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19/12/2005

Qu'est-il arrivé à Steve Kloves ?

Steve Kloves est le scénariste des trois derniers films tirés des aventures de Harry Potter ainsi que du prochain à venir en 2008. C'est au générique du dernier en date (et oui, j'avais promis) que j'ai noté son nom et que je me suis dit que je l'avais déjà vu quelque part. Vérification effectuée, il est également réalisateur et c'est à lui que je dois une sacrée émotion avec Susie et les Baker Boys (The Fabulous Baker Boys) en 1989. Kloves, c'est l'homme qui a fait se rouler Michelle Pfeiffer en robe rouge sur le piano noir de Jeff Bridges en sussurant « Makin' Woopee ». Une scène inoubliable qui aurait pu figurer en bonne place dans l'enquête de Pierrot. Le film, son premier, se situait dans la lignée prestigieuse des comédies sentimentales classiques américaines. Pfeiffer y était alors grande, belle, drôle, vulgaire, touchante, sexy et chantait d'une petite voie rauque délicieuse. Elle était aussi dans la période faste de sa carrière. Bridges jouait les ours taciturnes façon Mitchum avec classe aux côté de son frère Beau. Steve Kloves était un nom à suivre.

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Je l'ai suivi en 1993 sur Flesh and Bones, western moderne un peu dans le style Trois Enterrements avec une distribution de grande classe : Dennis Quaid, Meg Ryan et James Caan. Un beau film sombre, taiseux et fort comme une ballade folk. Steve Kloves confirmait. Et puis, plus grand chose jusqu'au sorcier de Pouldar. Péripéties prévisibles entre Star Wars et Le Seigneur Des Anneaux, maître des ténèbres et esprit de compétition à tous les étages, parcours initiatiques et bestioles digitales. Qu'est-il arrivé à Steve Kloves ? Il est devenu riche sans doute mais nous avons perdu un metteur en scène.

01/10/2005

Robert Wise

J'avais envie d'écrire un petit quelque chose autour de Robert Wise, le réalisateur américain récemment disparu. Je me souviens du seul livre en français écrit à son sujet, et le regret qu'exprimait son auteur que Wise ne soit pas mieux considéré en tant que cinéaste. On retrouve le même genre de regrets dans les rares ouvrages consacrés à John Sturges, Richard Fleischer, Robert Aldrich et même Edward Dmytryck ou Anthony Mann.

Ils font tous partie de la génération arrivée dans les années 40, première génération de cinéastes à la suite des « grands » formés à l'école du muet. Tous ont démarré par des films noirs, souvent des séries B dans lesquelles il ont rapidement fait preuve d'une grande efficacité technique, d'une sensibilité prometteuse et souvent de préoccupations sociales marquées par l'esprit d'après guerre.

 

Nous avons gagné ce soir (1949) de Wise est typique des réussites de l'époque qui contribuèrent à donner un coup de jeune à Hollywood. Ce classique du film de boxe avec l'extraordinaire Robert Ryan possède unité de temps et de lieu, sécheresse du récit et du montage, réalisme presque documentaire (néo-réaliste presque) des combats et du contexte. Une perle de film noir.

Mais tous ces réalisateurs et Wise de façon exemplaire, vont vite devenir des « valeurs sures » à l'exception de Dmytryck, brisé dans son talent par la chasse aux sorcières. Ils vont enchaîner succès et gros budgets, gérant avec difficulté leurs ambitions artistiques, jusqu'à une forme de renoncement en fin de carrière. Il y aura encore de belles choses mais, mis à part Anthony Mann dont l'attachement au western lui achètera un brevet d'auteur à part entière, les autres resteront de brillants faiseurs.

 

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Et si, en fin de compte, le compliment que l'on adresse le plus volontiers à Robert Wise ("un bon technicien") était en fait la pire chose que l'on puisse dire à son sujet ? Fait justement remarquer Christian Viviani.

La difficulté vient de la variété de ses films. Quoi de commun, avec la meilleure volonté du monde, entre West Side Story, La Maison du Diable, Nous avons gagné ce soir et Star Trek ? Pas grand chose. Il y a le talent de conteur de Wise et son goût des défis techniques. C'est déjà ça. Il a certainement le cinéma chevillé au corps. Il débute comme monteur en 1936, suffisamment brillant pour être remarqué par Orson Welles qui l'engage sur Citizen Kane puis sur La Splendeur des Amberson. C'est lui qui acceptera de faire le « sale boulot » pour le studio qui vire Welles imprudemment partit faire un film au Mexique. Welles en voudra à Wise qui dira avoir « limité les dégats ». Une chose est sûre, Wise n'aura jamais vraiment un profil de réalisateur rebelle.

 

Finalement, le côté le plus original, personnel, de sa carrière, c'est peut être son attachement au fantastique et à la science fiction. Il débute par deux films noirs fantastiques La Malédiction des Hommes Chats (1944) et Le Récupérateur de Cadavres (1945) aux belles ambiances typiques des productions Val Newton. En 1951, c'est Le Jour ou la Terre s'arrêta, film atypique en pleine paranoïa anti-rouges. Film de science fiction pacifiste, fable sur le danger nucléaire, originale dans son approche et audacieuse pour ces années 50 durant lesquelles la science fiction reste un sous genre de pur divertissement. Wise reste fidèle à ce goût, y trouvant matière à de belles réussites. La Maison du Diable en 1963 est le classique des films de maison hantée. Le film explore la peur brute avec les seuls moyens propre du cinéma, sans effets spéciaux, terrorisant avec le montage, le son et une superbe direction artistique. Le film aujourd'hui n'a rien perdu de son éclat.

 

Le Mystère Andromède, en 1971 est un modèle de science fiction sérieuse, loin des effets adolescents du genre, un suspense biologique remarquablement construit au mécanisme millimétré. Si Audrey Rose est un pâle démarquage de l'Exorciste, Star Trek, son avant dernier film, en 1979, me semble sous évalué. Wise a quand même eu le culot de vouloir atteindre l'ampleur et la profondeur de 2001 avec les éléments d'une série télévisée. Malgré le jeu limité des acteurs, l'intrigue qui imite en mineur L'Odyssée du Sous Marin Nerka et les costumes qui passent mal sur grand écran, le film oppose au mouvent de Star Wars un rythme contemplatif, la beauté d'images quasi abstraites dues à Douglas Trumbull, déjà responsable des effets de 2001. Wise joue sur le rapport de taille de l'homme dans l'univers, sur la fascination de l'infini et séduit parfois. La lente approche vers le vaisseau « Enterprise » sur une musique céleste de Jerry Goldsmith est un joli moment de pur cinéma.

Quelques liens pour partir en exploration, l'hommage rendu par le Festival de la Rochelle, une émission avec Patrick Brion, un entretien en anglais, un article sur La Maison du Diable, un autre sur Wise et le fantastique, le site de la Cannonière du Yang Tsé et la critique de La Mélodie du Bonheur par Chris Lynch.

20/09/2005

Sir Alfred

Un site pour tous les dingues de l'oeuvre d'Alfred Hitchcock, information récupérée sur Ecrans.

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Plein de photographies et tout un tas d'autres choses, en italien pour les textes.

16/07/2005

Spielberg, cinéaste B ?!

A l'occasion de l'une des nombreuses discussions autour de La Guerre des Mondes de Steven Spielberg, je suis tombé sur une réflexion du style : « une idée par plan, un plan par idée. C'est la série B ». Cela se voulait sans doute un compliment, mais cela illustre bien l'incapacité ou la gène, qu'il y a à parler de Spielberg comme cinéaste majeur.Petite démonstration à partir du plan de la fillette qui, s'éloignant pour satisfaire un besoin naturel, se retrouve au bord d'une rivière où elle découvre un, puis plusieurs cadavres emportés par le courant.

Ce plan me semble avoir au moins quatre niveaux de lecture :
Une idée dramatique, classique, liée à un concept d'ensemble. En voulant se soustraire au regard de son père où d'un éventuel inconnu, elle subit un traumatisme du regard bien plus intense en découvrant un scène qui lui révèle l'horreur de la situation. Cette notion de regard, autour de laquelle est construit tout le film a été abondamment explorée.
Une idée de cinéma, ensuite, avec la découverte progressive des cadavres, pour elle comme pour le spectateur. Utilisation de l'espace et du temps pour produire un effet signifiant. Beauté du plan en lui-même. Subtilité de la bande son, douceur du bruit de l'eau en opposition à la violence de l'image.
Une idée de cinéphile, par dessus. Impossible de ne pas penser à La Nuit du Chasseur de Charles Laughton, film référence des enfants, du mal et des rivières. Possible aussi de penser, comme certains l'on fait, à la séquence des Oiseaux D'Alfred Hitchcock, où la progression jusqu'à la panique est amenée de la même façon : un oiseau, des oiseaux, plein d'oiseaux, une multitude d'oiseaux. Une idée, enfin, que je qualifierai de politique, à défaut d'un autre mot, un rappel du réel avec un lien qui m'a semblé évident avec les images de massacres bien actuels, images des corps charriés par les fleuves africains du Rwanda, images des corps flottants lors du Tsunami. Une idée qui ramène à la violence de l'homme sur l'homme et qui n'est sans doute pas innocente. Rien chez Spielberg, et depuis le début, n'est innocent.

Un peu loin de la série B, non ?

Quand on pense à cette image, à sa construction et sa signification, on ne peut pas se satisfaire de l'image de Spielberg cinéaste de divertissement. Il est l'un des grands créateurs modernes. D'autant plus qu'il est aussi divertissant, c'est à dire qu'il a le pouvoir de ceux qui ont un public assez large pour leur donner la liberté de faire ce qu'ils veulent. Comme Ford, Hitchcock, Hawks, Capra, Léone... Il a la même capacité à nous donner des oeuvres lisibles à plusieurs niveaux. Et il est l'un des derniers aux États-Unis à pouvoir et savoir le faire avec Martin Scorcese. Contrairement à Coppola, Friedkin et Cimino qui ont été broyés par le système, contrairement à Dante, Carpenter et de Palma qui doivent composer avec des contraintes économiques drastiques, contrairement à Lucas qui est resté infantile (mais amusant), Spielberg continue à construire son oeuvre, tournant beaucoup et capable, sur un thème classique, de nous donner une variation de grand style.

15/11/2004

Jésus revient !

« Avec un nom pareil, le petit Jésus ne pouvait que mal tourner »

J’aime beaucoup cette phrase qui résume bien l’esprit de Jésus Franco. Espagnol comme l’indique son nom, il a une des carrières les plus hallucinantes de l’histoire du cinéma. Depuis El coyote en 1955, il a réalisé quelques 170 films en utilisant unefranco.jpg quarantaine de pseudonymes. Excusez du peu ! Ceci explique que sa filmographie est difficile à établir.

Bien sur, avec une telle activité, il a réalisé un nombre impressionnant de navets, films de seconde zone, voire quelques films carrément pornographiques. Alignant les co-productions les plus improbables, se jouant de la censure, tournant dans toutes les conditions, Franco a toujours manifesté une foi inébranlable dans le cinéma qui, parfois, lui en a été reconnaissant.

Ainsi, En 1964, Franco sera directeur seconde équipe pour le Falstaff d’Orson Welles, ce qui, il faut dire, n’est pas donné à tout le monde.

Sa période années 60 recèle quelques perles. Aujourd’hui, déclaré réalisateur culte, il est l’objet d’une rétrospective à la cinémathèque des grands boulevards, (pour ceux qui sont sur Paris) et Mad Movies, le magasine français consacré au fantastique (même si ce n’est plus ce que c’était), diffuse en DVD quelques uns des films marquant du cinéaste.

L'horrible Dr Orloff est son film phare, avec l’inévitable Howard Vernon, fidèle entre les fidèles, qui débuta dans le rôle de l’officier allemand du Silence de la mer de Melville en 1946. Le sadique baron Von Klaus suit, reprenant l’atmosphère d’épouvante à mi chemin entre les films anglais de la Hammer et les inoubliables contes terrifiants de l’italien Mario Bava. Ce mois ci, vous pourrez découvrir Les maitresses du Dr Jeckyll (les titres, quelle poésie !!) qui cache de nouvelles aventures du personnage fétiche d’Orloff.

Attentions, ne vous méprenez pas ! Si l’on peut parler pour ces films de sadisme, de terreur ou d’érotisme, ceux ci sont bien gentils pour notre époque de sexe et de violence. En fait de belles dénudées fouettées par des aristocrates pervers, il n’y a guère plus que dans un épisode d’Angélique, la marquise des Anges !

Mais il faut avouer que ces films dégagent un charme étrange, une poésie fantastique basée sur l’usage du noir et blanc, de cadrages expressionnistes, un véritable talent pour faire naître l’angoisse d’un escalier ou d’un bruit d’horloge vers minuit. Franco révèle à l’occasion son admiration pour les maîtres que furent Jacques Tourneur, Terence Fisher, Fritz Lang ou Tob Browning. Et puis je suis assez sensible à ses personnages, simples mais bien campés, souvent surprenants dans leur décontraction où leur folie.