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« Nice Guy Eddie | Page d'accueil | Cher Nanni »

01/02/2006

Deuxième couche

Ca commence à tirer dans tous les coins. Je vous rassure de suite, je ne vais rien rajouter à mon texte de ce week end sur le Munich de Steven Spielberg. Après une mise en jambe verbale à la radio, je suis partit en exploration sur la Toile pour rencontrer des frères d'armes ou livrer le combat, si je puis (ou mourrir sur place s'il le faut). Editorial surprenant de Jean Daniel dans le Nouvel Observateur qui met le doit sur quelque chose, d'autant plus surprenant que l'hebdomadaire a été plutôt dur avec le film. Coincidences de vues chez Fluctuat tandis qu'à l'inverse, Filmbrain étrille le film et donne lieu à une discussion des plus vives quoiqu'en anglais, égrenant la litanie des reproches habituels. Jugement de Salomon sur Ecran Large et Télérama qui publient deux avis opposés. François Dubuisson, dans la Libre Belgique, fustige l'ambivalence du film avec un argument, "l'incapacité à représenter l'autre" qui a pas mal servi contre Guédiguian, Loach ou Watkins. Je signale aussi, envoyée par un ami, la lecture orginale proposée par les Inrocks : la fracture cinématographique française incarnée par les deux Mathieu, Amalric et Kassovitz.

 

Le texte le plus passionant vient du Dr Devo de Matière Focale. Une belle analyse, fouillée, de quelqu'un qui n'a pas vu le film avec les pieds. J'y retrouve pourtant cette caractéristique qui motivait le fond de mon texte, cette espèce d'impossibilité intellectuelle à concéder au cinéma spielberguien autre chose qu'une virtuosité technique. Et de trouver absolument la faille du discours qui discrédite l'ensemble. Pourtant, nom d'un petit bonhome, il fait parler ce film. Et réfléchir. Il y a donc bien quelque chose là dedans, quelque chose au delà du thriller, au delà du bien et du mal, au delà du "tu ne tueras point", au delà de "l'inévitable scène du sauvetage d'un enfant". Il suffit de comparer les différents points de vue pour voir que chacun, en positif ou en négatif, voit des choses différentes. Pourquoi écrire des dizaines, des centaines de lignes sur un film qui serait si basique ? L'humanisme militant de Spielberg serait-il une tare insurmontable ? A tout prendre, je préfère les réactions de rejet global, ceux qui se sont ennuyés, endormis, qui n'adhérent pas au discours, qui ne partagent pas le regard. Personnellement je n'aime pas le cinéma de Michael Hanneke, ni en gros, ni en détail, je ne partage pas sa vison de l'humanité. Je n'éprouve donc pas vraiment le besoin d'en parler. J'évite aussi soigneusement ses films. Je comprends donc mal ceux qui arrêtent Spielberg à Jaws et continuent, trente ans après, à aller voir ses films. Maso, non ?

 

Bonus : un entretien avec le réalisateur sur le site de Télérama

07:05 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (4) |  Facebook |  Imprimer | |

Commentaires

A mon tour, une deuxième couche : je suis déçu et dégoûté, Vincent, par tous les articles et par l'entretien que vous avez mis en ligne. La question principale était : en tant que juif américain et ardent défenseur de l'Etat d'Israël, et après ses caricatures d'Arabes dans "Les Aventuriers de l'Arche perdue", comment Spielberg allait-il montrer l'Ennemi? Or non seulement la question est absolument, complètement éludée, mais de plus elle se renverse en son contraire : la trop ou pas assez grande humanité des agents secrets israéliens du film !

Le seul à dire quelque chose de la place et de l'image données par Spielberg aux Arabes dans le film, c'est le dégoûtant Jean Daniel, qui loue SS d'avoir eu "l’audace de traiter un tel sujet sans, à aucun moment, ni salir ou même seulement caricaturer les auteurs palestiniens de cette monstrueuse opération"!!! Même pas le terroriste de la fin, paniqué au point d'avoir la bave aux lèvres mais tout de même assez lucide pour diriger son arme contre les otages (alors qu'historiquement le fait n'est pas avéré)? Selon Fluctuat, SS prend même le risque "d’humaniser le terrorisme"!! Encore un peu et ces critiques exigeraient que la mise en scène appuie encore un peu plus sur le côté pervers de ces barbares arabes!.. Dr Devo écrit quant à lui que SS a décidé de "ne pas faire un film directement politique, ne pas faire un film à thèse" . C'est ce que contredisent tous les discours tenus dans le film par les uns et par les autres, le questionnement "moral" (tuer ou pas) étant quant à lui tout à fait artificiel et plaqué, si on le compare aux propos de Golda Meir, du boss d'Avner, du reste de son équipe ou, surtout! de sa mère, qui ne veut rien savoir de ce qu'il a fait et prétend savoir d'instinct qu'il a agi au nom des juifs massacrés par les nazis et pour que les juifs aient enfin un foyer! Plan suivant? Avner, silencieux, le bec enfin cloué par l'argument massue.

Avec "Munich", on a affaire à un film de propagande d'autant plus dangereux qu'il ne donne pas l'impression d'en être un.

Écrit par : Hyppogriffe | 01/02/2006

Je n'ai pas écrit pour rire "le dégoûtant Jean Daniel". JD est l'auteur des lignes suivantes, qui expliquent en partie son aveuglement face à la caricature qui est faite des Arabes dans "Munich" et sont parues le 24 avril 2003 dans "Le Nouvel Observateur" :

"Ce que personnellement j'ai appelé "le crime de Le Pen" n'est évidemment pas d'avoir évoqué les questions "normales" d'insécurité et d'immigration. C'est au contraire et précisément d'avoir empoisonné à tel point les débats sur ces questions qu'il a culpabilisé ceux qui prétendaient les affronter. Par crainte de fortifier Le Pen, Valéry Giscard d'Estaing a dû retirer le mot "invasion", Jacques Chirac s'est excusé d'avoir évoqué "les odeurs", Laurent Fabius s'est repenti d'avoir déclaré que Le Pen faisait de mauvaises réponses à de bonnes questions, Michel Rocard passe son temps à corriger une simple observation selon laquelle la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, et Edouard Balladur s'en veut d'avoir préconisé la préférence nationale."

Écrit par : Hyppogriffe | 01/02/2006

Pour être honnête, je dois dire que l'article de "La Libre Belgique" pose les bonnes questions et y répond plutôt bien : Avner n'est absolument pas critiqué pour son aveuglement patriotique, mais à travers lui sont soulignées (un peu d'ailleurs comme une excuse au parti-pris pro-israélien du film) la dureté connue des armées et la difficulté des missions militaires.

Écrit par : Hyppogriffe | 01/02/2006

Cher Hyppogriffe, désolé de faire remonter votre colère, parce que c'est bien de colère qu'il s'agit et que l'on sentait dès que vous avez appris l'existence de ce film. Que vous soyez déçu, je le comprends, dégoûté est peut être un peu fort. En faisant mes recherches, j'ai été surpris de ce que chacun voyait dans le film et qui est certes trés éloigné de ce que vous y voyez mais également de ce que j'y vois (et j'ai volontairement ignoré les éloges style thriller impeccable). Cela peut (devrait) nous inciter à réfléchir à la façon dont nous percevons le film. Qu'avons nous vraiment vu ? Chacun n'applique-il pas sa grille de préjugés à-priori ? Cette multiplicité de points de vue recoupe d'une certaine façon la façon dont on perçoit le conflit israélo-palestinien et illustre la difficulté à trouver un terrain d'entente là-bas comme ici. Ce n'est pas le lieu pour une telle discussion mais je pense, si, si, être assez proche de votre position.

Jean Daniel, je ne sais pas, je ne suis pas lecteur du Nouvel Obs (ni de Télérama d'ailleurs). J'ai trouvé étonnant qu'il se fende d'un éditorial sur le sujet après que Pascal Merigeau ait descendu le film.

Écrit par : vincent | 01/02/2006

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