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31/01/2006

Nice Guy Eddie

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Qui c'est qui est un dur? Qui est un putain de dur?!

13:00 Publié dans Acteurs | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : chris penn |  Facebook |  Imprimer | |

28/01/2006

Comment être Spielberguien ?

En écho à la célèbre question posée à propos d'Hitchcock et Hawks, je désespère de trouver le duo critique Rohmer-Chabrol qui saurait exprimer la pleine mesure du cinéma de Steven Spielberg. Hélas, hélas, entre les attaques prévisibles, les laudateurs béats, les contresens, les approximations, ceux qui n'osent pas et ceux qui osent n'importe quoi, il y a bien un problème à parler de son oeuvre. Moi-même, homme de peu de foi, j'ai fini par douter. C'est qu'à entendre nombre de voix très sérieuses, le cas semble indéfendable. Grosso modo, on lui a reproché pendant quinze ans d'avoir fait du cinéma adolescent pour lui conseiller ensuite, à partir de La Liste de Schindler, de revenir plutôt à du cinéma pour adolescent. Aujourd'hui encore, la tendance pour ce qui est de Munich est à : « mais de quoi se mêle-t'il ? Que n'en reste-il pas à ses dinosaures ! ». et puis, il n'a pas de chance. Steven Spielberg, grâce à la fidélité du public et son sens des affaires et de l'organisation , s'est construit un système qui lui permet de faire ce qu'il veut et, surtout, de tourner très régulièrement dans de confortables conditions économiques. Pour parler clair, il peut se consacrer pleinement à son art avec le maximum d'indépendance possible. Il n'est donc pas un brillant rebelle obligé de s'épuiser des années pour monter un projet (Cimino, Coppola, Friedkin...), ni un non moins brillant rebelle obligé de passer sous les fourches caudines des studios, ni un farouche indépendant, ni un artiste maudit. Serait-il donc possible qu'il ait du talent ? Une vision ? Un cinéma ?
 

Entre 1939 et 1940, John Ford, devenu producteur et aussi à l'aise que possible dans le système des studios hollywodiens enchaîne Vers Sa destinée, La Chevauchée Fantastique, Sur La Piste des Mohawks, Les Raisins de la Colère et The Long Voyage Home. On retrouve le même genre de périodes fastes chez Hawks, Kurosawa, Truffaut ou Fellini. Avoir du talent et les moyens de l'exprimer permet d'atteindre la plénitude de son art. Ce n'est pas un absolu mais il n'y a rien de pire pour un cinéaste que de ne pas tourner. Or Spielberg tourne, très régulièrement, et depuis dix ans multiplie les projets audacieux, construisant une oeuvre qui explore son pays, son histoire et quelque chose de son humanité. A Cette oeuvre aujourd'hui, cette oeuvre encore inachevée, il me semble n'y avoir qu'une seule comparaison possible, celle de John Ford.

 

Je cherchais un signe et Munich me l'a donné. Lorsque le poète palestinien, celui du premier assassinat, est filé à Rome, il entre dans une crémerie acheter du lait. Il y a une télévision au mur et elle diffuse L'Homme Qui Tua Liberty Valance. Il ne pouvait y avoir de message plus clair. Ce film de Ford est un film sur le mensonge et le meurtre comme principes fondateurs d'un pays. C'est aussi le film d'un homme rongé de culpabilité pour y avoir recouru dans le but de faire accepter ses idées, un film sur l'amertume et la stérilité qui en ont découlé. C'est un film sombre, une ambiance de film noir et une façon de mettre en perspective la violence de Valance (Lee Marvin à la limite de la caricature) et celle de Tom Doniphon, joué par John Wayne, que celui-ci exerce tout en se rendant compte qu'elle va le détruire.

 

Que nous montre Spielberg dans Munich ? Des terroristes palestiniens abattant des otages israéliens, oui, mais pas seulement. Il nous montre l'équipe de tueurs israéliens traquant et éliminant les responsables de la prise d'otage à coup de bombes et de fusillades, une tueuse éliminant l'un des membres de l'équipe de tueurs, les mêmes retrouvant sa trace et l'éliminant d'une sale façon, des raids de représailles, des lettres piégées, des agents doubles et triples, de la raison d'état et un état généralisé de déraison. Je n'ai pas encore lu que l'on ait relevé combien le raid israélien au Liban ressemblait à la reconstitution de la prise d'otages. Et pourtant, ce sont les mêmes arrivées furtives, les mêmes armes que l'on épaule, les mêmes portes que l'on enfonce, les mêmes visages d'hommes tirés de leur lit et abattus sur place, la même sale guerre sans prisonniers, les mêmes justifications. Spielberg filme la peur, les visages ravagés d'angoisse et de haine. « C'est ma terre », « il faut le faire », « j'ai pris ma décision », « tue-les », « tuez-les ». Il montre les mêmes certitudes d'avoir raison, les mêmes fronts butés, la même absence de scrupules, les mêmes moyens pour une même fin. Il filme ce qui tue le Proche Orient depuis le commencement, les cadavres que l'on se renvoie à la figure et qui justifient toujours de nouveaux cadavres. Le refus de l'autre. Et à travers le personnage d'Avner joué par Eric Bana, il pointe la seule possibilité de sortir de cette spirale sans fin : douter. Il pointe aussi, ce qui fait de Munich un film assez sombre, l'effet destructeur de cette spirale sur l'homme : la paranoïa totale. Très belle scène d'Avner qui rentre dans sa chambre, la pense forcée et démoli son mobilier, se souvenant de tous les pièges dont il s'est servi sur d'autres, pour finir par dormir, halluciné, dans son placard. Munich poursuit ici le discours initié dans Minority Report, discours sur une société tellement obsédé par le crime qu'elle abdique toute liberté individuelle pour un traçage de l'individu jusqu'à condamner à la vie végétative ceux qui commettrons un crime dans le futur. Car bien sûr Spielberg s'adresse en priorité aux américains. La traque vengeresse du groupe israélien renvoie à la « croisade du Bien » initiée par G.W.Bush. Son inanité est signifiée par l'ultime plan sur les tours du World Trade Center. Aux discours plein de certitudes du supérieur d'Avner, Spielberg rappelle que, plus de vingt ans après, rien n'a été réglé. Que c'est encore pire. Parce que dans les années 70, New-York est encore un refuge.

 

Revenons à Ford. Les deux films ont en commun de réfléchir sur les rapports entre une nation, son affirmation (ou son existence), et la violence qui est nécessaire à cette affirmation. Réflexion également sur l'effet de cette violence sur les individus et le besoin absolu de dépasser cette violence pour construire un futur. Cette image du futur se décline chez Spielberg par les nombreuses présences d'enfants, israéliens, américains, palestiniens, français. Des enfants hélas déjà prêts à la guerre mais qui peuvent espérer la paix. Chez Ford, mais c'est un homme d'avant le Vietnam, ce futur, ce sont la mise en place des dispositifs démocratiques, de la civilisation qui balaie la violence du vieil ouest. L'oeuvre de Ford, c'est l'épopée de l'Amérique avec, de plus en plus aiguës avec le temps, les contradictions qui vont avec. Et un fondamental : la communauté. L'oeuvre de Spielberg, c'est la communication entre les êtres avec, de plus en plus aiguës avec le temps, les difficultés qui vont avec. Et un fondamental : la famille. Et celle-ci, dès Duel, est souvent en crise ou dispersée. L'armée, la police, les scientifiques, les corps constitués sont le plus souvent des menaces. Spielberg a un petit fond anar. C'est un cinéaste d'après le Vietnam (et Kennedy, Matin Luther King, le Watergate, le Chili...) pour lequel les contradictions que Ford essaye de résoudre sont intenables.

 

Comme lui, Spielberg a exploré les différentes époques de la courte histoire de son pays. Comme Ford, il convoque les pères fondateurs (le discours de Lincoln dans Saving Private Ryan par exemple). Il cherche dans le passé une façon de lire le présent et des pistes pour le futur. Il y a le même désir, le même enthousiasme, la même fièvre à embrasser cette histoire courte et intense pour en faire la matière vive de leurs films et tenter de lire le monde. Spielberg n'est pas un historien, pas un documentariste, Munich est « inspiré de faits réels » comme Le Massacre de Fort Apache est inspiré de Little Big Horn. Munich est un thriller comme La Chevauchée Fantastique est un western mais ce sont tous les deux des portraits de l'Amérique au moment de leur tournage. Ce ne sont pas des films politiques mais ils sont éminemment politiques. Ce ne sont pas des films idéologiques, mais qui portent un regard sur une idéologie, ils sont profondément humanistes. Et si certains trouvent Munich trop basique, il faut rappeler que les Palestiniens viennent de voter pour le Hamas après que les américains aient réélu Bush et que les israéliens aient élu Sharon, qu'un diplomate israélien a critiqué le film au motif que les agents du Mossad n'avaient pas d'états d'âme tandis que le dernier survivant du commando palestinien de Munich disait ne rien regretter. Le doute, ce n'est pas gagné.

 

Un dernier point concernant les critiques, très localisées, sur le côté folklorique de la vision «à la Spielberg» de la France. Il suffit de revoir L'Affaire Ben Barka de Serge le Péron ou cet excellent téléfilm sur le SAC pour voir ce dont nous avons été capables en matière de groupes parallèles, coups tordus et manipulations en tout genre. Malgré le plan insistant sur la tour Eiffel, le Paris 70' de Spielberg est cent fois plus convainquant que celui 60' de le Peron.

27/01/2006

La tournée des popotes

C'est une peu le foutoir chez 20six. La migration ne semble pas s'être bien passée. Du coup les blogs que je connais déménagent. Pourvu que haut et fort ne nous fasse pas un coup pareil. Pierrot, donc, nous quitte après une jolie note sur les Sept Samouraïs et nous donne sa nouvelle adresse où il parle de La Trahison. Imposture transfère de même son paravent suédois chez canalblog. Bon courage. Sur Contrechamp, une discussion animée autour d'un questionnaire qui a amené à un certain nombre de réflexions faisant en quelque sorte suite à la note autour de la cinéphilie. Sur Notre Musique, Hyppogriffe, après une étude des « tarkovskiens » (j'en ai connu un , ils ne sont pas faciles à vivre), s'apprête à tailler un costard à Spielberg. Flickhead est toujours plein de ressources et, après un événement autour du Showgirls de Verhoeven, propose un blog-a-thon autour du Code Inconnu de Hanneke. Et toujours des liens vers des sites extraordinaires, j'y reviendrais. Sur les Ombres Électriques, un bilan argumenté sur l'année cinématographique 2005. Les Désaxés de John Huston chroniqué chez Chris Lynch, Good Night, and Good Luck chez François Bouchet. Marilyn toujours chez Sugar. Anne Sophie, sur Fondue Déchaînée, après une période de culpabilisation pour cause d'abandon de blog, revient avec une jolie série de photographies de son prochain film. Et Ludovic poursuit son inclassable Cinématique. Bonnes lectures.

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25/01/2006

Coquille

J'avais envie de parler de Munich avant sa sortie, avant de le voir, histoire d'expliquer comment je l'attendais et ce que j'en attendais : un chapitre de plus à son portrait de l'Amérique contemporaine après Minority Report (la paranoïa sécuritaire qui mène le flicage généralisé des individus jusqu'à à vouloir anticiper les crimes) et La Guerre des Mondes (la peur de la destruction par la guerre totale sur le territoire même des USA). Munich est potentiellement une réflexion sur la notion de riposte, notion qui mène la politique américaine actuelle non seulement vis à vis du terrorisme mais aussi sur le plan diplomatique et économique. Bon, je n'ai pas eu le temps mais j'y reviendrais.

Néanmoins, je suis tombé sur la critique négative du journal le Parisien qui titre sur une page : « Spielberg a raté son pari ». Et je ne peux pas ne pas relever. Outre que l'auteur en est encore à s'interroger sur le pourquoi du projet (à croire que c'est le premier film du réalisateur qu'elle voit), elle qualifie Spielberg de « réalisateur de la Guerre des Etoiles ». Quel sérieux, madame ! Quelle connaissance du cinéma ! Et quand je pense qu'elle est payée pour ça.

23/01/2006

Nous sommes tous des Tanuki

Pompoko est un conte écologique, c'est une fable philosophique, c'est un film fantastique, un concentré d'humour, un drame parfois poignant, c'est un film de respect et de nostalgie, c'est un film actuel, c'est une histoire d'amour et d'aventure, c'est un récit choral, une comédie musicale, une féerie, un enchantement. Pompoko est un film bien membré. Pompoko est un film d'animation de Isao Takahata dont j'ai compilé des éléments biographiques ci dessous.

Pompoko, c'est le bruit que fait le ventre des Tanuki quand ils tapent dessus pour faire de la musique. Les Tanuki, ce sont des sortes de gros animaux genre raton laveur (en fait apparentés aux chiens) qui vivent (vivaient ?) aux abords des fermes japonaises avant que l'urbanisation de Tokyo, au milieu des années 60 ne les chasse. Les Tanuki sont aussi des animaux sacrés au japon où on fabrique de statues à leur image car on leur attribue de nombreux pouvoirs magiques. Parmi ceux-ci, le plus important, c'est d'être transformistes. Le raton-laveur, loin des humain, se dresse sur ses pattes, devient cartoonesque et se vêt pour ressembler à un personnage médiéval d'Akira Kurosawa. Cela ne s'arrête pas là, le Tanuki peut se métamorphoser en à peu près n'importe quoi, du ballon de football à la nuée de lucioles, d'un merveilleux dragon à un être humain. Car les Tanuki sont parmis nous. Ils sont ceux qui rêvent encore, ceux qui ont préservé un peu de magie en eux. Et c'est de plus en plus difficile.

Pompoko, c'est l'histoire de l'ultime combat des Tanuki pour préserver leur territoire, leurs forêts, leurs champs, leur mode de vie. C'est aussi un combat pour préserver une façon de vivre harmonieuse pour les humains. Inutile d'entrer dans les péripéties car le film aligne dix idées par plan, passe d'un sentiment à l'autre en un éclair comme dans la scène qui a marqué Pierrot. Le film ose avec santé et humour. Ainsi les fameux attributs des Tanuki, leurs roustons merveilleux, sont fièrement exhibés et leur permettront, dans une scène anthologique, d'attaquer les CRS japonais en une charge héroïque. Pompoko est le genre de film capable de montrer cela avec classe. Il a mon plus profond respect et à mon inconditionnelle admiration.

Isao Takahata

Petit dernier d'une famille de sept enfants, Isao Takahata est né à Ise au japon le 29 octobre 1935. lettré et francophone, il étudie la littérature française à l'université de Tokyo et deviendra le traducteur de Prévert. Outre le travail du poète, il découvre ses collaborations avec Paul Grimault dans le domaine de l'animation, le scénario de La Bergère et le Ramoneur en particulier. Il sera également influencé par les films de Youri Norstein et de Frederick Back sur les oeuvres desquels il écrira.

En 1959 il entre aux studios d'animation Toei douga où il va côtoyer deux figures historiques du film d'animation japonais : Yasuji Mori et le vétéran Yasuo Otsuka. Il rencontre surtout celui qui va devenir son ami, Hayao Miyazaki qui, très engagé, est alors président du syndicat des animateurs du studio. Takahata devient vice-président de ce syndicat et la relation entre les deux hommes ne cessera jusqu'à aujourd'hui, que ce soit artistiquement ou à travers les studios Ghibli désormais universellement connus.

Takahata fait ses débuts en tant que réalisateur pour la télévision en 1964, sur des épisodes de Ken, l'enfant-loup, une série ou officie également Miyazaki en tant qu'intervalliste.

En 1968, toujours avec Miyazaki, il réalise son premier long métrage Horus, prince du Soleil (sorti en France en 2004). le film ne rencontre pas le succès espéré et les deux hommes se tournent à nouveau vers la télévision tout au long des années 70. Takahata revient au grand écran avec deux très beaux films traitant de l'enfance : Kié la Petite Peste en 1981 et Goshu Le Violoncelliste l'année suivante.

En 1985, C'est la création des studios Ghibli par la Tokuma. C'est en leur sein que Takahata réalise en 1988 son bouleversant Le Tombeau des Lucioles qui sera suivi de quatre films très différents : Les Souvenirs ne s'oublient jamais en 1991, Pompoko qui vient donc seulement de sortir en France en 1994, Mes Voisins les Yamada d'après une célèbre bande dessinée en 1999 et Les Aventures de Petit Panda, son dernier opus à ce jour en 2003.

Avec Hayo Miyazaki, les deux hommes sont complémentaires et ont assuré le succès des studios Ghibli, succès devenu mondial depuis l'accord passé à la fin des années 90 avec la branche distribution de Disney. Takahata ne dessine pas, contrairement à son complice, et se considère avant tout comme un réalisateur, ce qui lui permet d'aborder des styles de dessin et des techniques assez différents. Il sait plonger dans la vaste culture japonaise et la plupart de ses films sont des adaptations de romans, nouvelles ou mangas. Plus naturaliste que Miyazaki, il partage son goût pour l'enfance, le merveilleux et un discours écologique traité avec humour. Comme lui, aussi, ses films sont sortis dans le désordre en France et il est amusant de découvrir Pompoko après Le Voyage de Chihiro alors que c'est ce dernier qui « répond » au premier. Pour mémoire, Pompoko avait été présenté à Annecy en 1995 ou il avait reçu le Cristal du long métrage

En savoir plus sur le site Buta Connection avec un entretien exclusif et passionnant d'Isao Takahata.

Le script et de nombreuses photographies d'excellente qualité : ICI

22/01/2006

Rendez l'argent !

A lire et entendre les contre-attaques au projet de licence globale pour les échanges d'oeuvres sur Internet, j'ai les oreilles qui se sont un peu échauffées. Un certain nombre de points me semblent devoir être rappelés avec force. Particulièrement quand les propos sont ceux d'artistes qui débarquent à Cannes en jet privé, personnalités rompues aux médias dont les portes, les colonnes et les écrans leur sont grands ouverts. Leurs cris de colère couvrent les arguments des millions d'utilisateurs, des consommateurs, des petits et des sans grades du monde du libre, des 150 000 signataires de la pétition lancée par EUCD.info : « la licence globale est inique ». Et pourtant :

Vous avez la télévision, vous payez donc la redevance, que vous regardiez ou non les chaînes publiques, et cette redevance est une sorte de licence globale.

Vous avec le câble, un bouquet satellite, un abonnement à une chaîne cryptée, vous payez donc une licence globale pour les programmes qui y sont diffusés.

Vous écoutez la radio, ou la musique chez votre boucher, et la station comme votre boucher payent donc à la SACEM une redevance, une sorte de licence globale pour ce qu'ils diffusent.

Vous avez la chance d'avoir des revenus et payez donc l'impôt du même nom. Sur cet impôt, une part que je suis d'accord pour trouver insuffisante, est destinée à financer des aides pour le cinéma, la musique, la culture en général. C'est une sorte de licence globale pour la culture française.

Vous avez un disque dur, vous achetez des cassettes audio ou vidéo, des CD-Rom ou des DVD vierges, vous payez donc des droits qui remontent aux artistes et ayants droits. Et ceci, notez le bien, même si vous n'utilisez ces supports que pour des données personnelles ou libres de droits.

Et une licence globale pour les échanges sur Internet serait "inique" ?

Ne voit-on pas que cette opposition à un système de licence globale participe d'un mouvement de fond dénoncé voici quelques jours par Didier Peyrat dans un rebond très intéressant sur Libération ? Un mouvement mené au nom de la protection et de la sécurité. Que l'alternative proposée à la licence globale n'est rien d'autre que le flicage généralisé de l'échange des données culturelles sur Internet. Des policiers dans les trains, des vigiles au supermarché et des caméras dans les rues. Et des espions informatiques dans nos musiques, nos films, nos photographies. De nombreux supports et des publicités dans les salles de cinéma incitent déjà à la délation (voir le site : http://www.piracyisacrime.com/ par exemple). Bravo quel avenir brillant on nous prépare !

J'aurais préféré que ces voix qui s'expriment au MIDEM en ce moment se fassent mieux entendre lors des attaques répétées contre le statut des intermittents du spectacle. Qu'elles nous parlent des prix du disque, des DVD, des concerts ou du téléchargement légal. Ou encore qu'elles nous parlent de la revalorisation du domaine public. Les sujets ne manquent pas.

Mais je voudrais lancer ici deux appels. Le premier aux cinéastes, artistes et musiciens que l'on entend trop peu, ceux dont on a apprécié en leur temps l'engagement pour des causes plus justes, ceux que l'on a suivis, soutenus, écoutés, accompagnés : Est-ce vraiment l'avenir que vous souhaitez ?

Le second aux hommes politiques qui aujourd'hui hésitent, ne savent plus trop, sont sans doute plus sensibles aux discours de ceux qui ont le temps et les moyens de faire leur siège. A François Hollande en particulier qui vient de se prononcer contre la licence globale après que Ségolène Royal ait signé en avril l'appel du Nouvel Observateur qui allait en sens contraire : savez vous bien qui vous défendez ?

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17/01/2006

Sacré western !

Sacré western, en effet, que l'on dit régulièrement mort depuis trente ans et qui n'en finit pas de renaître de ses cendres comme l'oiseau bien connu. Selon ses goûts ou son tempérament, on fera du fossoyeur John Sturges, Sergio Léone, Sam Peckinpah ou Michael Cimino. C'est ce dernier qui a ma préférence. La Porte du Paradis en 1980, ou plutôt son échec, c'est aussi celui d'une conception du cinéma qui croit cet art capable d'offrir de grandes oeuvres épiques, adultes, qui soient aussi réflexion sur l'Histoire d'une nation. Les années 80, c'est le triomphe d'un cinéma plus adolescent, d'un art ramené de plus en plus à un divertissement avec le règne des effets spéciaux et un souci de ne pas se soucier de l'Histoire. A ces jeux là, le western qui est une chose très sérieuse, ne pouvait que s'effacer. Pourtant, quelque chose s'accroche. Les formes du western sont recyclées, notamment dans le fantastique et la science fiction (Georges Lucas a pris tout ce qu'il a pu de La Prisonnière du Désert de Ford) et puis régulièrement un nostalgique s'y colle en perpétuant la tradition comme Clint Eastwood( Pale Rider en 1985, Impitoyable en 1992 déjà) ou Kevin Costner (Danse avec les Loups en 1990, Open Range 2003). D'autres enfin cherchent à allier citation et classicisme comme Sam Raimi sur le mode parodique dans The Quick and the Dead en 1995 ou Quentin Tarantino et son hommage tout à fait respectueux au western italien dans Kill Bill. Pour quelqu'un comme moi qui met les westerns de Ford et Hawks au dessus de tout (et j'ai bien écrit « de tout »), c'est toujours une bonne nouvelle. Même si cela me conduit à voir dans les films qui s'inscrivent dans cet héritage quelque chose qui est peut être différent de ce qu'ils sont vraiment. Ainsi :

Dans La Dernière Balle Tue (The Fastest Gun Alive - 1956) de Russel Rouse, Glenn Ford y incarne le paisible épicier d'un village tranquille de l'ouest qui est aussi un redoutable pistoléro. Défié par un tueur, il prend la défense de sa communauté qui fait bloc derrière lui. Dans La Rivière Sans Retour (River of no Return – 1953) d'Otto Preminger, Robert Mitchum est un homme qui sort de prison et récupère son fils pour mener une vie tranquille de fermier. Pour retrouver l'homme qui l'a dépouillé, il entreprend un voyage risqué sur la rivière en question et en compagnie de Marilyn Monroe dans l'un des rôles qui en ont fait une légende. Au cours du voyage, il fera preuve d'une brutalité remarquable, violentant Marilyn, et descendant de l'indien. A la fin du film (arrêtez votre lecture si vous ne l'avez pas vu), il est sauvé par son fils qui abat le méchant dans le dos.

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Si ces deux histoires vous semblent familières, c'est que vous avez sans doute vu An History Of Violence, le film de David Cronenberg. Inutile de vous dire que la thèse sur le visage caché de l'Amérique n'est pas ce qui m'a le plus marqué. Avez vous noté combien le premier plan, ce long plan séquence qui distille de l'angoisse dès ses premières secondes, s'achève de façon similaire à la découverte de Henry Fonda dans Il Etait une Fois Dans L'Ouest de Sergio Léone, lors du massacre de la famille et que le petit garçon se retrouve face aux tueurs ? Il y a le même mouvement latéral et le plan coupe de la même façon. Cronenberg a fait son western, avec cette même dialectique sur la violence toujours très présente dans ce genre de films. On retrouve tout au long de son film les éléments clefs du genre (le saloon, les frères ennemis, les fusillades, la famille, la petite ville, l'esprit communautaire) et Viggo Mortensen est un lointain cousin du Glyn McLyntock joué par James Stewart dans Les Affameurs (Bend Of the River – 1952) d'Anthony Mann. Simplement Cronenberg peut aller un peu plus loin en matière d'horreur graphique et de sexe (rien d'étonnant de la part du réalisateur de Rage). Est-ce que cela fait un bon film ? Certainement dans la mesure ou le style suit, le réalisateur canadien ayant parfaitement assimilé et traduit les codes du genre dans le contexte actuel. Cela lui permet de constater que rien n'a changé dans une Amérique qui vit toujours selon le mythe du « cinéma américain par excellence ». A chacun d'en tirer une morale s'il le souhaite. La scène finale est très proche de celle de La Prisonnière du Désert (The Searchers – 1956) de John Ford (et du coup du finale de La Guerre des Mondes de Spielberg). Recomposition de la famille et acceptation de la part sombre et violente de ceux qui la composent. Seule différence, Ford, encore un peu optimiste, montrait Ethan Edwards se retirer seul dans le désert, image bouleversante d'un Ouest qui passait la main à une société plus civilisée. Là, ce n'est plus ça. La fin du film de Cronenberg, c'est Ethan qui entre et s'assoit à la table familiale.


L'autre joli western, c'est bien sûr le film de Tommy Lee Jones, Trois Enterrements (The Three Burials of Melquiades Estrada – 2005). Là, les références sont à la fois plus directes et plus formelles. Tommy Lee Jones lorgne du côté du grand Sam Peckinpah et ses voyages au Mexique. Le film est clairement en deux parties, recherchant dans sa construction à trouver avec le village de Melquiades Estrada la terre perdue du western. La première heure est faite de retours en arrière et en avant, du film policier un peu à la Tarantino, dégageant d'une histoire très classique et pas forcément excitante, deux personnages destinés à faire ce voyage. Lorsque ces deux là sont ensembles (Jones et Barry Pepper), la narration devient linéaire et le film prend le rythme des chevaux pour une sorte de plongée dans le temps et dans le genre. Jones s'est mis en scène en vieux cow-boy comme son personnage, Pete, met en scène celui de Pepper. Pas important alors que le village soit presque une chimère. En quelques paroles évocatrices, Jones donne vie au décor comme Gene Kelly dans le studio de Chantons Sous la Pluie. Oui, le western est encore là, il affleure la terre du Mexique, ses pierres et ses arbres. Enterrer Melquiades Estrada à cet endroit, c'est le ramener aux sources d'un genre. Là ou les fantômes de la Horde Sauvage et d'Alfredo Garcia n'attendent qu'une occasion pour surgir à nouveau.

10/01/2006

Photographies - 2

Il y a des sites et des blogs qui forcent le respect. La somme de connaissance, d'information, de documents qu'ils mettent à la disposition du plus grand nombre n'a d'égale que leur modestie et la qualité parfois renversante de leur travail. Sandrine, sur Contrechamp vient d'initier une discussion sur la cinéphilie. La visite du site du Doctor Macro peut être un élément de réponse. C'est une façon de donner à voir, de préserver et transmettre une histoire, de s'effacer aussi derrière la beauté des images. On pourra trouver la démarche passéiste, mais j'ai toujours détesté que l'on parle de "vieux film". Don Quichotte n'est pas un "vieux livre", ni la Neuvième symphonie de la "vieille musique". Chez le Doctor Macro, il y a à voir de belles images de beaux films.
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08/01/2006

Souvenirs

« Quand la légende est en contradiction avec les faits, imprimez la légende » Cette phrase de Ford dans L'Homme Qui Tua Liberty Valance s'applique parfaitement à François Mitterrand et à l'atmosphère de commémoration qui entoure le dixième anniversaire de sa mort. Bâtir sa légende, être obsédé par la place que l'on va laisser dans l'histoire, sont des traits essentiels de son action. Plus qu'une figure historique, plus qu'un président, plus qu'un leader politique, il est aujourd'hui un personnage romanesque, un personnage de film que j'aurais bien vu joué par Welles même si son unique incarnation, très réussie à mon goût, est celle de Michel Bouquet chez Guédiguian.

 

Mais aujourd'hui, rien n'évoque mieux ce que Mitterrand a pu représenter pour moi que le court métrage de Stéphane Brisset : Le Grand Soir. L'action du Grand Soir se situe le 10 mai 1981. Le héros est un jeune garçon qui vient d'avoir seize ans. Il joue au foot, roule en 103 Peugeot, porte un bandana rouge et anime une émission rock sur une radio pirate, diffusant les Pretenders, Starshooter et sans doute Téléphone. Né en 1964, même sans rouler en Peugeot ni jouer au foot parce que je n'aime pas ça, je me suis senti très proche de cette situation de base. Notre héros a un père pharmacien qui pense que la victoire des socialistes serait le signal de la nationalisation de son officine. Néanmoins, en homme de foi, il a mis du champagne au frigo et le sort à 19h55 alors que toute la famille est réunie devant le poste de télévision. Le plan sur les visages décomposés à l'annonce des résultats est un grand moment tout à la fois d'hilarité et de vérité. Vérité de ce que cela a signifié, ce jour là. Bien sûr, chez moi, mon père avait fait pareil, mais le champagne, on l'a débouché avec des cris de joie. Mais l'intensité de l'émotion, c'était bien ça. Rien que pour avoir su faire revivre ce moment, Brisset a réussi son film.

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Mais le reste est bien aussi. Notre jeune héros est amoureux de la soeur de son copain, très jolie fille et militante aux jeunesses communistes. Figure classique, féminine et sensuelle de la Révolution. Celle que l'on désire mais qui reste inaccessible. Mais elle va pousser notre héros à s'affirmer. « et bien moi je suis content » déclare-il sous les yeux horrifiés de sa famille. Une gifle de son père plus tard, le voilà parti errer dans les rues de la ville où la gauche fait la fête. Il y a une autre jeune fille, jouée par l'excellente Julie Durand qui sera récompensée à Clermont Ferrand pour ce rôle. C'est l'amie de la famille. Elle est transparente pour notre héros. Elle n'est pas engagée, ne comprend pas vite, ne semble pas si jolie et pourtant c'est avec elle que notre héros va graver de façon indélébile cette soirée du 10 mai 1981 en perdant, presque par hasard, son pucelage. Jolie métaphore, jolie image. Elle est le passage à la vie adulte, elle est la vraie vie et une sorte de renoncement aux rêves. Mais elle est jolie malgré tout et elle est le bonheur. Ici et maintenant. Quand j'y repense c'est une bonne analyse de ce qu'auront été les années de pouvoir de François Mitterrand, les espoirs qu'il aura incarné, les désillusions inévitables et les véritables avancées. Stéphane Brisset ne semble pas avoir fait de film après ce court, c'est vraiment dommage.

06/01/2006

Photographies - 1

Flickhead est décidément une mine d'or. J'ai découvert cette très belle série de photographies d'acteurs et réalisateurs par Patman (Patrick Aufauvre et Arnaud Baumann). La gallerie est extraite du livre "Projections privées" qui comprend 62 portraits et a été publié en janvier 2002 aux éditions Les Imaginayres. Comme les rédacteurs de Flickhead, j'ai craqué sur cette belle image de Sandrine Bonnaire qui non seulement est très séduisante avec ses longs gants noirs, mais illustre une certaine idée de l'émerveillement au cinéma.
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Photographie prise au cinéma Studio 28 à Paris. Habillée en Chanel, maquillée par Claire de Monteynardlée.

 

Les galleries sur le site de A. Baumann : cliquez

Le site des éditions Les Imaginayres : cliquez


(Le livre semble toujours disponible)