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08/12/2007

Luc Moullet, sur la toile

Pour partir en exploration, une liste non exhaustive.

A tout seigneur... Luc Moullet par le Dr Orlof :

  • Anatomie d'un rapport (lire)
  • Brigitte et Brigitte (lire)
  • Les contrebandières (lire)
  • Genèse d'un repas (lire)
  • Le prestige de la mort (lire)
  • Une aventure de Billy le Kid (lire)

La rétrospective que lui a consacrée le festival Côté Court en 2001.

La fiche de Luc Moullet avec biographie et filmographie sur le site de la BiFi.

La fiche Wikipedia de Luc Moullet (l'anglaise est plus complète que la française !)

« Luc Moullet le franc-filmeur » un article de l'Humanité par Jean Roy.

Un entretien avec Luc Moullet sur Libération à l'occasion de la sortie de Le Prestige de la mort.

A propos des Naufragés de la D17 par Claude-Marie Trémois, un article publié par la revue Esprit (2002) sur Cinéchroniques.

« Luc Moullet, cinéaste unique à découvrir absolument », chronique du coffret par Jean-Jacques Birgé.

Sélection Luc Moullet, livres et films sur La Boutique

07/12/2007

Luc Moullet, cinéaste court

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Essai d'ouverture, c'est un dingodossier ou si vous préférez, une rubrique à brac. Aussi ai-je pensé demander l'avis d'un expert, le Docteur Burp, désagrégé en science et cinématographe, pour vous présenter l'excellente comédie courte de Luc Moullet. Merci docteur.

Dr Burp : Il vous en prie.

Inisfree : Docteur, de quoi parle ce film ?

Dr Burp : Comment voulez vous que je le sache, je ne l'ai pas vu.

Inisfree : Et son auteur, Luc Moullet ?

Dr Burp : C'est un barbu. Et vous savez ce que l'on dit : « Malheur aux barbus ! ».

Inisfree : Mais encore ?

Dr Burp : Qui n'a jamais connu la bouteille de Coca ® standard de 1 l en verre avec son bouchon de métal mou aux ailettes tranchantes ne peut comprendre l'importance de ce film. Qui n'a jamais subit la frustration du pas de vis qui patine et bloque l'admirable mécanisme d'ouverture au moment de la soif la plus intense ne peut saisir l'enjeu dramatique majeur de ce film. Qui n'a jamais cherché fébrilement la pince multiprise libératrice sans la trouver ne peut appréhender le cri de rage que pousse ce film sous un humour glacé et sophistiqué (que nous apprécions tous ici).

Inisfree : Et la forme ?

Dr Burp: Le plan ! Le plan est tout. Pas de champ – contrechamp mais un champ d'expérience. Des machines improbables, le réel détourné, des dispositifs surréalistes et un suspense insoutenable : ouvrira ? Ouvrira pas ?

Inisfree : Est ce un film poétique ?

Dr Burp: Ne soyez pas grossier.

Inisfree : Est-ce un film politique ?

Dr Burp : C'est le récit d'un mécanisme aliénant vaincu par l'esprit humain mais nourrissant pourtant ce même mécanisme de soumission à travers cette victoire même. La portée politique de cette oeuvre serait évidente pour un enfant de quatre ans. Alors trouvez un enfant de quatre ans parce que moi, je m'y perds.

Inisfree : Pouvez vous, en, guise de conclusion, nous situer ce film court dans la carrière de son auteur ?

Dr Burp : Essai d'ouverture est un film un petit peu à l'ouest, à l'est de Canton. Ah ! Mais ça me donne soif vos histoires, je prendrais bien un Coca ®. Ah non, pas en canette, pas en canette !

Le film sur Dailymotion

Dédié à Gotlib, Goscinny et Groucho Marx

06/12/2007

Luc Moullet, commentateur

Chez Luc Moullet, le critique et le cinéphile dont indissociables de l'oeuvre du réalisateur. Je vous propose de découvrir, sur le site des éditions Montparnasse, un extrait du film de Howard Hawks, Bringing up baby(L'impossible monsieur bébé – 1938) commenté par Moullet soi-même, ce qui permettra pour ceux qui ne le connaissent pas, de découvrir sa voix caractéristique. Il s'agit du passage où le personnage de Cary Grant s'agite habillé d'une robe de chambre de Katharine Hepburn et lance l'immortelle réplique : « Because I went GAY all of a sudden!  ». (Lien)

Et je profite de l'occasion pour répercuter l'information donnée par Breccio, l'homme des heureuses coïncidences, en commentaire de la note précédente : Luc Moullet a également commenté le film de Cécil B.DeMille Male and female (L'admirable Crichton – 1919) paru chez Bach Films (Lien).

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Photographie Cinémathèque de Belgique

05/12/2007

Luc Moullet, théoricien

Autant l'avouer d'emblée, je connais très mal le cinéma de Luc Moullet. Je n'ai vu que son petit bijou de court-métrage, Essais d'ouverture, tourné en 1989 et dont l 'humour glacé et sophistiqué me ravi. Ce handicap même renforce ma détermination à participer à la croisade du bon Dr Orlof : oui, nous voulons voir les films de Luc Moullet en salle. Oui, nous voulons répandre son nom et son oeuvre sur la terre de France, vers l'infini et au-delà. Oui, nous voulons qu'il prenne place en première partie de soirée sur les chaînes de télévision publiques. Oui, nous voulons que le bruit médiatique de « Luc+Moullet » dépasse celui des Luc non Moullet voire des Moullet non Luc. Aussi, répondant à l'appel du Dr Orlof, je joins mes forces à cette noble entreprise « Et sans trêve ni repos, j'irais cherchant l'Eldorado ».

 

Il faut dire que l'homme force la sympathie et que je lui dois beaucoup. Parmi les cinq ou six livres sur le cinéma que j'ouvre, lis et relis fréquemment, il y a celui qu'il écrivit en 1993 : Politique des acteurs (éditions des Cahiers du Cinéma). A l'époque, quand je l'ai acheté, je ne savais pas qui était Luc Moullet. Il paraît que c'était alors son retour à la critique. Mais je m'en fichais bien, le livre proposait une analyse du travail de quatre de mes acteurs fétiches : Cary Grant, James Stewart, Gary Cooper et, surtout, John Wayne. Or pour une large majorité de cinéphiles de la fin des années 60 au milieu des années 90, l'acteur de cinéma dans toute sa splendeur c'est plutôt Robert De Niro, Dustin Hoffman ou Gérard Depardieu. L'acteur classique, hollywoodien de surcroît, n'est guère estimé. Au mieux, il a droit à un statut d'icône façon Bogart. Je caricature à peine. Sur la bande des quatre, Stewart est sans doute le mieux loti de part ses prestations torturées chez Mann et Hitchcock. Et puis il a fait du théâtre comme Henry Fonda et c'est bien vu. Mais les autres, ceux dont le jeu si cinématographique ne se voit pas, sont aimés sans être bien étudiés, ni compris.

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Moullet est plus perspicace. Armé d'un magnétoscope, d'un oeil neuf affûté et d'un esprit vif, il décortique l'essence du jeu de ses sujets d'expérimentation, quatre univers passant surtout par l'expression corporelle, et y rattache des thématiques déclinées d'un réalisateur à l'autre. Il dessine ainsi quatre oeuvres cohérentes et belles. Intuition géniale !

C'est Cary Grant et son travail sur les lignes de son corps, cassé, tendu, courbé, figé dans le mouvement, élans interrompus et toujours repris, comparables en cela à ceux d'un Buster Keaton. C'est le visage minéral (comme l'a écrit JLG) de Gary Cooper, bloc héroïque autour duquel tendent tous les autres éléments du film. Travail d'épure du geste et de l'expression. Art sublime du sentiment donné par un sourcil relevé. C'est James Stewart et ses jeux de mains magnifiques dont la richesse nous est révélée. Ses nombreuses trouvailles en matière de diction : cris, bredouillement, paroles cassées par la colère, l'enrouement, la nourriture (il serait le premier à avoir dit son texte en mangeant dans un film). C'est enfin, et surtout pour moi, une étude renversante sur le jeu de John Wayne. « Je ne savais pas que ce fils de pute pouvait jouer » avait dit John Ford en voyant Red River de Howard Hawks en 1946. Wayne avait quand même cinquante balais. Un jeu qui apparaît aujourd'hui comme étonnamment moderne par son économie et sa finesse. Et ce bassin de JW ! Cette façon de bouger comme un danseur ou comme un grand chat. Moullet décrit ici en des passages exaltants une oeuvre inédite autour de la décrépitude construite à trois : Ford, Hawks et Wayne. Les deux premiers à partir de Red River se renvoyant le troisième à travers autant de variations sur la vieillesse et le temps.

Qu'est-ce qu'un grand critique de cinéma sinon quelqu'un qui vous propose des clefs pour une oeuvre et, mieux, vous suggère une nouvelle façon de la voir ? C'est le travail de Truffaut sur Hitchcock, de Ciment sur Kubrick. A cette aune, Luc Moullet est un grand critique. Je ne vois plus un film avec James Stewart de la même façon depuis son livre. Je rive mon regard sur le bas de l'écran et suit le ballet de ses mains expressives et peste contre les sous titres qui me gênent parfois. Rasséréné désormais dans mon amour immodéré pour le « Duke », je suis devenu plus sensible à la dimension de comédie délicatement amère chez Ford et Hawks. Je me régale de la musicalité de scènes que j'avais déjà vues dix fois. Je trouve des motifs d'enthousiasme dans des films mineurs auxquels le jeu de Wayne donne des connivences secrètes avec les films des grands maîtres.

Luc Moullet, avec sa politique des acteurs, a rafraîchît mon regard et je l'espère, l'a élargit. Pour cela qui n'est pas rien, merci monsieur Moullet.

 

Le livre