30/05/2010
Cannes 2010 : d'autres films encore
J'ai manqué les premiers jours du festival et quand je suis arrivé, mes amis avaient leur air des mauvais jours. La sélection officielle a déçu largement. Je dois dire qu'à la lecture du programme, fin avril, je n'avais guère été enthousiaste. En y réfléchissant, c'est souvent ce qui se passe après une grande année et 2009 était une sacrée grande année. Pourtant le palmarès est remarquable, le jury ayant su « détecter le grand cinéma partout où il rodait » comme je l'ai lu très justement dans Libération.
Assez caractéristique est le cas de La nostra vita de Daniele Luchetti. Proche de Nanni Moretti qui a produit ses premiers films, Luchetti fait un cinéma sensible et son film, avec le thème du deuil, fait irrésistiblement penser à La stanza del figlio (La chambre du fils – 2001). Mais question mise en scène, Luchetti n'est pas un foudre de guerre. La nostra vita est tourné caméra à l'épaule, toujours proche de son acteur, Elio Germano qui porte le film par la sincérité et l'énergie de son jeu. Luchetti joue le jeu du mélodrame résolument, c'est plein de vie et de détails qui sonnent juste, mais si son film accroche, il ne passionne jamais. Il lui manque l'intensité, la fougue, la tension des plus belles réussites récentes de Marco Tullio Giordana, Matteo Garrone ou Michele Placido, sans parler du sens plastique d'un Michele Soavi ou du Vincere de Marco Bellocchio. Le plus étonnant peut être dans ce film c'est sa résolution, prenant le contre-pied des multiples options dramatiques qui s'offraient à lui (et qui l'auraient sans doute disqualifié). Donc le prix d'interprétation pour Germano se justifie pleinement mais il n'y a pas des pages à écrire sur le film.
Un cran au dessous, Fair game de Doug Liman fait partie de ces films dont on s'est demandé ce qu'ils fichaient là. Non qu'il soit désagréable mais c'est un produit de facture courante, bien fait et correctement joué mais sans surprise avec une mise en scène sans écart qui tire à la ligne et referme bien la porte en partant. Une seule belle idée dans cette trop classique histoire de manipulation (l'histoire vraie d'une agente de la CIA balancée par la Maison Blanche parce que son mari avait dénoncé les mensonges de l'équipe Bush junior à propos des armes de destruction massive en Irak), l'actrice Naomi Watts se rend à la convocation de la commission d'enquête et le film se conclut sur les images de la véritable Valerie Plame, dont elle joue le rôle, déposant devant la-dite commission. C'est dommage, c'est pendant le générique de fin.
La grande nouvelle du festival, c'est quand même la fin heureuse de l'imbroglio juridique qui nous privait des films de Pierre Etaix. Désormais, il a récupéré les droits de son oeuvre et les films ont été restaurés et ressortiront en juillet. Pour fêter cela, il est venu présenter Le grand amour qui date de 1969. C'est une merveille d'humour et d'invention, bien dans la lignée de ses compères Jacques Tati et Jerry Lewis. Il y a un amour du gag qui est enrobé d'une mise en scène élégante, tendue vers un simple geste parfois, juste une attitude, un mouvement suspendu. Et puis ce film tellement ancré dans le quotidien prend tout à coup des directions inattendues comme ce rêve incroyable dans lequel tout le monde se déplace en lit et ou la sublime Nicole Calfan, en nuisette juste ce qu'il faut de transparent, fait du stop au bord de la route. Non mais, vous mesurez bien la portée de cette vision ? J'en suis encore tout ému. Dans le registre purement burlesque, il y a une scène de dispute où le mot séparation est pris au sens littéral et qui est d'anthologie. Un peu de grand cinéma, cela fait toujours du bien. Vivement juillet.
Conclusion, Godard m'a bien aidé à me mettre dans le bain et je l'en remercie parce que j'étais à deux doigts de faire l'enfant boudeur. J'ai terminé le festival en me disant que, finalement, Cannes c'est un bien bel endroit pour voir des films, malgré tout ce que l'on dit, moi y compris. Sur ces fortes considérations, je me lance dès la semaine prochaine dans le petit jeu des palmes. Bonjour chez vous.
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19/05/2010
Cannes jour 4
Photographie : Carlotta Films
Petit message rapide : pendant qu'y en a des qui vivent ce qu'il faut bien appeler l'enfer cannois, y'en a d'autres, ici, là et là par exemple, qui s'amusent à revisiter les palmes depuis l'aube des temps... euh, du festival. Où va t'on ? Promis, dès la fin de cette rude semaine, j'y vais aussi.
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03/07/2009
Il Etaix une bonne nouvelle
Nous allons enfin pouvoir revoir (ou découvrir) Yoyo, Le soupirant et les autres. La nouvelle est tombée vendredi dernier. Après des années de procédure, le tribunal de grande instance de Paris a tranché : Pierre Étaix et Jean-Claude Carrière ont été rétablis dans leurs droits et vont pouvoir entreprendre le travail de restauration et de diffusion des cinq films bloqués depuis trop longtemps. Dans la foulée de l'action menée par de nombreux sympathisants s'est créée l'association "Il Étaix une fois...". Cette association s'est fixée deux objectifs, à savoir favoriser la transmission du patrimoine artistique de Pierre Étaix, et apporter une assistance technique, logistique, juridique, matérielle ou financière aux auteurs rencontrant des difficultés pour produire, exploiter, diffuser et jouir librement de leurs œuvres. Je ne voudrais pas être pessimiste, mais il risque d'y avoir du boulot. Pour en savoir plus vous pouvez visiter le site.
Contact : etaixasso@gmail.com
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19/04/2009
Pour Pierre Etaix
"Deux fois dans ma vie j'ai connu le sens du mot génie. La première fois en regardant dans le dictionnaire, la seconde fois en rencontrant Pierre Etaix » Jerry Lewis.
Dans la série « le monde merveilleux des droits d'auteur », il y a l'histoire de Pierre Etaix. Si son nom parle encore à nombre de cinéphiles, ses films tendent à devenir un simple souvenir prestigieux parce que, tout simplement, il n'est plus possible de voir ses films. Etaix n'y est pour rien. A quatre-vingt ans, il n'a plus le droit de montrer ses propres films. Ses cinq longs métrages (dont quatre co-écrits avec Jean-Claude Carrière) sont aujourd'hui totalement invisibles, victimes d'un imbroglio juridique scandaleux qui prive les auteurs de leurs droits et interdit toute diffusion (même gratuite) de leurs films. Pour avoir les détails, vous pouvez regarder ce joli petit film :
Il y a quelques temps que circule une pétition, notamment sur Kinok. En juin 2008, 16 000 signatures (dont la mienne) ont été remises aux avocats de Pierre Etaix et Jean-Claude Carrière. Visiblement, ce n'était pas assez. Le 28 novembre 2008, les auteurs se sont vu refuser le droit de procéder à la restauration de leurs films (une restauration pourtant jugée urgente et dont le financement était assuré). On pourrait appeler cela non assistance à oeuvre en danger. Mais bon, les amis du cinéaste n'ont pas désarmé et lancent un nouvel appel. L'objectif est d'atteindre 50 000 signatures et de remettre la pétition à madame Albanel, la hum-ministre de la hum-culture pour l'ouverture du festival de Cannes. Je ne suis pas d'assez bonne humeur pour être optimiste, mais on ne sait jamais.
Alors si vous avez envie de revoir ou de découvrir les films de Pierre Etaix correctement, si vous estimez comme moi que ce genre de situation est inadmissible par principe, si vous estimez qu'il serait lamentable que la seule façon à l'avenir de voir ces films serait de passer par des copies approximatives issus de réseaux que hadopi réprouve, il vous reste à signer la pétition. C'est par là.
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