Films de vacances (24/03/2009)

Je suis donc parti passer une semaine à la montagne histoire de prendre l'air et de monter à ma fille comment on fait de la luge et comment on monte un bonhomme de neige. Et puis j'ai emmené quelques films aussi. Pour commencer, je suis tombé à la télévision sur Gentlemen Prefer Blondes (Les hommes préfèrent les blondes - 1953), le film de Howard Hawks avec La Monroe et La Russel. Hélas, c'était La version française dans laquelle même les chansons sont doublées. C'est irregardable, enfin inécoutable. J'ai tenu malgré mon amour pour ce film, une vingtaine de minutes. Je me suis consolé avec The Life and Death of Colonel Blimp (Colonel Blimp - 1943) de Michael Powell et d'Emeric Pressburger film fleuve aussi drôle qu'émouvant et fondamentalement beau. Comme je l'ai dit chez Christophe, je me sens assez incapable d'écrire sur un tel film. Je trouve difficile d'exprimer l'enchantement constant que me procure la mise en scène virtuose, le panache de certaines scènes et le visage de Deborah Kerr.

Devoir de vacances avec Love in the afternoon « Ariane », l'excellente comédie de Billy Wilder avec Audrey Hepburn, Gary Cooper et Maurice Chevalier. Je voulais monter ce film à ma compagne, et ça me permet de le voir une seconde fois pour travailler ma chronique pour Kinok. Contrairement au souvenir que j'avais du film, c'est véritablement une très belle oeuvre placée sous le signe de Lubitsch et il me faudra plusieurs jours pour accoucher de mon texte.

Comme là nous avions le temps, nous en avons profité pour montrer de nouvelles choses à notre fille. Je lui ai dégoté Le chien, le général et les oiseaux (2003) un dessin animé de Francis Nielsen. C'est l'histoire d'un général de l'armée russe qui ne se remet pas d'avoir sacrifié les oiseaux de Moscou pour brûler la ville envahie par l'armée de Napoléon. Devenu vieux, il ne peut se déplacer sans un parapluie car les oiseaux rancuniers lui fientent dessus. Il trouvera la rédemption et le pardon grâce à un chien pas banal. Le conte est joli et le graphisme original. Mais si ma fille a été captivée, le grand air a provoqué rapidement ma somnolence et je vais devoir revoir la chose avant de vous en dire plus.

Un soir un peu tard, seul dans le silence des montagnes sublimes, je me suis regardé Bowfinger, une comédie signée Franck Oz de 1999. Écrit et joué par Steve Martin dont l'humour n'est jamais bien passé chez nous, le film est une ode pleine de bons sentiments au plaisir de faire des films. Martin joue un réalisateur-producteur minable mais sincère qui décide de faire un film avec une grande star qu'il va filmer à son insu. La star, c'est Eddie Murphy qui, comme à son habitude, joue plusieurs rôles dont celui de son jumeau pas célèbre du tout. C'est assez drôle, un cran au dessous du Ed Wood de Burton où du récent Be kind rewind de Gondry. La mise en scène de Oz est assez plate mais respecte les numéros de comédiens qui se régalent visiblement comme Murphy en Star paranoïaque, Terence Stamp en gourou ou Heather Graham en starlette nymphomane.

Madagascar de Tom McGrath et Éric Darnell est une grosse production Dreamworks d'animation en images de synthèse. Ça pète dans tous les sens, c'est très coloré, c'est d'un rythme très rapide, c'est bourré d'idées et ça brosse le spectateur dans le sens du poil. Pour une enfant de trois ans, je pense que c'est un peu trop intense et un peu trop référencé. Cette fois, c'est ma fille qui a décroché. La parodie plutôt amusante du plan final de Planet of the apes (version 1968) avec Charlton Heston désespéré au pied de la statue de la liberté, ça ne lui a pas dit grand chose. Côté esthétique, je ne suis pas très fan du genre mais ici, je reconnais que j'aime beaucoup le commando des quatre pingouins.

Marcello otto e mezzo.jpg

Le suivant, c'était une séance de rattrapage pour ma compagne. Et puis c'est bien tombé, avec toutes ces discussions sur Gran Torino. J'appréhendais un peu de revoir Million dollar baby. C'est le premier film de Clint Eastwood dans sa dernière période que je revois. Je suis resté sous le charme, plus attentif à sa mise en scène qui est quand même l'une de ses plus travaillées. Dans les compositions très sombres, notamment dans la salle de boxe, il y a une beauté qui évite le côté ostentatoire de films plus « prestigieux » (disons Mystic river) mais franchement affirmée contrairement à son dernier opus qui travaille plus dans la discrétion. J'ai bien sûr été tout particulièrement attentif au traitement de la famille de Maggie. Eastwood ne les ménage pas, mais en même temps, ils sont les briseurs de rêve. Je ne crois pourtant pas qu'il faille y voir un équivalent aux « salauds de pauvres » d'Autant Lara. Après tout, tous les personnages de ce film sont des gens durement touchés par la vie, comme Scrap, le personnage de Morgan Freeman ou le jeune Danger. Ce qui les différentie, c'est leur attitude en tant qu'individus. Et c'est de façon profondément individuelle qu'agit, in fine, Frankie.

Retour à un peu de légèreté avec Anastasia, le dessin animé réalisé par Don Bluth et Gary Goldman en 1997. C'était le premier dessin animé produit alors par la 20th Century Fox et j'en avait gardé un souvenir assez fort. Somptueux, le film mêle adroitement les techniques classiques d'animation avec des effets numériques (la séquence du train). Il y a des plans de toute beauté, vastes fresques minutieusement animées : les scènes de bal, la chorégraphie dans les enfers, la séquence de la tempête en mer. Le couple Anastasia / Dimitri fonctionne sur les ressorts les plus classiques de la comédie des années 30/40 avec des dialogues brillants illustrant les disputes des amants en devenir. C'est du travail d'orfèvre. Visiblement, le film fonctionne à ses différents niveaux et si je suis resté sensible au spectacle et à son humour jamais niais, ma fille est restée bouche bée par cette histoire de princesse orpheline, appréciant les nombreuses séquences musicales et le méchant Raspoutine aux morceaux amovibles. La délicieuse chauve-souris Bartok permet en outre de désamorcer les moments les plus terrifiants.

Soirée classique avec le Otto e mezzo (8 ½ - 1963) de Federico Fellini. Je voulais, là encore le montrer à ma compagne qui ne le connaît pas encore. Cette fois, c'est elle qui a piqué du nez à mon grand désappointement. Il faut dire que j'ai récupéré l'édition Criterion, de toute beauté et bourrée de bonus, mais sans sous titrage français. Comme ma compagne ne maîtrise pas l'italien, ce n'était pas évident de suivre avec les sous titres anglais. J'ajouterais que j'ai dû moi-même m'y reprendre à deux fois avant d'apprécier le film. Aujourd'hui, je dois en être à ma huitième vision, et je commence à bien circuler dans les méandres de ce film labyrinthe. J'ai désormais tout le temps de m'attarder sur les plans sublimes baignés de la lumière en noir et blanc de Gianni Di Venanzo (que son nom soit loué), et sur les visages de Claudia Cardinale, Anouk Aimée, Barbara Steele, Sandra Milo, Caterina Boratto et Rosella Falk. Assez, c'est trop, mon regard chavire...

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Conclusion de la semaine avec un ultime dessin animé, mais des meilleurs : La prophétie des grenouilles (2003) de Jacques-Rémy Gired, auquel on doit L'enfant au grelot et le récent Mia et le Migou. Conte humaniste et écologique, variation sur l'histoire de l'Arche de Noé, le film possède un graphisme simple et original. Un brusque déluge amène de nombreux animaux à se réfugier dans une grange montée sur une chambre à air (!) en compagnie d'une famille « recomposée », sous la direction d'un sympathique capitaine-fermier joueur de guitare. Herbivores et carnivores vont de voir se supporter et survivre grâce à une imposante réserve de pommes de terre. Il est amusant de constater que ce film aborde avec franchise le sujet que l'américain Madagascar élude hypocritement. Il s'agit dans les deux cas de l'improbable coexistence entre chasseur et proie. Gired montre, non sans humour mais avec franchise, les renards, lions et tigres plumer et embrocher des poulets dans une crise de violence dont ils seront, quand même, honteux plus tard. Ma fille a adoré (elle l'a déjà vu plusieurs fois) et semble bien comprendre les ressorts du film. J'avoue que pour ma part, j'ai un faible pour le couple d'éléphants auxquels Michel Galabru et Annie Girardot prêtent leurs voix. Le reste de la distribution n'est pas mal non plus avec Michel Piccoli, Anouk Grinberg, Jacques Higelin, Thomas Fersen et quelques autres.

Les meilleurs choses ont une fin, les vacances aussi. J'ai aussi vu Welcome en salle et il va falloir que je travaille là-dessus.

Photographies : capture DVD Criterion

23:14 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : howard hawks, michael powell, emeric pressburger, clint eastwood, billy wilder, franck oz, francis nielsen, jacques-rémy gired, tom mcgrath, Éric darnell |  Facebook |  Imprimer | |