La théorie du bon navet (13/04/2005)

Personnellement, j’aime assez voir à l’occasion un véritable bon mauvais film. Je ne sais pas si cela relève d’un goût pervers ou d’une soupape de décompression à une cinéphilie classique, mais j’aime le cinéma dans sa globalité ce qui inclus le navet authentique.

Attention à l’importance des expressions !
Série B se réfère à un phénomène économique, celui des films de « première partie », plus courts, au budget réduit. Une série B peut être un grand film. Et dans l’absolu, on ne fait plus de série B depuis plus de 30 ans sauf John Carpenter.
Série Z ne correspond à rien, si ce n’est une façon de dire que le budget comme les intentions sont particulièrement misérables. Mais si l’on recrute de bons navets dans les séries Z, on y trouve surtout des films insignifiants, ennuyeux et simplement mal fichus.

Alors, attention, un bon navet, tout d’abord, c’est rare. Pour approcher d’une définition, je dirais que le bon navet est d’abord réjouissant et généralement pas dans le sens que le réalisateur et son équipe ont voulu lui donner. Un bon navet est souvent drôle, mais involontairement. Un bon navet ne pratique pas le second degré, puisque c’est dans le décalage entre les intentions et le résultat que le spectateur va trouver son plaisir. Un bon navet doit se prendre, un peu, au sérieux et c’est pour cela que les comédies ne donnent qu’exceptionnellement de bons navets. Une comédie est faite pour faire rire. Si elle échoue, c’est qu’elle n’est pas drôle, donc elle devient nulle et ne suscite que l’affligement.
Le bon navet relève très souvent du cinéma de genre ou cinéma d’exploitation, peplum, fantastique, western, polar… mais pas toujours. Un film ambitieux qui se plante peut donner un joli navet. Ce n’est pas non plus un problème de budget, il existe de superbes navets qui ont coûté la peau des fesses.

Bon, alors, ce navet trois étoiles ? Et bien, c’est un film dont l’un, plusieurs ou totalité des éléments constitutifs est complètement à côté de la plaque. C’est un acteur particulièrement mauvais jusqu’au risible (Brigitte Nielsen dans Red Sonja), un scénario plein de trous et de clichés (Le Pacte des Loups, pas un film fauché, hein ?), des dialogues qui laissent sans voix (Les Guerriers du Bronx, au hasard), un doublage surréaliste (Le zozotement du héros de Doc Savage Arrive !), des effets spéciaux touchants de naïveté (le Sixième Continent et ses suites), ou un peut tout ça à la fois (Godzilla contre Megalon qui est une perle).

J’insiste sur le fait qu’il est difficile de faire un bon navet, car il faut tenir la distance et ne pas perdre le spectateur susceptible de sortir en se disant qu’il perd son temps et sa vie devant une daube. Non, il faut de la constance dans le ridicule, du renouvellement dans les situations improbables et, quelque part, une certaine foi dans le cinéma. Et c’est pour cela qu’on peut aimer le bon navet. D’autant que la part de naïveté inhérente au genre peut donner d’étranges moments de poésie pure comme chez Ed Wood.

Assez de philosophie, des actes ! Quelques photos (sous copyright) pour illustrer mon propos et un lien indispensable (merci à Yohan) : www.nanarland.com

Ce site est non seulement indispensable si vous voulez tout savoir sur Max Thayer et la version turque de Star Wars, mais il est hilarant, plein d’extraits vidéo et audio, de photographies et de chroniques et même de philosophie. Un « must » comme on dit outre manche.

En anglais, donc, un autre site tout aussi fourni avec de nombreuses vidéos : www.badmovies.org

Allez-y, vous n’en reviendrez pas

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