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13/01/2012

Paris la nuit

philippe lefebvre

A propos d'Une nuit, le nouveau film de Philippe Lefebvre, j'aimerais au moins pouvoir dire un mot pour les acteurs que j'apprécie. Roschdy Zem a la gueule de l'emploi. Il me fait penser à Lino Ventura dont quelqu'un avait écrit qu'il restait passionnant même de dos. Mais Ventura dans un film insipide, et il en a fait, ne pouvait à lui seul en relever la fadeur. Zem pareil. Sara Forestier est toujours aussi piquante et belle. Le problème ici c'est qu'elle n'est pas filmée. Je veux dire par là (par ici aussi d'ailleurs) qu'elle est là mais que Lefebvre ne semble intéressé ni par le personnage qui reste lisse jusqu'aux cinq dernières minutes (elle fume, elle conduit, elle attend), ni par l'actrice, ce qui est fort dommage quand on a un visage pareil devant la caméra. Lefebvre la laisse dans le flou ou dans l'ombre. Rien, pas un plan malgré Paris la nuit où l'on soit ému, où l'on soit saisi de beauté, pas un geste, de ces gestes inventifs et excitants qui n'appartiennent qu'au cinéma et qui font toucher le film noir au sublime. Zem a plus de chance, il est filmé en quelques jolis portraits, Paris la nuit, la douleur du loup solitaire, mais rien qui décolle vraiment. Après Le petit lieutenant, Polisse et ces polars où Gérard Lanvin et Daniel Auteuil serrent les dents avec Daniel Duval en arrière-plan, Une nuit confirme que Drive est un film sublime et permet de mieux comprendre pourquoi. Déjà, si les réalisateurs lâchaient la pédale de la caméra portée et le style Darren Aronovsky, il y aurait du mieux. J'ai même des frissons dans l'échine quand je lis ici (et là aussi) des références à Melville, Jean-Pierre, qui jamais caméra ne porta. Inutile d'aller chercher si loin dans le temps ni l'espace. Il suffit de voir les trois premiers plans de Lefebvre, Paris la nuit, tristes images numériques avec lumière un peu dorée qui annoncent qu'il ne va rien se passer de bien palpitant. Les voir et repenser aux trois premiers plans de Montparnasse de Mickael Hers, Paris la nuit, plans au piqué incroyable et à la richesse des éclats de lumière, dont la beauté coupe le souffle, qui donnent la sensation de l'inédit et annoncent qu'il va se passer quelque chose de pas banal. Tiens se dit-on, il y a un regard. Chez Lefebvre, il y a certes quelques idées, et même des bonnes, mais elles restent des idées et ne passent pas le regard.

Photographie © UGC