Burton, Kubrick et chocolat (18/07/2005)
Tim Burton est un peu décalé par rapport aux réalisateurs américains qui se sont affirmés dans les années 70 et pour lesquels vous aurez compris mon goût profond. Tim Burton est un peu décalé de façon générale. Il fait pourtant partie de ceux qui restent intéressants à l'intérieur du système, de ceux qui ne s'y trouvent finalement pas si mal, de ceux qui ont su intelligemment composer avec lui. Grâce à ce décalage qui fait tout le prix de son cinéma.
Qu'attendre, à priori, d'une nouvelle adaptation de Charlie et la Chocolaterie, adaptation d'un classique de la littérature enfantine écrit en 1964 par Roald Dahl ? Attendre Burton et ne pas avoir d'à-priori, ce n'est pas beau.
Dans ce film, c'est une nouvelle fois le côté étrange de Tim Burton qui fonctionne, ce côté étrange que l'on a aimé dans Beetlejuice ou Edwards aux Mains d'Argent, ou Ed Wood. Ce côté qui fait qu'un jeune illustrateur veut entrer à tout prix chez Disney pour y faire un film comme Vincent, avec une star des films d'horreur (Vincent Price pour ceux qui n'ont pas vu ce petit bijou). Disney remerciera vite le jeune illustrateur. Il y a des choses avec lesquelles on ne s'amuse pas. Chez Burton, si, on peut s'amuser de tout. Des têtes coupées, des chiens raccommodés, des réalisateurs à pull angora.
Charlie et la Chocolaterie est un délice de double niveau. Au premier étage, un conte édifiant à la manière de James et la Pêche Géante (c'est aussi un conte de Dahl). Un monde coloré façon Oz, des numéros musicaux épatants, de l'humour, une morale familiale sans bavure. Au second étage, Burton se lâche comme rarement lors de la visite de cette usine sinistre extérieurement, angoissante à l'intérieur, construite en cercles comme l'Enfer de Dante. Ca commence avec ces marionnettes de cire qui se mettent à fondre comme dans le film avec... Vincent Price. Ca se poursuit avec l'apparition de Willie Wonka, Johnny Deep au mieux de sa forme, changeant d'expression toutes les secondes, qui m'est apparu comme une sorte de Michael Jackson, avec son visage blafard, inhumainement lisse, ses gants violets qu'il ne quittera jamais. Wonka-Jackson qui fait visiter son palais à des enfants, mais prudence, accompagnés d'un parent. Difficile de ne pas y penser. Wonka-Deep, c'est un peu le grand méchant loup de Tex Avery : on voit les dents. Ou plutôt, dans le contexte, la petite fêlure dont on ne sait jamais où elle va l'emmener. Tout cela nous met délicieusement mal à l'aise. Comme avec ces références insistantes à l'univers de Kubrick. Pas vraiment une référence pour enfants, non ? C'est pourtant avec les mots d'Orange Mécanique que Wonka-Deep répond à un sale gosse prétentieux. C'est pourtant autour d'une séquence de 2001 qu'est construite l'une des séquences clefs du film, critique en règle, bien que convenue, de l'influence de la télévision sur les enfants. Mal à l'aise, enfin, avec ces étranges Oompa Loompa , drôles, certes, mais quelque peu curieux, avec leur unique visage à la limite du zombie.
Convenue disais-je, oui, parce que le film, toujours en décalage, joue avec ce qu'il dénonce. On torture gentiment les enfants mal élevés, mais, au final, on construit sa fortune sur leurs envies. Comme dans nombre des films de Burton, on est toujours en équilibre entre la tentation de la franche déviance (Edwards, Wood, Jack...) et une morale bien sage (la famille, la communauté...). Frankenstein chez Disney, on n'en sort pas. Il y a une scène qui me semble révélatrice à ce sujet : La fillette gâtée qui se voit entourée par les écureuils me fait irrésistiblement penser à celle de la scène d'ouverture du Monde Perdu de Spielberg. Elle aussi se retrouve entourée de « gentils» dinosaures gros comme des... écureuils. La différence entre les deux fillettes, c'est que celle de Spielberg est dévorée vive. Hors champ, il ne faut pas exagérer.
Qu'attendre, à priori, d'une nouvelle adaptation de Charlie et la Chocolaterie, adaptation d'un classique de la littérature enfantine écrit en 1964 par Roald Dahl ? Attendre Burton et ne pas avoir d'à-priori, ce n'est pas beau.
Dans ce film, c'est une nouvelle fois le côté étrange de Tim Burton qui fonctionne, ce côté étrange que l'on a aimé dans Beetlejuice ou Edwards aux Mains d'Argent, ou Ed Wood. Ce côté qui fait qu'un jeune illustrateur veut entrer à tout prix chez Disney pour y faire un film comme Vincent, avec une star des films d'horreur (Vincent Price pour ceux qui n'ont pas vu ce petit bijou). Disney remerciera vite le jeune illustrateur. Il y a des choses avec lesquelles on ne s'amuse pas. Chez Burton, si, on peut s'amuser de tout. Des têtes coupées, des chiens raccommodés, des réalisateurs à pull angora.
Charlie et la Chocolaterie est un délice de double niveau. Au premier étage, un conte édifiant à la manière de James et la Pêche Géante (c'est aussi un conte de Dahl). Un monde coloré façon Oz, des numéros musicaux épatants, de l'humour, une morale familiale sans bavure. Au second étage, Burton se lâche comme rarement lors de la visite de cette usine sinistre extérieurement, angoissante à l'intérieur, construite en cercles comme l'Enfer de Dante. Ca commence avec ces marionnettes de cire qui se mettent à fondre comme dans le film avec... Vincent Price. Ca se poursuit avec l'apparition de Willie Wonka, Johnny Deep au mieux de sa forme, changeant d'expression toutes les secondes, qui m'est apparu comme une sorte de Michael Jackson, avec son visage blafard, inhumainement lisse, ses gants violets qu'il ne quittera jamais. Wonka-Jackson qui fait visiter son palais à des enfants, mais prudence, accompagnés d'un parent. Difficile de ne pas y penser. Wonka-Deep, c'est un peu le grand méchant loup de Tex Avery : on voit les dents. Ou plutôt, dans le contexte, la petite fêlure dont on ne sait jamais où elle va l'emmener. Tout cela nous met délicieusement mal à l'aise. Comme avec ces références insistantes à l'univers de Kubrick. Pas vraiment une référence pour enfants, non ? C'est pourtant avec les mots d'Orange Mécanique que Wonka-Deep répond à un sale gosse prétentieux. C'est pourtant autour d'une séquence de 2001 qu'est construite l'une des séquences clefs du film, critique en règle, bien que convenue, de l'influence de la télévision sur les enfants. Mal à l'aise, enfin, avec ces étranges Oompa Loompa , drôles, certes, mais quelque peu curieux, avec leur unique visage à la limite du zombie.
Convenue disais-je, oui, parce que le film, toujours en décalage, joue avec ce qu'il dénonce. On torture gentiment les enfants mal élevés, mais, au final, on construit sa fortune sur leurs envies. Comme dans nombre des films de Burton, on est toujours en équilibre entre la tentation de la franche déviance (Edwards, Wood, Jack...) et une morale bien sage (la famille, la communauté...). Frankenstein chez Disney, on n'en sort pas. Il y a une scène qui me semble révélatrice à ce sujet : La fillette gâtée qui se voit entourée par les écureuils me fait irrésistiblement penser à celle de la scène d'ouverture du Monde Perdu de Spielberg. Elle aussi se retrouve entourée de « gentils» dinosaures gros comme des... écureuils. La différence entre les deux fillettes, c'est que celle de Spielberg est dévorée vive. Hors champ, il ne faut pas exagérer.
08:30 | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : Tim Burton, Stanley Kubrick | Facebook | Imprimer | |
Commentaires
C'est avec un grand plaisir que j'ai parcouru cette note sur Charlie et la Chocolaterie de T. Burton. Un livre que j'ai lu et apprécié étant gosse et que tu m'as donné envie d'aller (re)découvrir. Merci ! :)
Écrit par : Brice | 18/07/2005
Et bien, j'espère que vous ne serez pas déçu (on ne sait jamais, surtout avec les lectures d'enfance) et que vous me ferez part de votre opinion.
Écrit par : Vincent | 19/07/2005
J’ai vu Charlie et la Chocolaterie lundi soir lors d’une projection en extérieur, à Contes.
La plupart de tes commentaires, Vincent, sont fondés et pleins d’intérêts. Le seul point sur lequel je ne serais pas d’accord, c’est le talent que tu prêtes à Johnny Deep.
Je trouve son « excentricité » convenue et son jeu éternellement le même. Attention : je ne dis pas qu’il joue mal, je dis d’une part qu’il ne prend plus de risque (à moins que plus aucun producteur ne souhaite le voir faire autre chose que le Johnny Deep), et d’autre part que des p’tits gars comme lui avec les mêmes compétences, il y en a plein les agences (« Plein » c’est combien ? – Heu… je passe…). Les enfants sont au final les comédiens que j’ai préférés.
Malgré ces vilaines critiques (Luc est un acteur jaloux ! hoouuu !), en examinant bien son visage et les expressions qu’il pouvait prendre, j’ai réalisé qu’il serait l'interprète idéal pour incarner… Freddy Mercury (Mais si je vous assure ! Regardez mieux !). Les Queen, puisqu’ils dégoulinent d’argent, ils pourraient bien produire un joli film sur la vie du chanteur, non ?
Ah oui, une dernière constatation : ce film s’adresse aussi aux jeunes, mais malheureusement, ceux-ci semblent, à première vue, ignorer jusqu’à l’existence des films dont il est fait allusion dans ce conte. « Même 2001 ? – Même 2001… » (et à propos d’allusions, la scène où la fillette est entourée d’écureuils me fait plutôt penser aux « Oiseaux » d’Hitchcock)
Le restant de mes commentaires sur ce film sera pour dire tout le plaisir que j’ai eu à le regarder.
Écrit par : L U C | 29/07/2005
je ne suis pas vraiment d'accord avec luc en ce qui concerne johnny depp ( et pas deep, sinon ça fait johnny "profond"...)je trouve au contraire qu'il est excellent dans ce film et qu'il en fait juste ce qu'il faut pour incarner à merveille l'étrange personnage qu'est Willie Wonka. les references dont tu parles vincent, sont bien là, et à mon avis, peu importe si des minauds n'ont pas vu 2001 ou orange mecanique, ce sera pour plus tard! En tout cas elles sont pour moi la preuve d'un cinéma de grande qualité.
Écrit par : milou | 02/08/2005
Je n'ai pas aimé Charlie et la Chocolaterie justement à cause de la "morale bien sage" et "convenue".
Écrit par : Zaak | 03/08/2005
Cher Zaak, cela mériterait un peu plus de développement. Est-ce que c'est le principe d'une morale qui vous rebutte ou celle-ci en particulier que vous n'appréciez pas ? Ceci dit, cela ne m'a pas trop géné dans la mesure ou nous sommes dans un conte et que les morales des contes sont souvent sages. mais il est vrai que le film jour habilement sur une ambiguité au niveau de la morale.
Écrit par : vincent | 03/08/2005
Un beau commentaire, justifié dans son ensemble, sur un film que j'ai beaucoup apprécié.
Vu en VO dans un de ces petits cinémas que j'apprécie de plus en plus, je suis resté séduit par la réalisation, à la fois clinquante (le monde de Wonka) et inattendue (ces incroyables vieillards), d'un Burton en grande forme. Les musiques concourent bien évidemment à la réussite du film, totalement décalées, mais résolument dans le ton de l'oeuvre. Et ces inénarrables oompa-loompas, au visage imperturbable, qui se moquent (pas toujours) gentiment des enfants "éliminés" par leurs propres erreurs...
Un vrai film grand public, drole et plein de rêve, pour les enfants, et déjanté et hors-norme pour leurs parents.
Les fans du livre, eux, devront se faire leur propre idée, l'image que l'on se fait d'un conte dans son enfance est fatalement trahie par une adaptation imagée...
ps : désolé d'avoir empiété sur ton blog, ami cinéphile, mais ton avis m'a enthousiasmé, et je n'ai pas pu résister ;)
Écrit par : Gusseuh | 03/08/2005
Je suis épaté par votre avis mr Vincent. Vous m'otez les mots de la bouche.
Que rajouter sinon la très grande fidélité de l'adaptation au bouquin, et pourtant Burton qui transpire dans tous les espaces laissés libres.
Pour une réalisation de commande, j'ai été ravi.
Écrit par : Muscardin | 04/08/2005
Inconditionnel de Burton, j'ai apprécié ce film, tous les éléments d'un beau et grand spectacle burtonien sont au rendez-vous, cast & crew. Tout de même ce film fait très peur. Willy Wonka, c'est Edward 20 ans plus tard (remarquez la paire de ciseaux lors de l'inauguration). Et quoi alors ? A l'enthousiasme, la beauté du personnage, l'espoir qui s'en dégageait, se substitue un personnage blessé, trahi, en manque de confiance et ayant perdu son énergie vitale. N'est-il pas à la recherche de sang frais, n'est-il pas physiquement et psychologiquement à bout ? N'est-il pas froid et détaché, en dehors du principe même de ce qui anime les personnage de Burton : l'amour.
Alors il y a la morale. C'est un film moraliste, certes. Célébrant le cercle familial, comme fondateur des êtres, dans leur personnalité morale et intellectuelle. Cela peut paraître facile et niait, mais loin de critiquer Burton, nous devons prendre conscience du risque qu'il prend et du courage dont il à du s'armer pour mener ce projet tel qu'il est, jusqu'au bout. N'oublions pas, chers amis cinéphiles, nous qui nous confrontons aux idées venues d'ailleurs (et même de Mars), qui faisons des efforts pour comprendre les idées différentes, que Burton parle au grand public d'un pays qui depuis des dizaines d'années patauge dans le politically correctness, et dans la mollitisation de la société. Alors oui, c'est moral, mais voila un homme qui à le pouvoir de s'adresser au monde, et qui ose dire ce qu'il pense, en sachant qu'il va se heurter au conformisme de beaucoup, anonymes et gens de pouvoir.
C'est risqué.
Bien à vous tous, js.
Écrit par : js | 04/08/2005
Merci à tous pour vos contributions.
A Gusseuh : vous pouvez empiéter tant que vous voulez de cette manière, c'est fait pour ça ! Et quelle belle collection de DVD vous avez.
A JS : Jolie déclaration au cinéma de Burton, à laquelle je souscrit totalement. Je ne suis pas un inconditionel, pourtant, parce que certains films manquent un peu leur cible (La Planète des Singes, le premier Batman) mais quel bonheur quand il réussit. Chapeau.
Écrit par : vincent | 05/08/2005
C'est une adaptation bien barrée mais fidèle du livre, avec des décors improbables qui portent indubitablement la marque de Burton. De mon point de vu, l'aspect burlesque manque de finesse, je me suis un peu ennuyé voire agacé par moments et Johnny Depp m'a paru peu convaincant dans le role de Willy Wonka.
Écrit par : choco | 10/04/2014