr aux visions de la seconde guerre mondiale, les fosses de Babi-Yar et de Katyn, l'usine de mort nazie. Ces notations sont nombreuses tout au long du film, de l'extraordinaire gueule de nazi faite au colonel Gunther Reza joué par Domingo Antoine (pseudonyme du français Antoine Saint-John) à la séquence des grottes qui ramène au massacre des fosses ardeatines perpétré par les nazis près de Rome en 1944. Giù la testa ! est d'une violence à la limite de l'écœurement, traversé par des scènes d'exécutions et de massacres. Leone illustre littéralement la citation de Mao qui ouvre le film et nous rappelle que la révolution est d'abord un acte de violence. Il s'inspire du tableau de Goya Tres de mayo pour une longue scène nocturne de fusillades sous la pluie, à la lueur des phares de l'armée, splendidement éclairée par Giuseppe Ruzzolini. Et lors de la séquence du pont, lorsque John et Sean tendent une embuscade pour décimer les troupes de Reza, le côté spectaculaire, jouissif, que ressent le spectateur est contrebalancé par le montage très rapide du fidèle Nino Baragli qui enchaîne des plans très brefs de soldats qui tombent et dont on ne saisit que des fragments. L'excitation laisse progressivement place à une gène qui se transforme en stupeur face à la terrible explosion du pont. Et Leone achève de piéger notre désir en faisant suivre cette scène par la découverte des fils morts. Le sentiment de dégoût ne nous lâchera plus, comme il ne lâche plus les deux héros et c'est d'un geste plein d'amertume que Juan finira par abattre le dictateur.

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Tout cet arrière-plan exprime le pessimisme et la philosophie anarchiste de Sergio Leone. En 1971, trois ans après 1968, au cœur des années de plomb, au moment où tout une partie du cinéma se veut à la pointe de l'engagement, Leone montre, dans un film à grand spectacle, la désillusion de l'idéal révolutionnaire. A la remarque de John, l'occidental engagé « La révolution, ce n'est pas une plaisanterie », Leone, par la voix de Juan se lance dans une fameuse tirade énervée qui se conclut par ces fortes paroles « Et qu'est-ce qui arrive quand c'est fini, pauvre con ! Rien ! Tout recommence comme avant. ». A peine tempéré par le regard bleuté de James Coburn la force des mots touche juste. Symboliquement, John jette son livre, Le patriotisme de Bakounine, dans la boue et, tout aussi symboliquement, il est récupéré plus tard par le colonel Reza. Tout le monde n'apprécia pas. Pourtant, Leone ouvre son film par une séquence plutôt truculente dans laquelle Juan détrousse une diligence remplie d'un bel échantillon de forces réactionnaires : ecclésiastique, gros propriétaire, américain, bon bourgeois. Par une série de terribles gros plans, Leone transforme leurs bouches en anus et offre à Juan le viol baroque de la femme du monde dans l'une de ces arènes de pierre qui avaient vu les duels des films précédents. Signe d'un changement de registre. Et si Juan est le vecteur principal de l'anarchisme leonien, c'est aussi en lui que s'incarne le pessimisme viscéral du film. Si l'on peut imaginer que John trouve sa rédemption et la paix avec la mort, le mexicain devenu héros de la révolution perd son innocence, sa famille et son ami.

Cette richesse du propos fait que Giù la testa ! peut se voir et se revoir et se revoir encore en se bonifiant comme un grand cru. D'autant que Sergio Leone ne sacrifie rien de son sens de l'humour (noir), du spectacle et du cinéma. Utilisation des gros plans, sens de l'espace, dialogues percutants, dilatation du temps, jeu sur la profondeur de champ, mouvements lyriques de la caméra, nombre de séquences sont des morceaux de bravoure inoubliables portés par l'une des plus belles partitions d'Ennio Morricone. La musique participe à la dramaturgie avec l'utilisation de thèmes qui infléchissent le sens des images. Et comme toujours le film est plein de ces détails, trouvailles visuelles qui savent se rendre inoubliables. La colonie de fourmis sur laquelle urine Juan, les toilettes dans la diligence, la tranche de citron que suce John avec les dents sublimes de Coburn, l'œuf gobé par Gunther Reza, le sombrero brûlé, le geste du pouce de John pour redresser le bord de son chapeau, la façon dont Juan arrache sa petite croix en or, le regard douloureux de l'ami de John dans le pub. Et puis plus que tout, cet intense sentiment de nostalgie qui étreint à l'ultime flashback, le baiser partagé et le visage de John qui se dissout lentement. Sean, Sean, Sean... Fin du rêve.

Le DVD - Edition collector

11:39 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : sergio leone |  Facebook |  Imprimer | |