James Gray sur Foco (19/07/2011)
Il y a quelques temps, j'ai reçu la proposition de participer au numéro de la revue en ligne Foco consacrée au réalisateur James Gray. J'en remercie Bruno Andrade du blog O signo do dragao, son co-éditeur avec Felipe Medeiros. J'étais un peu intimidé, car Gray a suscité une abondante littérature et, si j'avais en son temps été sensible à la révélation de Little Odessa, je n'avais pas été entièrement convaincu par We own the night sur lequel il faudra certainement que je revienne. Mais c'était une bonne occasion de découvrir The yards que j'avais manqué. C'est désormais chose faite et le Foco n° 3 de juillet est en ligne et je me retrouve au milieu d'un superbe ensemble en portugais, espagnol, italien et français, avec notamment un texte de Christophe d'Avis sur des films. Une seconde partie regroupe un entretien avec Éric Rohmer issus des Cahiers du Cinéma n° 172 de novembre 1965, traduit en portugais par Felipe Medeiros, et plusieurs autres textes (en portugais et certains en français). Bonne lecture.
Le film qu'il faut faire – The yards de James Gray
Têtu. Stubborn comme disent nos amis anglophones. La détermination semble être le trait dominant du caractère de James Gray, l'un des réalisateurs américains les plus excitants de ces vingt dernières années. Il annonce la couleur dès The yards en 2000. Pas question, après le coup d'éclat de Little Odessa en 1994, de transiger sur le film qu'il voulait, tout au fond de lui, faire. Il mettra cinq années à monter The yards, puis sept années de plus après l'échec public du film, avant d'en proposer une version plus séduisante peut être, sans doute, avec We own the night (La nuit nous appartient) en 2007 qui, sans céder ni sur ses thématiques ni sur son esthétique, trouve son public et l'impose comme grand cinéaste classique de son époque. Rasséréné, Gray peut alors passer à autre chose et filmer la simple histoire d'amour de Two lovers l'année suivante. Quinze années, quatre longs métrages, mais James Gray a imposé James Gray au sein d'un système où règne le factice et le facile.
Rétrospectivement The yards est peut être le film essentiel de cette œuvre, son inflexion et sa clef, prolongement de Little Odessa et matrice plus âpre de We own the night. Le film contient cette obstination sans faille de James Gray et peut se lire comme métaphore de son propre parcours et des questions qu'il pose au jeune metteur en scène. Le film est à la fois celui qu'il veut faire, celui qu'il offre au public et une réflexion sur leur fabrication. A travers le personnage principal de Leo Handler joué par Mark Wahlberg, Gray donne un autoportrait dans lequel il exorcise ses peurs et ses doutes. Comment l'on peut se mettre à tourner en rond, comment l'on en vient à se livrer aux compromis, comment, à se laisser aller à sa pente naturelle, l'on en vient à trahir, à perdre son amour et au final, à se retrouver au même point qu'au départ.
Photographie © BAC Films
22:50 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : james gray, foco | Facebook | Imprimer | |
Commentaires
Bonjour Vincent,
Grand plaisir de relire sur "The Yards", premier film que j'avais vu de Gray, et qui m'avait immédiatement "attaché" à ce cinéaste. J'aime beaucoup votre texte : j'avoue que je n'avais même pas pensé à l'autoportrait déguisé.
Écrit par : D&D | 01/08/2011