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09/04/2017

Joe Dante à la Cinémathèque

25/01/2017

Marilyn rose bonbon

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Marilyn Monroe, un livre et un déshabillé révélateur. Superbe série de photographies signées Philippe Halsman. © Copyright 2015 Halsman Archive

23/01/2017

Juste un pas sur la gauche

20/11/2016

Lâchez tout !

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09/11/2016

Hommage à Raoul Coutard

08/10/2016

Epicée

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Ginger Rogers, début des années trente - DR

06/10/2016

Un film saignant

09/08/2016

Des images pour l'été (2)

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Maureen O'Sullivan en Jane dans Tarzan and his mate (Tarzan et sa compagne) réalisé par Cédric Gibbons en 1934. c'est la belle époque où elle porte encore le bikini échancré. Photographie MGM.

09/07/2016

Can't take my eyes off your movies

Je me souviens encore très bien de la sortie en 1981 de Heaven's gate (La porte du paradis – 1980) dans la foulée de sa présentation cannoise. A l'époque je lisais les compte rendus du festival dans Le Matin qu'achetait mon père et j'avais remarqué ce qui semblait être un western à grand spectacle. J'avais 15 ans et les westerns se faisaient rares en salles. Je me souviens avoir eu l'envie d'aller le voir et que quelqu’un, qui cela m'échappe, m'en a dissuadé. Peut être que j’étais tombé sur l'un des articles négatifs qui avaient accueillit le film, ou bien sur le récit de ce qui était déjà présenté comme une catastrophe financière, le fameux « Rarement montagne d’argent aura accouché d’une aussi malingre souris »  d'Olivier Eyquem dans Positif. Bref... je suis passé à côté de Michael Cimino en 1981. Puis il y eu un éditorial de Starfix dont l'équipe avait vu une partie de Year of the dragon (L'année du dragon – 1985) et en avait tiré un texte court et enflammé bien dans leur manière, citant les ténors du cinéma américain du moment (Spielberg, De Palma, Coppola, Lucas...) en concluant que Cimino était un cran dessus. Je devrais essayer de retrouver le texte mais pas ce soir. Ce film là, je ne l'ai pas raté et il reste pour moi la grande rencontre avec le cinéaste. Je n'avais jamais vu un polar de cette trempe, ni des personnages aussi magnifiques, aussi incarnés. Je pense à celui de la femme de White jouée par Caroline Kava qui m'avait bouleversé. Cimino prenait ainsi une place de choix dans mon panthéon et comme beaucoup, j'ai attendu avec impatience son Sicilien. C'était aussi le bref morceau de temps où Christophe Lambert a fait illusion. Vu en 1987, en avant-première dans l'auditorium d'Acropolis, The sicilian a été une déception. Pas autant que ce qui en a été dit ensuite, il y a de belles choses dans le film. Mais par rapport au précédent, Lambert par rapport à Rourke, quelque chose fonctionnait mal. Pour Cimino, il faudra attendre quatre années avant un nouveau film, Desperate Hours en 1990, sortie discrète pour un film là encore pas complètement satisfaisant. Mais pour l'admirateur de John Ford que je suis, le plan au début du film où l'avocate se recueille devant un vaste paysage sauvage avec une stèle « Au capitaine Nathan Brittles » m'avait touché. Nathan Brittles est le nom du personnage joué par John Wayne dans She wore a yellow ribbon (La charge héroïque – 1949). J'ignore combien de personnes ont fait le lien. C'est une de ces connivences secrètes qui me réjouissent toujours, comme le fait que c'est John Wayne, peu de temps avant sa mort, qui a remis à Cimino son oscar du meilleur film début 1979.

michael cimino

Entre temps, j’avais découvert Heaven's gate (La porte du paradis), d’abord en 1990 sur grand écran à la Cinémathèque de Nice, dans la première version complète, puis au Cinéma de Minuit de Patrick Brion qui avait été l’artisan de la redécouverte de cette œuvre monumentale l'année suivante. La gifle, l'extase. L’incompréhension aussi face à la façon dont le monde est passé à côté de ce film. Ce sont des choses qui arrivent. D'une certaine façon, je suis heureux d’avoir découvert le film dans sa forme aboutie et non dans la version tronquée proposée en 1981. Ce film majestueux brassait dans un vaste mouvement épique des choses que j'aimais chez David Lean, Sergio Leone, Luchino Visconti, Sam Peckinpah et John Ford, quelques autres aussi, mais tourné d'une manière très personnelle qui fait du film une expérience unique. Comme pour celles qui ont compté dans ma vie, il y a eu un avant et un après Heaven's gate. The deer hunter (Voyage au bout de l'enfer – 1978) est venu après et j'aurais ainsi découvert l’œuvre de Cimino à l'envers pour l'essentiel. Inutile d'aligner les superlatifs, le plus étonnant pour moi dans ce film là, c'est que j'y adore Robert De Niro et Meryl Streep dont je ne suis pas, à de rares exceptions près, grand amateur. Et puis la façon dont John Cazale se dresse dans la scène du bar, la façon dont George Dzundza se met au piano pour le Nocturne de Chopin... C'est un film qui a imprimé profondément en moi et que je revois régulièrement avec un sentiment d'intimité et d'admiration qui ne cesse de grandir. La dernière fois, je me disais que la scène finale, celle autour de la chanson God bless America, c'était un peu comme si Cimino reprenait la fin de The searchers (La prisonnière du désert – 1956) de Ford, mais avec un Ethan Edwards qui ne serait pas resté dehors et serait venu partager le repas de la réconciliation. Et avec tout ça, j'ai redécouvert Thunderbolt and Lightfoot (Le canardeur – 1974) qui ne m'avait pas marqué lors d'une première vision télévisée. Reste encore Sunchaser. Les derniers souvenirs sont littéraires, la lecture surprise de Big Jane, son premier roman en 2001, drôle de bouquin avec une drôle d'héroïne et du golf, un texte dont j'essayais de deviner les images derrière les mots. Et enfin les conversations avec Jean-Baptiste Thoret, brillantes. Cimino m'aura manqué, comme tous les cinéastes avec lesquels j'ai grandit et qui ont tourné trop peu. Seule consolation, il n'aura pas été de ces cinéastes dont j'aurais pu voir la dégringolade artistique, ceux dont l'espoir mis en leur talent aura tourné en eau de boudin. Non, comme Joe Dante ou John Carpenter, Cimino laisse une œuvre certes plus courte qu'espéré, mais qui, telle qu'elle est, donne plus de plaisir que tant d'autres plus fournies. Et je ne donnerais pas de nom !

Photographie United Artist.

03/07/2016

Requiem pour un cinéaste

Michael Cimino 1939-2016

03/06/2016

Au bord de la piscine

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Nanni Moretti sur le tournage de Palombella rossa (1989). DR.

01/05/2016

Chemisier rouge

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Angie Dickinson en marge du tournage de Rio Bravo (1959) de Howard Hawks.

Photographie Warner Bros.

28/04/2016

Une cuillère pour le réalisateur

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Josette Day nourrit Jean Marais sous son maquillage de La belle et la bête (1946)

de Jean Cocteau. Photographie Unifrance.

02/02/2016

Bien entouré (Va savoir)

Jacques Rivette

Jacques Rivette en marge du tournage de Va savoir (2001) entre les belles Jeanne Balibar et Hélène De Fougerolles. Merci à La chambre - Éclair alias Grr, alias Oups, victime des limitations dans les commentaires sur Haut et Fort. L'important, c'est que nous puissions tous en profiter. DR. 

31/12/2015

Bonne année 2016 !


27/10/2015

Maureen Fitzsimons O'Hara 1920-2015

Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.

J'ai lu qu'elle était morte paisiblement, à 95 ans, entourée des siens et en écoutant la musique que Victor Young composa pour The quiet man (L'homme tranquille - 1952) de John Ford. Il y a sans doutes des façons plus désagréables de mourir. The quiet man était, disait-elle souvent, son film favori, et certainement son rôle de Mary Kate Danaher est de ceux qui vous inscrivent en lettres d'or dans la grande histoire du cinéma. Maureen O'Hara n'était pas que Mary Kate, même si je ne peux m'empêcher de penser d'abord à elle, portant avec vaillance les prénoms de la mère et du grand amour du réalisateur. L'actrice a su incarner de nombreuses fois un alliage de classicisme et d'énergie très moderne, jouant de sa beauté qui coupait le souffle et de cette sensualité de rousse flamboyante à la poitrine conquérante. Elle pouvait tour à tour être drôle, être simple, être mélancolique, être légère, être volontaire, être désirable et désirante (Ah ! ces frémissements dans le cimetière), vive et vivante. Cette richesse en a fait une actrice parfaite pour John Ford aux côtés de John Wayne souvent. Aujourd'hui ma tristesse va à la disparition de la dernière membre de la John Ford'Stock Company, un peu l'ultime déesse d'un olympe de cinéma, dernier témoin d'une épopée artistique unique qui peut revivre, miracle, à chaque instant de part notre volonté, de part notre amour des mines du Pays de Galles, des rives du Rio Grande, de West Point, des maisons d'aviateurs et bien entendu d'Inisfree. Mais je m'incline aussi devant la jeune Mary Yellen hitchcockienne, devant Esmeralda, Lady Margaret Denby pour Henry King, Louise Martin chez Jean Renoir, La comtesse Francesca de Frank Borzage, Doris Walker, la fille d'Athos, Katie Howard, Kit Tilden pour Sam Peckinpah, Martha McCandles et toutes celles auxquelles elle aura donné sa chevelure rousse, ses yeux gris-verts et son tempérament de feu.

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Maureen O'Hara

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Photographies DR (MGM, Universal, Republic Pictures)

30/09/2015

Les yeux de Leonora Ruffo

 

27/09/2015

Le monde dans ses bras

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Ann Blyth et Gregory Peck à la barre dans le superbe film signé Raoul Walsh, The world in his arms (Le monde lui appartient - 1952) Photographie Universal - Source Greenbriar Picture Show

13/09/2015

Où que tu sois, où que tu ailles (Partie 3)

Face à Emma, Vienna est femme dans toutes ses dimensions. Une héroïne avec un grand « H ». Elle change dix fois de costume, offrant à chaque fois une facette de sa personnalité : la tenue noire moulante et masculine de la scène d'ouverture, l'élégante robe de chambre de la si belle scène nocturne avec Johnny, la tenue de femme d'affaire bourgeoise quand elle se rend en ville, la somptueuse robe blanche avec laquelle elle défie les tueurs, les tenues cow-boy avec ces chemises jaune citron ou rouge vif. Gloire au travail de la costumière attachée à Joan Crawford, Sheila O'Brien. Vienna est un caractère mais à y bien réfléchir, elle reste un fantasme masculin. Elle est la prostituée au grand cœur, la fille de mauvaise vie dont la souffrance est sublimée par ses qualités humaines sous un fin masque de dureté. Elle est la femme à poigne mais généreuse, mais surtout une femme amoureuse qui au fond n'aspire qu'à l'amour de son Johnny « Où que tu sois, où que tu ailles ». Un amour total, un amour fou. « J'aurais rampé pour être près de toi » avoue-elle.

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Vienna, c'est Joan Crawford et réciproquement. C'est l'actrice qui achète les droits du roman de Roy Chanslor et s'implique dans le projet dès le début, malgré toutes les réserves qu'elle fera sur le film. En 1954, Crawford a presque la cinquantaine. Elle a débuté au temps du muet et été la star de la prestigieuse MGM sous la direction de Tod Browning, Clarence Brown, Frank Borzage ou George Cukor. Dans les années cinquante, elle maintient son étoile, mais trouve face à elle une nouvelle génération, les Ava Gardner, Jane Russel, Marilyn Monroe, Grace Kelly ou Elizabeth Taylor. Elle doit sentir d'instinct que Vienna est un rôle rare pour une femme de son âge. Un rôle à ne pas laisser passer. Elle ne se doute peut être pas à quel point. Vienna dépasse son statut d’archétype par ce qui est à Joan Crawford en propre, cette beauté de la maturité, ce caractère trempé par plus de trente années au sommet de Hollywood, cette sensualité doublée du regard de celle qui a vécu et sait le prix des choses, de la vie et de l'amour. Ce mélange de force et de fragilité est travaillée par Nicholas Ray qui entretient à l'époque une liaison avec l’actrice et nourrit le personnage de cette expérience. Sa sensibilité naturelle fait le reste. Vienna marque du coup un nouveau type d'héroïne flamboyante qui en inspirera bien d'autres. Jill, incarnée par Claudia Cardinale pour Sergio Leone dans C'éra una volta il West (Il était une fois dans l'Ouest – 1968) lui doit beaucoup.

Même s'il donne son nom au film, Johnny « Guitar » Logan reste dans l'ombre de son ancienne maîtresse et Sterling Hayden dans celle de la star Joan Crawford. Il serait dommage de limiter notre héros à son apparence. Hayden incarne lui aussi un archétype et un autre fantasme masculin. Grand, fort, dévoué, loyal, rapide au six-coups, décontracté à la guitare, il a le verbe rare mais la répartie qui fait mouche. Au-delà, Ray et son acteur lui donnent de belles nuances. S'il accourt à l'appel de Vienna, Johnny n'en est pas moins à la base un beau salaud doublé d'un imbécile, du moins côté cœur. Intéressant renversement de situation, c'est lui désormais qui fait payer ses services à l'ancienne fille de saloon devenue propriétaire. Il accepte de devenir sa chose comme elle l'avait été pour lui. Mais Johnny a souffert et il a appris. C'est la queue basse et la guitare en bandoulière qu'il revient. Et finement, Ray ne va pas l'accabler. Toute la dimension romantique du personnage éclate lors de la fameuse scène nocturne entre les deux ex, elle et lui en toute beauté. Vienna l'empêche de s'apitoyer sur lui-même en lui renvoyant violemment sa propre souffrance. Ce faisant elle l'oblige à de dévoiler et à ouvrir son cœur. Grande âme, elle ne lui fera pas payer son abandon. C'est une très belle scène d'amour entre adultes capables d'intelligence, capables de surmonter leurs rancœurs pour saisir une nouvelle chance. Quelques minutes en état de grâce qui arrivent assez tôt dans le film et éliminent la fausse piste d'une « comédie du remariage » pour revenir à l'action, au mouvement du western pur. Le couple de nouveau réuni, comment va-t-il affronter les périls en tant que couple ? C'est la question centrale de tout ce qui va suivre.

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Johnny doit tout au jeu retenu de Sterling Hayden. A son charisme fou, ses épaules rassurante, sa belle voix basse et ses gestes félins. Hayden contraste avec les jeux plus colorés, voire expressionnistes de ses partenaire et les mets en valeur. Du coup il se retrouve, à la manière de John Wayne qui faisait cela très bien, en pivot, en catalyseur des actions et des sentiments des autres. Et si Joan Crawford est la star de nombreux films de prestige pour les plus grands studios, Sterling Hayden, malgré son rôle magnifique pour John Huston dans The asphalt jungle (Quand la ville dort - 1950), reste un acteur type de série B, films de pirates, westerns, films noirs, aventures en tout genre qu'il enchaîne jusqu'à sa rencontre avec Stanley Kubrick. Ses problèmes avec le maccarthysme (il avait été espion en Yougoslavie avec les partisans de Tito pour l'OSS, les services secrets américains, et proche des communistes) n'ont sans doute pas arrangé les choses, tout en donnant du sel à ses confrontations avec Ward Bond. Le duo Hayden - Crawford, à l'image du film, c'est l'alliance de la sophistication hollywoodienne et de l'efficacité de la série B.

Si Johnny Guitar doit une large part de son succès et de sa postérité au duel atypique et flamboyant entre les deux femmes, il serait dommage de passer à côté du parcours plus discret de son héros masculin vers la rédemption par l'amour, et à ce portrait de couple qui fait renaître après tant d'années une passion aussi pure. C'est l'ultime image, l'étreinte dans la rivière après le passage sous l'eau purificatrice de la cascade.

Je n'ai jamais été un inconditionnel du cinéma de Nicholas Ray. Il y a bien sûr They live by night (Les amants de la nuit - 1949) et In a lonely place (Le violent – 1950), Les indomptables (The Lusty Men (Les indomptables - 1952) et le superbe Party Girl (Traquenard – 1958). Il y a de belles choses dans son western chinois à grand spectacle, mais sa fureur de vivre ne m'a guère touchée, trop marquée par son époque. La carrière de Ray m'apparaît inégale mais avec Johnny Guitar, il orchestre avec brio une conjonction hétéroclite de talents et forge aux quatre éléments, la tempête, l'incendie, la cascade, la montagne, un miracle de film, un joyau intemporel aux multiples facettes colorées, émouvant et excitant, drôle et tragique, dont chaque vision renforce l'admiration.

Photographies DR

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A lire sur DVD Classik

A lire sur le forum Western Movies

A lire chez le bon Dr Orlof

A lire chez Shangols

A lire sur le NYS Writers Institude (en anglais)

A lire "Entre John Wayne et Camus" sur Soft morning, city ! (en anglais)

A lire un texte de Lise Willar

11/09/2015

Où que tu sois, où que tu ailles (Partie 2)

 Ce qui fonctionne aussi, c'est ce travail sur les archétypes que Ray et son scénariste investissent de caractères sensibles et d'une modernité qui n'est en rien une posture car elle est sincère. La fille de saloon, le tueur à gages, le gros propriétaire, le shérif, c'est du déjà vu cent fois. Mais il est rare que ces figures expriment avec une telle force leur vérité intérieure, qu'il s'incarnent en personnages de chair capables d’émouvoir dans toutes les dimensions que l'on peut donner à ce mot. Cela repose sur un travail très précis de Nicholas Ray sur le jeu des acteurs et leur choix en amont. Le film est dépouillé de quasiment tous les personnages qui ne sont pas essentiels à l'action. Et de la star au plus petit rôle, tous ont leur instant de grâce, leur petite touche d'humanité. Ce sera une réplique, un geste, un regard. Quelque chose qui n'appartient qu'à lui et qui l'inscrit dans la mémoire du spectateur.

nicholas ray

 Il y a le barman de Vienna (Frank Marlowe, déjà croisé chez Ray). Quand elle remet à ses employés leur solde parce qu'elle va fermer le saloon, il a un geste de lui prendre les mains avec un regard affectueux plutôt inédit pour un personnage qui ne dit pas un mot de tout le film. Plus emblématique, véritable profession de foi de Ray, la mort de Tom joué par le grand John Carradine. Relégué à l'arrière-salle, sans doute un clochard de l'Ouest auquel Vienna a donné une nouvelle dignité avec son travail d'homme à tout faire. La loyauté de Tom ira jusqu'au sacrifice quand il tente de la sauver du posse après la découverte de Turkey. Il meurt au centre de l'image avec cette superbe déclaration : « Tout le monde me regarde. C'est la première fois que je me sens important ». Dans Johnny Guitar, tout le monde a son instant au centre de l'écran et la sensibilité légendaire de Ray l'amène à mettre dans cet instant la part la plus sympathique, la plus émouvante de chacun. Même chez les personnages les plus antipathiques, ceux des bons citoyens avides de lynchage menés par McIvers. Leur violence est le plus souvent montrée en plans larges, image de la foule vêtue de noir, animal autonome décrit si justement par Johnny. Mais les plans rapprochés, ceux qui isolent et mettent en évidence tel ou tel homme, servent à exprimer le doute, la lassitude, l’écœurement. Lors de la terrible scène du lynchage, Ray montre une subite remontée de quelque chose d'humain. Il y a cet homme qui ne peut se résoudre à exécuter Vienna et s'excuse (tout en lui ayant passé quand même la corde au cou). Je vois ici le refus de Ray de réduire un personnage, même très secondaire à un simple cliché facile. Il ne cherche certes pas excuser le groupe, mais Ray n'oublie pas que cette horde sauvage est composée d'hommes qui pourraient individuellement, en d'autres circonstances, se comporter autrement. Il amène une réflexion sur les mécanismes d’entraînement d'une foule, sur ce que l'on pourrait appeler le fascisme ordinaire. D'un côté, ce n'est pas rassurant, de l'autre il y a la possibilité d'une prise de conscience.

L'on a beaucoup écrit sur les allusions du film à la chasse aux sorcières maccathyste, à raison. Mais le film dépasse ce sous-texte localisé dans le temps et n'est pas spécialement original si l'on pense à Silver lode (Quatre étranges cavaliers) d'Allan Dwan tourné la même année. De fait, Ray montre souvent les hésitations de ses personnages. Vienna refuse la proposition de Johnny de tirer dans le tas, le shérif est sans cesse tiraillé entre l’accompagnement de ses administrés dans la justice expéditive et la volonté d'imposer l'ordre qu'il représente. Il se montre haineux envers Turkey puis tente de calmer le jeu. Ses hésitations lui seront fatales. Le plus intéressant c'est McIvers. Philip Yordan avait expliqué à Bertrand Tavernier que l'acteur choisi pour le rôle, Ward Bond, un fidèle de John Ford, était aussi connu pour son engagement très à droite et son anticommunisme primaire. « Nous lui avons fait jouer le rôle du chef de milice, un extrémiste fascisant faisant régner la terreur. Et lui croyait que son personnage était un héros, un bonhomme sympathique. Il n’avait rien compris ». Pourtant si McIvers n'a rien de sympathique, Ray le filme souvent en pleine indécision, montre ses vacillements, sa fatigue quand la poussière macule son costume noir. Face à la haine d'Emma, il tente de la mettre à l'écart et parfois de la modérer. Lui aussi, après avoir été sans pitié envers Turkey, hésite et recule quand il faut pendre Vienna. C'est lui qui, par intérêt bien compris, empêche l'assaut final et laisse partir le couple réuni. Pragmatisme, lassitude, prise de conscience ? Bond donne malgré tout à son personnage un minimum d’ambiguïté et évite le portrait d'un méchant d'un bloc. Enfin, Ray avait déjà fait tourner Bond dans On dangerous ground deux ans plus tôt. Difficile de croire à la simple blague politique dont parle Yordan.

Deux personnages seulement échappent à ces nuances, mais pour les tirer dans une autre dimension. Il y a Bart Lonergan, joué par Ernest Borgnine qui venait de personnifier le bestial sergent Fatso Judson dans From here to eternity (Tant qu'il y aura des hommes – 1953) de Fred Zinneman. Lonergan est l'un des compagnons du Kid et un échange avec celui-ci le résume :

Bart, tu ne bois pas, tu ne fume pas, tu es mauvais avec les chevaux. Qu'est-ce que tu aimes ?

Moi, je m'aime moi et je prends bien soin de moi.

Lonergan est un mélange détonnant d'égoïsme, de violence, de lâcheté et de bêtise. Le salaud intégral, le traître de mélodrame idéal qui frappe dans le dos et dissimule un couteau dans sa botte. Son ignominie est telle que Ray le traite avec une pointe d’ironie, par exemple quand il rentre dans le saloon après s'être fait rosser par Johnny, sur quelques notes amusantes de Victor Young. Ou encore quand après avoir assassiné Corey, il déclare « Il y en a qui n'écoutent jamais » avec un air sincèrement offensé. Repoussoir idéal, il met en relief les qualité des autres, y compris d'un McIvers. Il est le seul personnage du film qui ne trouve pas grâce aux yeux du metteur en scène.

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Le cas d'Emma est plus complexe. L'admirable Mercedes McCambridge, venue du Mercury Theater d'Orson Welles et ayant joué pour George Stevens comme Jesús Franco avant de faire la voix du démon dans The exorcist (1973) de William Friedkin, McCambridge donc tire Emma vers une dimension shakespearienne. C'est la lady Macbeth du far-west. Emma est le double opposé de Vienna. Comme elle, c'est d'abord une femme qui doit s'imposer dans un monde d'hommes plutôt rugueux. Et c'est une femme qui au contraire de Vienna n'assume pas sa féminité, ne sachant ou ne voulant pas s'en servir. Elle transforme ses désirs en pulsion de mort. Petite, tassée, engoncée dans une tenue masculine où sombre (belle idée que celle du posse qui se forme juste après l'enterrement du frère d'Emma et dont tous les membres sont vêtus de noir), nous la devinons sous la coupe de ce frère assassiné au début du film, puis la voyons encadrée très paternellement par le shérif et McIvers. Toujours elle est en butte à leur mépris. Son discours aux cavaliers du posse, quand elle leur reproche de ne l'avoir jamais écoutée parce que femme est l'expression de toute la rancœur accumulée face la domination masculine. En même temps, elle utilise cette sincérité pour les manipuler et les amener à lyncher Vienna. Redoutable petite femme. A McIvers qui cherche à la mettre à l’écart, elle répond « Je chevaucherais en tête » et file au galop, remontant la file des hommes et laissant derrière elle dans la poussière son voile de sœur en deuil. Un autre plan inoubliable. Frustrée socialement, Emma l'est tout autant sexuellement. Elle aime le Kid sans espoir et il se moque d'elle en courtisant Vienna. Pire, il l'expose au public, révélant ses sentiments en l’entraînant dans une danse où elle se montre raide comme un manche à balai. Emma est le vilain petit canard auquel l'actrice donne des éclairs expressionnistes. Loin de se transformer en cygne, elle devient harpie, intelligente et mortelle. Il y a pourtant une sorte de compassion qui se dégage de ce que l'on devine derrière les regards glaçants de la méchante sublime. Contrairement aux autres, elle assume sa saloperie, quand le posse refuse de pendre Vienna et l'oblige à prendre ses responsabilités, quand elle se vautre dans sa vengeance en mettant le feu au saloon avec un rire halluciné, et lors du final apocalyptique où elle tente avec fureur de détruire tout ce qui lui rappelle ce qu'elle n'est pas.

S'il faut vraiment voir du féminisme dans Johnny Guitar, face à des films comme Westward the women (Convoi de femmes – 1950) de William Wellman ou The Woman they almost lynched (La Femme qui faillit être lynchée - 1953) d'Allan Dwan, c'est dans la part douloureuse d'Emma qu'on la trouvera et dans la façon dont la domination masculine exacerbe le pire chez elle.

(à suivre)